Cet été, les cheminées des navires à la tête de Maure rouge vif crachaient encore un épais panache de fumées noires, à l’exception du Vizzavona. Ce ferry affrété pour cinq ans est la seule unité à posséder un scrubber. Pour autant, la compagnie ajaccienne intervient de la quille à la pomme du mât pour contrôler la pollution de ses navires. Sous la pression des riverains et des associations environnementales, la compagnie s’attèle à connecter ses navires au courant de quai afin de couper les moteurs en escale. « Le Paglia Orba sera connecté au courant de quai avant la fin de l’année, puis ce sera au tour du Pascal Paoli début janvier, du Jean Nicoli en février, au fur et à mesure de leurs passage en arrêt technique », promet le directeur de la compagnie Pierre-Antoine Villanova. Cependant, la connexion du Paglia Orba à Marseille, prévue en mai, a été maintes fois retardée en raison des bisbilles autour de la potence du quai du Maroc. Tout le monde le sait, sur la desserte de la Corse, l’électricité est à terre et surtout dans l’air… entre Corsica Linea et la Méridionale.
« Gilles Siméoni [président de la collectivité de Corse, NDLR] va pousser les investissements dans le courant de quai en Corse, en retard d’un an et demi comparé à Marseille. On peut raisonnablement penser bénéficier d’un raccordement terrestre en 2021-2022 à Ajaccio », précise Pierre-Antoine Villanova.
Scrubbers en attendant
Avec un horizon éclairci quant à la desserte des ports de la Corse, la compagnie a entraîné les banques dans son sillage. Rompant la torpeur estivale, elle annonçait la commande pour 140 M€ d’un ferry au GNL à l’italien Visentini. Ce navire de 206 m de long pourra transporter 650 passagers, 150 véhicules et des remorques sur 2 500 mètres linéaires. Ce navire « IMO compatible » rejoindra la flotte en 2022, soit deux ans après les nouvelles règles sur le plafond de soufre. « Nous équipons nos navires de scrubbers d’ici la fin 2020, c’est la seule solution disponible pour notre flotte actuelle », explique Pascal Trojani, président de Corsica Linea. Seul le cargo-mixte Vizzavona, affrété pour cinq ans avec option d’achat auprès de Grimaldi Lines, est équipé d’un système de lavage de fumées.
Les établissements bancaires, qui financent à 80 % la nouvelle construction, pourraient également la suivre pour une deuxième unité. « Nous finalisons l’accord avec le port de Marseille pour l’avitaillement du navire par camion pour commencer et à terme par barge », complète Pascal Trojani. Selon lui, les armateurs ont obligation d’investir dans des navires propres pour respecter la réglementation, mais surtout pour répondre à une attente des passagers. « Le risque étant d’être blacklisté », prévient-il.
La prise de conscience environnementale a débuté en réalité en 2006 avec les premières peintures au silicone sur la coque du Jean Nicoli, à la veille de la privatisation de la SNCM. Ce navire a par la suite bénéficié de nouvelles hélices « taillées » pour réduire sa consommation de carburant. D’ailleurs, à cet égard, la société corse a contractualisé avec Eniram, une filiale du groupe finlandais Wärtsilä, pour le pilotage de sa consommation.