Le Grand port maritime de Dunkerque (GPMD) a connu, selon le président de l’Union maritime et commerciale Hervé Gauducheau, « un premier trimestre trouble, une partie du port ayant été affectée par les mouvements sociaux du début de l’année et l’autre pas. » Schématiquement, tous les quais situés derrière écluse, au port Est, ont été impactés par les grèves des ouvriers portuaires, même si le mouvement social était moins suivi à Dunkerque qu’ailleurs. L’activité la plus touchée a été la réparation navale, ce qui a un impact réduit sur le tonnage mais marqué sur l’activité économique et l’emploi. Les terminaux auxquels les navires parviennent sans franchir d’écluses, conteneurs et vrac du port Ouest, ont en revanche été peu affaiblis. Les terminaux méthaniers ont surtout été entravés par les opérateurs du remorquage.
Malgré les grèves, le tonnage cumulé du Grand port maritime avait encore, fin février 2020, une légère avance sur celui constaté en 2019, qui était pourtant une bonne année. Une partie des trafics des autres ports, en prise aux mouvements sociaux, s’est en effet replié sur celui du Nord, en particulier pour les conteneurs.
Le transbordement sanctionné
La tendance ne s’est brutalement inversée qu’en avril, à partir du moment où le confinement en Chine s’est matérialisé par une baisse des cargaisons et notamment du conteneur, retrace Hervé Gauducheau, par ailleurs président de la station de pilotage. « La route était tracée pour les mois suivants », plante-t-il.
Mai et juin ont donc été les principaux mois déficitaires, par rapport à 2019, pour les conteneurs. Du 1er janvier au 30 juin, le terminal des Flandres a manutentionné 219 000 EVP, soit un recul de 4 % par rapport au premier semestre 2019. Cette légère baisse est principalement liée aux volumes de transbordement, en chute de 10 %, alors que, dans le même temps, le trafic destiné à Dunkerque et son hinterland (167 000 EVP) n’a reculé que de 2 %, « baisse entièrement imputable à l’export » selon le directeur général du terminal à conteneurs, Marc Riondel, qui précise: « À fin juillet, le tonnage cumulé de 2020 est équivalent à celui de 2019. Le léger retard est rattrapé, même si nous avons perdu sur le transbordement, qui n’est pas l’activité la plus importante pour nous. »
Pour le professionnel, le terminal des Flandres résiste bien « car de plus en plus de chargeurs français voient Dunkerque comme une solution fiable et moins distante que les ports belges ». Les trafics de produits alimentaires et les importations des Antilles et d’Amérique du Sud ont été les plus résilients. « Pour les trafics Asie-Europe, l’export s’en sort moins bien que l’import. Le shortsea, en revanche, a très mal vécu le Covid, avec des suppressions d’escales », poursuit Marc Riondel.
L’investissement du terminal des Flandres dans de nouveaux portiques, livrés en avril 2020, aurait eu de surcroît pour effet d’accélérer les escales, veulent croire ses promoteurs.
Arcelor Mittal a plombé
À Dunkerque, comme à Marseille, les hauts-fourneaux d’Arcelor-Mittal, qui constituent le principal trafic du port, ont pris de plein fouet les effets de la crise du Covid, plombés, entre autres, par l’arrêt de la demande du côté de l’industrie automobile. Sur le site industriel, depuis mars, seul fonctionnait le haut-fourneau numéro 4, le plus puissant des trois. Cela se traduit par une division par deux des tonnages portuaires, pour l’importation de minerais comme pour l’exportation de produits finis. Suite à une réorganisation interne au groupe Arcelor-Mittal, la reprise du haut-fourneau numéro 3, le plus petit, est intervenue mi-août. Le site dunkerquois devrait ainsi tourner aux deux-tiers de sa capacité. Le sidérurgiste n’envisage pas de reprise d’activité pour son troisième haut-fourneau avant 2021. Les difficultés du géant de l’acier ont emmené dans sa déroute une sous-traitance importante, que le dispositif de chômage partiel a permis de maintenir sous perfusion.
« D’autres activités se développent », reconnaît Hervé Gauducheau, « comme la réparation navale, ou encore de petits vracs comme le ciment ou le clinker, mais ces trafics sont volatils. La reprise des trafics liés à Arcelor-Mittal, qui dépendra du marché automobile, est la clef pour l’augmentation des tonnages comme des droits de port à Dunkerque. »
Des nuages s’amoncellent
Malgré la crise sanitaire, le terminal gazier a bien fonctionné. Des travaux ont d’ailleurs été menés cet été pour permettre aux navires avitailleurs comme aux camions de venir s’y approvisionner en GNL. Du côté des ferries, le fret a, comme ailleurs, permis de maintenir un semblant de vie sur les terminaux, mais pour Hervé Gauducheau, Dunkerque ne peut pas en vivre, d’autant que le port « va devoir affronter bientôt les répercussions du Brexit. Les efforts de DFDS pour maintenir les rotations sans les passagers payent, mais le modèle économique ne se satisfait pas des seuls camions. Le trafic passagers doit reprendre rapidement. »
Enfin, comme pour tous les ports français orientés vers les exportations de céréales, la campagne 2019-2020 a été très positive, s’inscrivant comme la troisième en tonnage depuis la création du terminal céréalier du GPMD. Celle en cours, commencée au 1er juillet 2020, s’annonce en revanche plus difficile.
L’extension du quai dédié aux céréales reste au menu du projet stratégique que la direction portuaire doit valider avant la fin de l’année. Le programme ne devrait pas être fondamentalement revu à l’aune de la crise majeure qu’est le Covid.
Plusieurs projets d’implantation sont en cours dans le périmètre du Grand port maritime, comme celui de l’acteur belge de l’agroalimentaire Clarebout pour une usine de frites ou dans la chimie avec l’usine Indachlor qui doit bientôt être mise en service par Indaver, un autre groupe industriel belge.
Trafic
2019: 53 Mt (+ 3 %)
1er semestre 2020
37,5 Mt (– 19 %)