« Le succès d’une liaison ferroviaire repose sur une approche de corridor »

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Le représentant du port d’Anvers intervenait dans une des tables rondes organisées dans le cadre des Assises du Port du Futur, le rendez-vous annuel du Cerema qui s’est tenu les 22 et 23 septembre. Le port belge a de grandes ambitions ferroviaires. Et ses objectifs ne sont pas irréalistes, assure Dominique Mathern. Anvers n’a jamais caché ses intérêts pour l’Hexagone.

« Le succès d’une liaison ferroviaire repose sur une approche de corridor ferroviaire. Elle a bien plus de sens qu’une logique de destination finale. » Jean-Baptiste Djebbari, ministre délégué chargé des transports, a évoqué la réouverture de l’autoroute ferroviaire entre Rungis et Perpignan qu’il souhaite élargir au Sud à Barcelone et au Nord à Anvers.« C’est ainsi que l’on peut capter des flux et garantir un équilibre entre ceux du nord et du sud rapidement. »

Dominique Mathern, un des représentants du port d’Anvers en France, s’exprimait dans le cadre de la table ronde consacrée au pré et post-acheminements lors des Assises du futur. Une des problématiques de taille des ports français. Le report modal, avec son objectif de 30 %, en renforçant notamment les corridors de fret, fait partie des priorités affichées dans le plan de relance français.

Le retour du train des primeurs

Le Premier ministre Jean Castex et le ministre des Transports Jean-Baptiste Djebbari ont en effet annoncé, à l’occasion d’un déplacement à Limoges sur le plan de relance, la prochaine réouverture de la ligne de fret Rungis-Perpignan, à l’arrêt depuis l’été 2019, faute de clients et matériels adaptés. Cette liaison, qui relie la plateforme Saint-Charles International de Perpignan, grand marché de fruits et légumes, à celle de Rungis, son équivalent pour les produits frais, représenterait un trafic d’environ 9 000 camions par an, selon le ministère.

La ligne, qui devrait rouvrir mi-octobre, s’inscrit dans le cadre du plan gouvernemental de 1 Md€ alloués au développement du fret ferroviaire d’ici à 2024. À l’issue de l’appel à manifestation d’intérêt lancé en décembre, la société Rail Logistics Europe (RLE), regroupant Fret SNCF et les autres filiales européennes de fret de la SNCF, avait été retenue. Le Perpignan-Rungis sera composé de 12 wagons et circulera de novembre à mi-juillet au rythme de cinq liaisons hebdomadaires.

400 000 camions en transit d’Europe du Sud vers l’Europe du Nord?

« On parle beaucoup de flux maritimes. N’oublions pas les flux continentaux: si 400 000 camions transitent réellement d’Europe du sud vers l’Europe du nord, selon les données diffusées, il faut pouvoir à un moment donné les capter et les mettre sur le rail », poursuit Dominique Mathern.

À Anvers, les pré– et post-acheminements portuaires se font à 7 % par le mode ferroviaire et à 38 % par le fluvial. « Notre objectif est de passer le report modal par le rail à 15 % et la barge à 42 % d’ici 2030. En valeur absolue, cela signifie d’augmenter le nombre de trains de 220 à 440 par semaine. C’est réaliste et je suis convaincu que nous y arriverons bien avant 2030 ». Le port flamand devrait à cet horizon traiter 50 000 barges fluviomaritimes (jusqu’à 12 000 EVP), soit 5 000 de plus qu’aujourd’hui.

Pour y parvenir, Anvers joue la carte de la coopération. Il a signé l’an dernier un accord avec les entreprises utilisatrices du ferroviaire Railport Anvers, le gestionnaire d’infrastructures ferroviaires belge Infrabel et Belgique Belgian Rail Freight Forum qui réunit les entreprises ferroviaires de transport de fret.

En juillet et août, le port belge, qui totalise plus de 1 000 km de voies ferrées et dessert par le rail 70 destinations européennes, a traité en moyenne 27 trains supplémentaires par semaine, se félicite-t-il. « MSC y est pour beaucoup. Il a joué le jeu dans le cadre de la mise en œuvre de nouvelles lignes ferroviaires sur l’Allemagne et l’Autriche. »

Des ambitions en France

Sur l’Hexagone, le voisin belge n’a jamais caché ses projets: il souhaiterait une augmentation de la fréquence des services sur Lyon (une vingtaine par semaine aujourd’hui) et une liaison directe sur Paris. Les expériences passées n’ont pourtant pas été fructueuses, en raison d’un déséquilibre des flux import/export.

« Nous avons identifié de 150 à 200 camions qui se rendent chaque semaine à Paris depuis le port d’Anvers. Il serait intéressant qu’une navette ferroviaire soit mise en place entre ces deux destinations, d’autant plus qu’un équilibre des flux import/export pourrait être atteint avec une approche corridor sur Perpignan ou encore Barcelone. »

Comment expliquer qu’Anvers soit le vrai premier port français?

En France, la route exerce toujours une suprématie avec 80 % du trafic portuaire quand, dans les ports du Range Nord, 50 % du fret conteneurisé sont acheminés par voie ferroviaire ou fluviale.

Comment explique-t-il qu’Anvers soit le vrai premier port français? « Grâce à l’offre maritime, aux installations et aux équipements. Aussi ce sont souvent des importateurs qui ne travaillent pas uniquement avec la France mais dont les flux sont à destination de l’Europe. Ils peuvent d’ailleurs avoir recours au short sea, qui est aussi un report modal massifié et qui permet d’aller loin, y compris en Grèce et Espagne », justifie Dominique Mathern, dédouanant presque les ports français.

Quoi qu’il en soit, les représentants anversois sillonnent la France. Luc Arnouts, en charge des relations internationales du port belge et Marc Delbeke (le représentant pour les régions Hauts-de-France et Normandie) ont rencontré dernièrement des représentants de Ports de Lille, VNF, du Canal Seine Nord Europe, Contargo, ou encore des ports de Dunkerque et du Havre. Objectif: « Mieux se connaître pour envisager des axes communs de travail », se réjouit Marc Delbeke.

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