« L’embranchement à quai, c’est un peu comme la patate chaude que l’on se repasse. Les armateurs expliquent qu’ils n’équipent pas leurs bateaux parce qu’il n’y a pas suffisamment de prises à terre. À l’inverse, les autorités portuaires considèrent qu’il y a trop peu de bateaux intéressés et que, dans ce cas, ils ne sont pas prêts à des investissements élevés », explique Sönke Hoffmann, secrétaire général du bureau brêmois de l’ONG environnementale NABU.
Cette situation extrême se vérifie en effet à Brême, où l’exploitant Bremenports a choisi de ne rien faire: « Nous proposons des embranchements pour le fluvial mais pas pour la flotte maritime », expliquait récemment à la télévision régionale le directeur du Bremenports Robert Howe: « La bonne approche est d’abord de responsabiliser le pollueur, c’est-à-dire l’armateur. À lui d’agir en premier lieu. Il faut aussi savoir que les besoins journaliers en électricité de plusieurs paquebots et porte-conteneurs nécessiteraient la construction d’une petite centrale électrique, soit des centaines de millions d’euros d’investissements », ajoutait le dirigeant, dont la société s’est pour l’instant contentée de lancer une étude sur les besoins en énergie du port de demain.
Bronca des élus
À Hambourg, en revanche, l’embranchement est déjà réalité. À Altona, une prise terrestre conçue pour les gros paquebots est en action depuis 2016, mais pour… un seul bateau, l’AidaSol, l’un des rares à être équipés pour une telle connexion. Pourtant, le branchement est problématique. En 2018, le paquebot de la filiale allemande de la compagnie italienne Costa Croisière (groupe Carnival) est venu se brancher 20 fois. Mais parfois moins de 2h30! La raison est à chercher du côté de l’Agence fédérale des réseaux, qui pilote les flux et prix d’électricité dans le pays et qui a réorganisé les plages tarifaires de telle sorte que pour l’AidaSol, le courant du secteur est souvent beaucoup trop cher. Après la bronca des élus locaux, le ministère fédéral de l’économie a finalement annoncé, en mai dernier, une réduction de 20 % d’une partie des taxes qui pèsent sur le courant.
Le premier port allemand mise aussi sur les unités GNL mobiles pour approvisionner les moteurs du futur et fournir de l’électricité. En collaboration avec Aida Cruises, la société Becker Marine Systems a construit en 2016 une barge GNL baptisée « Hummel » (« le bourdon ») et qui intervient sur l’AidaNova pour l’approvisionner en électricité et GNL. En revanche, le projet PowerPacs, aussi de Becker, vient de connaître un sérieux revers. De la taille d’un conteneur et facilement transportable par grue sur bateau, il devait produire de l’électricité à partir du GNL. Le problème est que l’acheteur n° 1, la ville de Hambourg, a décidé de suspendre l’achat prévu de 8 unités. La raison: trop peu de navires sont actuellement équipés de prises adéquates!
Hormis une unité de 640 Kwh installée par Siemens à Cuxhaven, d’autres projets sont à venir. Hambourg prévoit des embranchements pour porte-conteneurs aux terminaux Eurogate et Altenwerder. Plus au nord, le port de Kiel en prévoit deux, l’un pour l’armateur norvégien Color Line, l’autre pour son terminal croisière.