Le déploiement de l’éolien au large des côtes françaises a pris un énorme retard. Quelles en sont les raisons?
Mathieu Monnier: Sur les trois appels d’offres attribués, deux ont pris un retard significatif car le cadre réglementaire a été modifié en cours de route. Ils ont en outre essuyé des recours contentieux systématiques. L’incertitude juridique est désormais levée pour le champ de Saint-Nazaire, où les travaux ont commencé, ainsi que pour Fécamp et Courseulles-sur-Mer, pour lesquels les consortiums préparent le financement. Les choses sont moins avancées pour Saint-Brieuc: des recours ont été déposés suite aux modifications successives des projets, Areva ayant quitté le projet suite au rapprochement de Gamesa avec Siemens. Pour Yeu-Noirmoutier et Le Tréport, les premiers recours ont été rejetés, mais il n’y a pas encore de décision de justice. Ils ne seront vraisemblablement pas mis en service avant 2024.
Où en sont les quatre projets éoliens flottants prévus en Bretagne et en Méditerranée* ?
M.M.: Ils doivent valider les hypothèses techniques, environnementales et commerciales de l’éolien en mer flottant, avec des puissances de 24 à 30 MW. Au-delà de ces pilotes, la programmation pluriannuelle de l’énergie prévoit des appels d’offres pour de nouveaux champs, à raison d’1 GW par an. Les zones doivent encore être affinées. Les premiers sont au large de la Normandie en 2020, de la Bretagne et d’Oléron en 2021 et en Méditerranée en 2022.
Pour la construction et l’installation, les ports sont sollicités pour servir de bases arrière. Sont-ils prêts?
M.M.: Pour répondre aux deux premiers appels d’offres, des pôles industriels ont été constitués pour la construction d’éoliennes à Saint-Nazaire, à Cherbourg et au Havre. Ces hubs sont positionnés de façon intelligente et bien conçus pour l’exportation. Pour l’éolien flottant, des investissements conséquents vont être nécessaires. Quand pour les éoliennes posées, la majorité des travaux se fait en mer, tout est réalisé à terre pour l’éolien flottant. Comme cela a été le cas pour le prototype installé au large du Croisic, qui reste à ce jour la seule éolienne en activité au large des côtes françaises. Le terminal EMR de Brest a été conçu pour l’éolien flottant en mer et sera sans doute utilisé pour l’installation du champ au large de Saint-Brieuc. À Marseille-Fos et à Port-la-Nouvelle, la question de la mise à niveau des installations portuaires se posera quand il s’agira non plus des projets pilotes mais du développement des fermes éoliennes commerciales.
* En Bretagne, elles seront prévues pour être installées entre Groix et Belle-Île et, en Méditerranée, au large de Barcarès, Gruissan et Faraman.