Dans un « exposé de position » de seize pages, publié en ce mois de novembre, l’Organisation des ports maritimes européens (Espo) et la Fédération européenne des ports intérieurs (Fepi) appellent en particulier à renforcer le lien entre réseaux ferrés portuaires et nationaux. « Des liaisons ferroviaires efficaces dépassant les frontières locales et nationales sont essentielles pour les ports européens, estiment-elles. Pour exploiter pleinement le potentiel du fret ferroviaire international et proposer une alternative compétitive à la route, il est nécessaire de déployer des efforts considérables pour éliminer les obstacles techniques, opérationnels et réglementaires au transport transfrontalier. »
Après des années passées à élaborer une nouvelle réglementation européenne en matière de transport ferroviaire, qui ont abouti à l’adoption successive de quatre « paquets ferroviaires » entre 2001 et 2016, l’attention, selon la Fepi et l’Espo, est maintenant portée sur la mise en œuvre de la cette politique ferroviaire européenne, plutôt conçue pour s’appliquer aux systèmes ferroviaires nationaux. Elle doit tenir compte de la diversité des situations d’un port à l’autre, mais aussi s’appliquer de façon équitable dans les différents pays.
« La mise en place de systèmes ferroviaires dans les ports européens varie considérablement en termes de développement et de gestion d’infrastructure, d’exploitation ferroviaire, de systèmes de tarification et de relations contractuelles entre l’autorité portuaire et les opérateurs ou entreprises ferroviaires, soulignent l’Espo et la Fepi. Il est essentiel que les organismes de réglementation nationaux se mettent d’accord sur l’application de la réglementation ferroviaire de l’UE dans les ports. Cela ne devrait toutefois pas conduire à la prescription d’un système unique pour la gestion des réseaux ferrés portuaires. »
Tarification libre
Les organisations rappellent le rôle essentiel que jouent les ports dans le report modal, ce qui est vrai tant pour les ports maritimes, en tant qu’extrémités terrestres du Réseau transeuropéen de transport, que pour les ports intérieurs qui constituent des nœuds modaux au cœur du continent. À l’instar du principe institué par le règlement sur les services portuaires de 2017, qui prévoit la liberté du choix des redevances portuaires, elles souhaitent que la tarification de l’utilisation du réseau ferré portuaire puisse aussi être choisi librement par leurs gestionnaires, afin de favoriser le report modal.
Les représentants des ports européens exposent encore d’autres souhaits quant aux orientations de la politique européenne des transports. Tout d’abord la connexion ferroviaire du dernier kilomètre, qui relie chaque terminal portuaire au réseau ferré national, qu’ils veulent voir privilégiée dans la prochaine version du Mécanisme pour l’interconnexion en Europe (MIE 2) et dans les futurs appels à propositions.
En effet, les 104 ports maritimes du réseau central et les 225 du réseau global sont tous connectés au réseau ferroviaire, comme le prévoit le règlement RTE-T de 2013. Mais « des améliorations majeures restent nécessaires pour assurer un transport ferroviaire efficace et durable dans l’arrière-pays », notent l’Espo et la Fepi, qui rappellent que ce règlement « impose aux États membres de veiller à ce que les ports intérieurs soient connectés aux infrastructures routières et ferroviaires. Certains manquent toujours de connexions ferroviaires en raison du manque d’investissement, du désintérêt politique ou d’autres problèmes locaux. »
Report modal faible
Les organisations portuaires soulignent les efforts des ports eux-mêmes pour améliorer la part modale du rail, mais ne peuvent que constater que les objectifs fixés en 2011 par la Commission européenne dans son Livre blanc sur les transports sont loin d’être atteints : « Il définit l’objectif de transférer 30 % du transport routier de marchandises au-delà de 300 km vers d’autres modes tels que le transport ferroviaire ou le transport par voie d’eau d’ici 2030, et plus de 50 % d’ici 2050. La répartition modale actuelle est de 17,4 % pour le transport ferroviaire et 6,2 % pour les voies de navigation intérieure (chiffre 2016, NDLR) », relèvent-elles. Les ports maritimes et intérieurs européens estiment que l’accent mis sur le transport longue distance est insuffisant. Quant aux distances inférieures à 300 km, « les transports de marchandises entrant ou sortant de ports européens par chemin de fer ou par barge sont un moyen important de réduire la congestion et peuvent jouer un rôle essentiel dans la logistique du fret urbain ». Des efforts sont donc encore possibles, dans la desserte intérieure des ports, pour contribuer à l’objectif fixé de neutralité carbone à l’horizon 2050.