Le ro-pax espagnol à l’heure de l’internationalisation

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La crise économique a durement touché le marché espagnol du ro-pax et a affecté les comptes des grands acteurs du secteur. Mais elle a aussi eu pour effet d’accélérer la restructuration du secteur et a favorisé, pour la première fois, l’entrée des italiens Grimaldi et GNV sur le marché péninsule ibérique-Baléares. Un segment de marché clef, contrôlé jusqu’ici par les compagnies espagnoles.

L’impact de la crise sanitaire a été bien réel avec des réductions d’escales, même si l’activité marchandises a moins souffert. Le trafic passagers de Balearia, leader sur le segment de marché péninsule-Baléares, a baissé de 52 % en volume en 2020 mais le fret n’a fléchi que de 6 %. La reprise de l’activité observée se traduit par un retour progressif à la normale. « Notre programmation pour cet été correspond au niveau antérieur à la pandémie » affirme-t-on au siège de la compagnie.

La crise sanitaire n’a cependant pas remis en cause les investissements engagés par les acteurs du marché, principalement en matière de décarbonation. Un bon exemple de cette continuité est fourni par la compagnie française Brittany Ferries, un acteur historique du marché espagnol. En avril 2021, celle-ci a confirmé que le Salamanca, propulsé au GNL, assurera en 2022 la liaison entre l’Espagne et le Royaume-Uni. La compagnie pétrolière ibérique Repsol construit actuellement une station de soutage en GNL dans le port de Bilbao.

380 M€ en renouvellement de flotte

En 2023, le Santoña, navire neuf affrété par Brittany auprès du suédois Stena, et également propulsé au GNL, sera exploité sur la même liaison D’une jauge brute de 42 200 tpl, il sera l’un des plus gros navires de la bretonne (215 m de long) avec une capacité d’accueil de 2 714 mètres linéaires pour les véhicules fret et 1 015 passagers (340 cabines). « Nous sommes engagés dans le développement durable et nous parions sur le GNL qui offre des avantages importants en matière d’impact sur l’environnement car il réduit la pollution atmosphérique et les émissions de gaz à effet de serre », a déclaré récemment Roberto Castilla, directeur de Brittany Ferries en Espagne.

Balearia, de son côté, n’est pas en reste. La compagnie a annoncé la mise en service le 1er mai 2021 de l’Eleanor Roosevelt sur la ligne Denia-Ibiza-Palma. Ce nouveau fast-ferry utilisant le GNL s’inscrit dans la stratégie de développement durable mise en œuvre par l’espagnole et présentée comme un atout de différenciation par rapport à la concurrence. Pionnière en Espagne en matière d’engagement en faveur du GNL, la direction de Balearia rappelle que « les investissements ont été maintenus ». Le programme porte sur la remotorisation de six navires de la flotte en faveur d’une propulsion au GNL et sur la commande de trois nouvelles unités, soit un investissement global de 380 M€ pour les six. Le 9e navire doit entrer en service d’ici la fin de l’année.

De nouveaux mouvements

La crise économique est accompagnée de la poursuite de la restructuration du secteur du ro-pax espagnol, dominé par une poignée d’acteurs espagnols, et par l’entrée d’acteurs étrangers. En 2018, le groupe canarien Armas a racheté Trasmediterránea à la barbe de Balearia, coiffé au poteau par une offre financièrement plus attractive pour le vendeur, le groupe Acciona. L’opération semblait très séduisante sur le papier mais le lourd endettement qui en a résulté et la crise économique de 2020 ont forcé le groupe Armas à céder, en avril 2021, l’ensemble de l’activité sur le segment péninsule au groupe italien Grimaldi. Un autre acteur italien, et non des moindres, Grande Navi Veloci (GNV) a décidé de faire son entrée cet été sur le marché péninsule-Baléares avec deux navires et des liaisons depuis Barcelone et Valence.

L’arrivée des Italiens bouleverse la donne sur péninsule-Baléares. Le leader, Balearia, se retrouve face à deux redoutables concurrents. Une redistribution des cartes qui n’est pas pour déplaire aux chargeurs et transitaires. Ils espèrent que cette intensification de la concurrence aura des effets positifs en termes de baisse des coûts de fret et d’amélioration de la qualité du service. Le marché péninsule-Baléares est un « gros morceau » avec un trafic annuel de l’ordre de 16 Mt. Pour Grimaldi, très présent sur le trafic Espagne-Italie, c’est également un élément dans une stratégie visant à créer un réseau en Méditerranée occidentale. « Nous sommes intéressés également par le développement de liaisons entre l’Espagne et l’Afrique du nord » ne cache-t-on pas au siège du groupe, à Naples.

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