En choisissant THE Alliance en septembre, le mercato de l’année a touché à sa fin. Jae-hoon Bae, nouveau patron de HMM depuis avril, aura déjoué toutes les spéculations. On le savait certes en froid avec 2M, alliance dont il est partenaire depuis avril 2017 mais sans être membre à part entière. On lui prêtait des intentions d’intérêts à l’égard de Ocean Alliance. C’est finalement avec les 5e, 6e, et 8e transporteurs mondiaux, Hapag-Lloyd, One et Yang Ming, qu’il a signé en juin.
Le Sud-coréen apporte dans la corbeille 61 navires et une capacité conteneurisée de 374 000 EVP. Mais avec ses 20 navires en commande, dont 12 de 20 000 EVP, attendus pour le 2e trimestre 2020, et 8 de 14 000 EVP livrables un an plus tard, il totalisera à horizon 2021, près de 800 000 EVP. Ensemble, ils pèseront 18,6 % de la capacité conteneurisée mondiale avec 4,3 MEVP et une flotte de 615 navires. Avec les 81 unités en commandes qui apporteront 608 000 EVP, l’alliance améliore son positionnement.
2M reste leader avec 32,9 % de parts de marché et 7,9 MEVP de capacité, mais ses 37 navires en commande lui fourniront « seulement » 383 000 EVP.
Gains et pertes et vice versa
Il est difficile d’évaluer exactement l’incidence du départ de HMM pour l’alliance 2M, si ce n’est un affaiblissement des deux transporteurs dans le Pacifique et la restitution de six navires que HMM leur affrétait. Il est en revanche plus aisé d’estimer le gain pour ses nouveaux partenaires. La première qualité de HMM à leurs yeux est la force d’appoint que vont représenter les nouvelles unités (dont certaines au GNL) sur la route Asie-Europe du Nord.
Avec ces achats subventionnés par l’État coréen (dans le cadre d’un plan de relance de la marine marchande en Corée, HMM a reçu un chèque de 706 M$), HMM aura des slots à revendre à ses partenaires et ce, pour un prix relativement bas.
Sans préjuger des chartes-parties entre les nouveaux partenaires, les nouvelles capacités apportées par HMM devraient être déployées, croit savoir Alphaliner, sur la ligne Asie-Europe du Nord à partir du deuxième trimestre 2020 (12 navires de 23 000 EVP), sur la ligne Asie-Méditerranée ou Asie-côte Est américaine (10 de 13 000 EVP, trois sont affrétés actuellement à 2M), sur la route Asie-Pacifique (6 de 10 000 EVP, actuellement tous loués à 2M) et sur la route Asie-Pacifique Nord-Ouest (8 de 8 600 EVP). Soit au total 34 navires d’une capacité totale de 519 000 EVP en 2020.
HMM, qui accumule les trimestres de pertes en dépit des chèques en blanc signés par l’État coréen, a entrepris de faire le ménage dans ses lignes déficitaires, estimées à 16 (sur 47) selon les analystes, pour donner des gages à ses créanciers.
La suite de l’histoire reste cependant à écrire: Bruxelles doit se prononcer prochainement sur le renouvellement de l’exemption aux règles de la concurrence dont bénéficient jusqu’en 2020 les armateurs réunis en consortiums ou alliances.
L’exécutif européen ne pourra pas faire abstraction du poids que ces alliances ont pris en quelques années ni des effets de la consolidation désormais ancrée. La part de marché combinée des 10 principales compagnies de transport maritime de conteneurs est passée de 68 à 90 % entre 2014 et 2019. La capacité déployée a grimpé dans le même temps de 55 à 96 MEVP sur les trois grands axes de transport de conteneurs Est-Ouest.
« Les autorités nationales de la concurrence, les régulateurs et les autorités portuaires devraient surveiller attentivement les marchés et évaluer les autres options possibles lors de l’octroi de concessions de terminaux à conteneurs à des opérateurs privés, en tenant compte de l’intégration verticale et horizontale des marchés », indique la Cnuced dans sa dernière Review of Maritime Transport. Une inquiétude manifeste quant à l’extension de leur zone d’influence.