Si la réforme portuaire a été la bonne idée des années 2000, la stratégie d’axe a été celle de la décennie 2010. À l’exception du Sud-Ouest et du Grand-Ouest, le pays s’organise autour de bassins fluviaux à forte densité démographique et industrielle, héritage de la géo-économie française. Le Grand Est, avec la Moselle et le Rhin, est naturellement orienté vers les Pays-Bas. Pour les autres grandes régions de l’Hexagone, les axes sont pertinents: la Seine vers la région parisienne, le Rhône et la vallée de la Saône vers Lyon et le Nord vers la région lilloise et le Valenciennois.
Que cela relève des réseaux structurés autour des ports maritimes et fluviaux par des structures-faitières comme Medlink et Norlink ou de la fusion des trois ports de l’axe Seine que sont Le Havre, Rouen et Paris, la maîtrise de l’hinterland naturel doit passer par un maillage collaboratif. Dans ce sens, l’organisation de la logistique pour trois des plus grandes régions françaises repose sur le trépied port-intermodalité-plateformes. La stratégie d’axe vise d’abord à conforter cet axiome en construisant les services intermodaux pour connecter les espaces à forte densité logistique.
Pour qu’il y ait une dimension logistique de profondeur dans les ports français, il faut des réseaux et des services terrestres.
Vingt ans d’intermodalité
L’État a construit un réseau national qui irrigue la France. Peu de pays peuvent d’ailleurs se prévaloir de pouvoir assurer le transport de conteneurs sur de si grandes distances routières.
Néanmoins, l’intermodalité a progressé depuis vingt ans. Naviland, Greenmodal, Ferovergne, Sogestran, Marfret, MSC, Contargo se sont engagés sur les rails ou les fleuves. Le système Rhône-Saône, le bassin de la Seine et le réseau du Nord composent une bonne arborescence pour drainer les hinterlands.
Se pose toutefois la question de la place géographique des interfaces entre ports fluviaux et grandes gares de fret. Gennevilliers, Valenton, Noisy-le-Sec, Vénissieux, Lyon Édouard Herriot ne sont pas à proximité des zones logistiques portuaires. La seule exception est Dourges dont la conception récente bénéficie d’une articulation fluviale, ferroviaire et logistique.
Les axes fluviaux ne sont-ils pas destinés à être des lieux de prédilection pour accueillir des entrepôts logistiques?
La logique des ports fluviaux français est héritée des besoins de l’agriculture, des industries et du BTP sur lesquels se sont greffés quelques terminaux à conteneurs. La logistique d’entrepôts a sa propre et même pernicieuse logique.
Géographie des entrepôts
Il y a quelques années le rapport France Logistique 2025 avait pointé le problème de la géographie des entrepôts en France. La recherche du mètre carré pas cher et la connectivité routière a favorisé les grandes plaines de l’Est de l’Île-de-France et du Lyonnais, loin des gares de fret et des ports fluviaux. Irrémédiable? Oui parce qu’il y a un besoin de logistique de bord de quai, sur la Seine et le Rhône, avec sans doute une dimension de logistique urbaine. Non, car l’économie d’échelle vaut pour les entrepôts et les promoteurs veulent de la superficie XXL, forcément limitée pour les bords fluviaux. À défaut, on a toujours préféré les nouveaux entrepôts liés à l’international maritime qu’à ceux plantés au milieu des champs pour des raisons écologiques et trop proches d’Anvers pour des raisons économiques.