Dragage du port, balisage du chenal d’accès, aménagement des quais… Les travaux réalisés sur le port de Jarry lors du précédent projet stratégique ont permis de poser l’ambition de La Guadeloupe et déjà permis de développer son activité comme hub de transbordement. L’ambition d’être un port qui compte dans la région est intacte et trouve un nouveau ressort dans le nouveau projet stratégique. Pour « être une référence à l’échelle internationale », Guadeloupe Port-Caraïbes compte améliorer la compétitivité de son offre de services, accompagner la transition environnementale grâce à des solutions inspirées de la nature. Et en s’appuyant sur la croisière et le nautisme, elle vise les 200 M€ de retombées pour l’économie du tourisme dans l’archipel d’ici 2023.
Un diagnostic de ses forces et ses faiblesses, réalisé à la demande de la direction portuaire l’a confortée dans certains de ses points forts, à commencer par la position stratégique que l’infrastructure occupe sur les liaisons Amériques, Europe et Asie – un flux de marchandises captifs – ainsi que le fort potentiel dont elle dispose pour développer le tourisme et le nautisme. Au rang de ses faiblesses, qu’elle n’ignorait sans doute pas, figure toujours le déséquilibre de ses trafics au profit des importations. L’étude a mis par ailleurs en valeur la fragilité des trafics de transbordement ainsi que les contraintes spatiales fortes qui génèrent des conflits d’usage de son foncier alors que certaines infrastructures, pour la croisière notamment, parviennent à saturation.
À l’écart du corridor Panama-États-Unis
L’heure est donc à renforcer les premières et à corriger les secondes. Le GPM entend augmenter les capacités de traitement des porte-conteneurs, développer l’activité roulier, faire émerger de nouvelles filières économiques liées notamment à l’énergie, la biomasse, le stockage des déchets… et consolider l’activité croisière (cf. ci-contre). A cet égard, l’accueil d’un quatrième paquebot en tête de ligne, l’augmentation du nombre d’escales sur l’ensemble des sites portuaires et la structuration de l’offre touristique font partie de son programme. Enfin, des aménagements préparatoires sont programmés à Karukera Bay. Ils porteront sur l’interface ville-port et les quais 7 et 8. Quant à la filière nautique, une nouvelle zone de construction et de réparation navale va voir le jour.
Pour le transbordement, les ambitions de La Guadeloupe se heurtent à quelques réalités géographiques. L’île est éloignée du corridor entre Panama et États-Unis et, de ce fait, ne peut pas vraiment profiter de la manne attendue après l’aménagement de la troisième écluse du canal de Panama. De plus, les navires déployés sur les lignes Asie-côte Est des États-Unis affichent des jauges de 10 000 EVP et plus, disqualifiant les ports antillais aux capacités d’accueil limitées.
En revanche, Pointe-à-Pitre vise le transbordement pour les petites îles des Antilles. Il estime ce marché entre 500 000 et 600 000 EVP. Il cible aussi le trafic de transbordement de denrées périssables en provenance de l’Amérique du sud et à destination de l’Amérique du Nord et de l’Europe. La Guadeloupe capte déjà les trafics des Guyanes et du Surinam à destination de l’Europe, ce qui place son port en bonne position pour un projet de massification de ces trafics.
Sur ce plan, il devra compter avec Port-d’Espagne (Trinité-et-Tobago), qui occupe le marché mais pâtit d’une réputation alimentée par de fréquents mouvements sociaux et une médiocre productivité. Il faudra aussi composer avec Fort-de-France, également capable d’assurer le transbordement des conteneurs. Et le département d’Outre-mer n’est pas non plus le seul à avoir de telles ambitions. Antigua a également un projet de hub de transbordement, qui a bénéficié en outre d’investissements chinois portant sur 90 M€. Et par ailleurs, le Costa Rica connaît une accélération de la conteneurisation de ses fruits et légumes qui pourrait amener à une redistribution des cartes du transbordement dans les Antilles.
Le souhait de La Guadeloupe d’occuper le terrain du transbordement reste subordonné au bon vouloir des principaux armements, CMA-CGM, Hapag-Lloyd, Hamburg Süd. « L’opportunité du transbordement est soumise à plusieurs incertitudes, principalement liées à la stratégie de ces armateurs », explique l’autorité portuaire.