Clément Mousset, directeur général de CMV France : « Nous voulons revenir à la croisière telle qu’elle se pratiquait jusqu’à l’arrêt du France »

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Lancer une compagnie de croisière en France serait donc encore envisageable. Quelle est votre analyse du marché français de la croisière pour vous lancer dans cette entreprise qui n’est pas sans risques ?

Clément Mousset : La France a vécu un vrai traumatisme avec la fin du paquebot France en 1974. À ce moment précis, la croisière a cessé d’exister dans l’esprit des Français. Dans les années qui ont suivi, une seule compagnie existait, les croisières Paquet, qui disposait d’un navire datant des années cinquante, Le Mermoz. Il y a eu des tentatives du Club Méditerranée avec leClub Med 1 et le Club Med 2, des goélettes à cinq-mâts construites par les chantiers navals du Havre et mises en services respectivement en 1988 et 1992, mais qui avaient des coûts d’exploitation handicapants. In fine, la croisière ne s’est développée en France qu’à partir des années 2000 pour connaître ensuite une croissance régulière de 10 à 11 % par an. En 2010, la médiatisation de la croisière a aidé ce segment, mais sans que les compagnies ne développent véritablement d’identité française. Croisières de France, qui a fait faillite il y a trois ans, est symptomatique de cette tendance : des compagnies internationales débarquant en France avec un modèle économique à dupliquer, des velléités de conquérir le marché sans se donner du temps. Or le marché français est extrêmement particulier. Pour le vendre, il faut d’abord bien le connaître.

Comment comptez-vous vous positionner ?

C.M. : Nous voulons revenir au type de croisière qui se pratiquait jusqu’à l’arrêt du paquebot France. Nous voulons reprendre les fondamentaux de ce qui se faisait dans les années 1970. Aujourd’hui, malheureusement, le navire a pris le pas sur la destination. C’est lui qui dicte les choix. Les croisiéristes américains ne descendent même plus du paquebot lors des escales. Nous, on prend le parti inverse.

Lorsque la croisière s’est développée en France dans les années 2000, les compagnies ont débarqué avec des navires à la capacité d’accueil de 3 500 passagers. Si bien qu’entre les années 70 et 2000, les Français n’ont pas connu de périodes intermédiaires. Une large partie de la clientèle potentielle s’est coupée de cet univers à ce moment-là. C’est aussi pour cette raison que CMV France se positionne avec un navire de 550 passagers pour minimiser les risques mais, aussi et surtout pour offrir une qualité de services en accordant particulièrement une grande importance à la gastronomie et avec un équipage francophone. C’est primordial pour nous. Nous voulons que le Jules Verne soit l’ambassadeur de la France sur les mers du globe.

Les rares compagnies françaises de croisière, à l’image de Ponant, insistent aussi sur cet aspect. Pourquoi est-ce si important de proposer une formule 100 % francophone ?

C.M. : Comment l’Allemagne est-elle devenue numéro un de la croisière en Europe ? Pourquoi l’Angleterre l’a été si longtemps ? Quelles sont les raisons du succès de l’Italie, gros marché pour cette industrie ? Tous ces pays ont encore des compagnies dites nationales. En France, elles ont déserté. On espère d’ailleurs créer un mouvement et être suivis par d’autres. Ce qui fait défaut aujourd’hui à la France n’est pas la demande mais l’offre. Lorsque Croisières de France a disparu, le nombre de croisiéristes en France s’est effondré. La clientèle intéressée par cette offre s’est retrouvée orpheline. Et contrairement à ce que l’on persiste à penser et à affirmer, les Français aiment voyager ensemble !

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