Marseille au diapason de la conjoncture

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Il insiste. La continuité de services a fonctionné dans tous les compartiments de la chaîne logistique, certes avec des contraintes opératoires et dans des conditions dégradées, mais « sans aucune défaillance ». Hervé Martel, le président du directoire du Grand port maritime de Marseille (GPMM) fait diversion. Tout opérationnel qu’il ait été, le port phocéen n’a enregistré en moyenne que 18 escales par jour durant le confinement, contre 25 en temps normal.

Fin juin, les trafics marquaient le pas avec un repli de 15 % (33,6 Mt) par rapport à 2019 et de 17 % en EVP (14 % en tonnage) sur l’activité conteneur. Si Marseille limite sa chute, sur ce segment-témoin de son insertion dans l’économie mondiale, par rapport à d’autres ports français bien plus impactés, il part aussi de bien plus bas avec son million et demi de boîtes. Mais, il est vrai, il a connu ces dernières années une croissance plutôt supérieure à ses concurrents européens. Sur ce talon d’Achille des ports français, Hervé Martel reste confiant pour la suite.

Grands écarts dans les trafics

L’ensemble des segments des trafics maritimes sont au diapason de cette moyenne (marchandises diverses également en repli de 17 %), excepté de grands écarts pour l’activité passagers, un sort partagé avec tous les ports concernés par la fermeture des frontières et les mesures de confinement. À ceci près que Marseille reste très exposée à ces trafics, du fait de sa position géographique, face au Maghreb, à la proximité de la Corse, mais surtout de son incroyable ascension dans la croisière. « Sur le semestre, par rapport à 2019, ce sont 59 % de passagers pour les lignes régulières ferries et 84 % de croisiéristes en moins. Sur le Maghreb, c’est l’arrêt total. »

Le roulier patine également. « L’arrêt des ventes de véhicules a provoqué une baisse de 23 % des flux d’imports et d’exports de voitures et a plongé le secteur de l’acier dans la crise, induisant une réduction de 23 % d’importations de vracs destinés à la sidérurgie », indique le dirigeant.

Trafics en sursis

Les vracs solides (– 20 %) sont en effet à la peine. La filière subit les situations des entreprises en sursis. Alteo (spécialiste de l’alumine, en redressement judiciaire) et Arcelor (qui avait annoncé l’arrêt du deuxième haut-fourneau de Fos pour ensuite repousser l’échéance) sont très impactées ou par les guerres commerciales ou par des conditions de marché très dures. Le Covid, avec la mise sous cloche des usines des constructeurs automobiles, n’a pas arrangé les choses. La question est aussi celle de la compétitivité d’Arcelor Mittal quand la reprise sera là. Or, pour Marseille, l’enjeu est grand. Le géant sidérurgique représente environ 10 % des escales et 15 % des tonnages du port.

Le port phocéen retrouve de l’appétence alimentaire: ses trafics agroalimentaires ont été tirés par une « belle campagne céréalière » (+ 21 %), qui a largement profité au terminal céréalier des Tellines et au fluvial (+ 33,7 %). En dépit des chahuts de l’année, grèves de décembre et janvier, crise sanitaire à partir de mars, les céréales françaises ont en effet eu le vent en poupe. Excellents rendements, belle qualité, le blé français a été très demandé. Les silos ont même fait le vide bien avant la fin de la campagne.

Le GNL a fait ses preuves

Dans les vracs liquides – hors hydrocarbures, mis hors-jeu par le double choc de l’offre et de la demande dans tous les ports pétroliers –, les importations et exportations de biocarburants et de GNL ont encore progressé de 2 % depuis janvier. Marseille-Fos est ambitieux à cet égard, espérant se positionner en tant que hub en Méditerranée où les places sont chères et les acteurs déjà bien ancrés, à l’instar du trublion catalan Barcelone. « On a effectué pendant le confinement deux avitaillements en GNL d’un paquebot et les acteurs nous disent que ça marche chez nous mieux que dans les autres ports où ils ont l’habitude d’aller. C’est très positif », se réconforte Hervé Martel.

Le fluvial est en recul sur le semestre de 25,7 %, toutes filières confondues, et de 17,6 %, hors conteneur. Pour rappel, la répartition des parts modales du port phocéen pour le trafic conteneurs est de 7 % pour le fleuve.

Investissements maintenus

La situation financière saine du port phocéen lui permet de recourir à l’emprunt de façon plus significative et ainsi de maintenir les investissements inscrits à son budget de l’année.

« On anticipe une baisse de 20 % du chiffre d’affaires, soit entre 30 et 35 M€ sur 170 M€. Ayant perdu deux mois dans les chantiers, nous envisageons d’investir 57 M€ cette année sur les 70 M€ initialement prévus. Pour cela, on va emprunter 35 M€ [au lieu de 10 à 20 M€ prévus, NDLR]. À l’automne, on ajustera la trajectoire financière pour les années qui viennent. On parle d’investissements importants, notamment sur le ferroviaire, l’électrification à quai, le terminal international pour les passagers de Cap Jamet… Ces opérations sont nécessaires au développement du port et s’inscrivent sur les créneaux d’investissements – transition énergétique – qui sont, à mon avis, plutôt dans l’air du temps en ce moment. »

Trafic

2019: 79 Mt (– 2 %)

1er semestre 2020

36 Mt (– 15 %)

Relance: un effort commercial de 6 M€

Pour accompagner la reprise, le GPMM a annoncé, aux termes du confinement, une première salve de gestes commerciaux, dont certains déjà inscrits dans le Pacte d’engagement pour la relance et la compétitivité de la place portuaire. Ainsi dans le conteneur, « une réduction jusqu’à 50 % des droits de port pendant quatre mois à partir de septembre pour les armateurs qui font confiance au port en maintenant des volumes, des escales, des services. Avec MSC, nous avons un énorme enjeu en raison de la suspension par l’alliance 2M de la ligne Asie. Pour les filières ro-ro, ro-pax et transport de voitures, on maintient la réduction des droits de port de 30 % à partir de septembre et pendant trois mois. »

À ceci s’ajoutent de nouvelles mesures. « Pour les conventions de terminaux soumis à la réalisation de l’objectif fixé, le port de Marseille Fos renonce de manière exceptionnelle à l’application des pénalités, considérant que l’occupant n’est pas responsable du manque de trafic. »

L’ensemble représente une valeur (et un coût pour la communauté portuaire en efforts commerciaux) de 6,5 M€. Le président du directoire du port de Marseille-Fos espère surtout capter quelques subsides des 175 M€ promis par le gouvernement aux ports dans le cadre du plan « France Relance » dévoilé le 3 septembre dernier.

Les professionnels et le GPMM ont défini quelques axes sur lesquels ils font plancher en priorité au cours des prochains mois: « améliorer la fluidité du passage portuaire, renforcer l’information client, valoriser les efforts en matière d’environnement et travailler sur la sécurité et la sûreté ». Sept groupes de travail ont été constitués à cet effet. La spécialiste des Port Community System (PCS) MGI, nouvellement associée à cet effort, offre aux importateurs et exportateurs la gratuité de l’adhésion au CCS Ci5 jusqu’à la fin de l’année. Pour le président de l’UMF, deux sujets sont « vitaux pour l’avenir de la place »: le contournement ferroviaire de Lyon par le sud et la réalisation du barreau routier Fos-Salon.

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