Haropa Port franchit le cap des 3 MEVP

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L’établissement portuaire, issu de la fusion des trois ports du Havre, Rouen et Paris, a été porté sur les fonts baptismaux il y a moins d’un an. Mais les résultats du premier exercice à grande échelle sont déjà présentés comme une preuve de la justesse du concept.

Pour sa première intervention devant la presse en tant que président du conseil de surveillance d’Haropa Port, Daniel Havis, élu le 9 juillet, a parfaitement endossé le rôle. Il s’emballe face à la croissance des trafics du nouvel établissement, issu de la fusion des trois ports du Havre, de Rouen et de Paris, « aussi rapidement opérationnel ». En 2021, année de sa création, Haropa Port franchit le Rubicon des 3 MEVP pour la première fois (3,07 MEVP), porté dans le conteneur par une croissance de 28 %, plus de deux fois supérieure à la moyenne mondiale (13,5 %) selon ses données.

En croissance de 12 % par rapport à une année à la base particulièrement faible, à 83,8 Mt, le tonnage global reste en deçà de son niveau de 2019, où il tutoyait les 90 Mt. Dans le même temps, le trafic de pétrole brut, irréversiblement appelé à décliner, est passé de 21 à 15 Mt entre 2019 et 2021. Les trafics ont donc été plutôt stabilisés.

« Ces résultats démontrent que l’ensemble portuaire dispose désormais de la bonne taille critique pour améliorer durablement sa compétitivité, conforter sa position de premier port de France, mais aussi et surtout consolider sa place parmi les très grands ports européens », s’enflamme le président du conseil, garant de la stratégie.

Les instances de gouvernance à plusieurs étages sont en place, se doit-il de rappeler. Les conseils de développement territoriaux du Havre et de Rouen ont été installés le 13 octobre (Nils Benetton, directeur général de Sea Invest France, à Rouen et Hervé Bonis, président de l’UMEP et directeur général de Seafrigo, au Havre). Celui de Paris l’a été le 19 octobre (Séverine Chapus, en charge du développement chez BNP Paribas Real Estate). Depuis le 6 janvier, le Conseil d’orientation de l’axe, dernier pilier du dispositif, est présidé par Pascal Sanjuan, préfet délégué interministériel au développement de la vallée de la Seine.

Politiques tarifaires en phase

« Première mesure forte » post-fusion, une politique tarifaire commune, qui harmonise les redevances domaniales et les droits de port à l’échelle de l’axe Seine, est effective depuis le 1er janvier 2022. Pour les navires de haute mer, cela signifie d’ores et déjà une réduction des droits de port de 20 % (contre 15 % auparavant).

Cela permet aussi, explique la présidence, de flécher une partie plus importante du budget vers le verdissement, notamment « par une tarification favorable au développement des modes massifiés » et par l’accueil de navires vertueux au plan environnemental [l’enveloppe dédiée à la mesure de la performance environnementale ESI augmente ainsi de 25 %, NDLR]. Sachant que l’établissement avait par ailleurs décroché 71 M€ de subventions de l’État dans le cadre du plan de relance.

Pour rappel, le premier port fluviomaritime français, officiellement crée le 1er juin 2021, a été doté d’une capacité d’investissement massive de 1,45 Md€ sur la période 2020-2027. L’an dernier, Haropa Port a ainsi pu investir 197 M€, du simple au double par rapport à sa moyenne quinquennale d’investissement, mais aussi par rapport à la capacité des autres grands ports maritimes français. Le budget prévisionnel de cette année a été établi sur une base de 256 M€, qui sera désormais la moyenne annuelle jusqu’en 2027.

Au niveau du conteneur, Haropa Port fait le plein. Le trafic inland (pleins et vides), indicateur de référence pour apprécier la part de marché du port français sur ses grands voisins, est en croissance de 15 %, soit le double de sa moyenne quinquennale. Le transbordement a bondi de 79 %, à 843 000 EVP. Les flux import/export sur les conteneurs pleins tendent vers l’équilibre (48/52 %), condition pour envisager des services massifiés.

MSC au Havre

Le Havre a clairement bénéficié de la congestion de ses grands voisins avec 90 extra calls en 2021. Et Rouen aussi, qui fait office de soupape de sécurité pour y décharger des conteneurs vides, destinés à être post-acheminés par voie terrestre, avec 10 escales pour un total de 6 800 EVP.

À l’occasion de la conférence de presse annuelle, Stéphane Raison, le président du directoire de Haropa Port, a ménagé ses effets en annonçant que TIL, la filiale portuaire de MSC, déjà actionnaire du Terminal de Normandie (TNMSC, capacité de 1,5 MEVP) avec le groupe Perrigault, a racheté les parts restantes et pris le contrôle de Terminal Porte Océane (TPO, capacité de 550 000 EVP) qu’exploitait aussi Perrigault.

L’opérateur contrôlerait donc deux des trois terminaux de Port 2000. TIL/MSC et GMP se retrouvent ainsi avec six postes d’amarrage chacun sachant que les deux derniers postes à quai de Port 2000, qui vont allonger de 700 m le linéaire de quai et apporter une capacité additionnelle de 1 MEVP d’ici la fin du premier semestre, ont été attribués à GMP.

« L’opérateur a des projets très importants sur Le Havre pour pouvoir accueillir à terme les porte-conteneurs de 24 000 EVP. C’est un signal éminemment important de repositionnement de la place portuaire du Havre vers des modèles proches des ports de la rangée nord », explique Stéphane Raison.

Report modal toujours à la peine

La part modale, elle, est restée stable à 12 %, dont 4 % vers le rail, pour atteindre 270 000 EVP. « Dans le contexte inédit de la crise sanitaire, avec les retards et la congestion, les armements et les chargeurs ont privilégié la route pour évacuer rapidement les conteneurs qui avaient déjà deux ou trois semaines de retard », justifie Stéphane Raison.

L’an dernier, pour rendre la multimodalité plus attractive, Haropa avait dégainé l’incitation financière et n’exclut pas de renouveler l’opération. Sans décoller vraiment, le terminal multimodal du Havre progresse néanmoins, avec 94 000 EVP en 2021.

Autre succès de l’ensemble portuaire de l’axe Seine: la dynamique des implantations industrielles et logistiques qui s’est soldée par 350 M€ d’investissements privés, soit 50 M€ de plus qu’en 2020. « En 2022, ce sont 550 M€ qui s’ajouteront à notre budget. En plus de la confiance des armateurs et des manutentionnaires, comme l’illustre le projet particulièrement prometteur de TIL, on a aussi celle des investisseurs privés », veut croire le patron de l’ensemble fusionné. Et de glisser: « Il reste à conjuguer transition écologique et compétitivité car le challenge est celui-là. »

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