Que représente pour vous le projet chinois?
Ignazio Messina: L’Italie a actuellement la possibilité d’opérer des choix stratégiques essentiels pour son avenir et nous ne pouvons pas passer à côté d’une telle occasion. L’Italie est le 5e partenaire commercial de la Chine et l’un des premiers bénéficiaires des investissements chinois à l’étranger. Les dix accords bilatéraux signés entre nos deux pays et les 19 accords gouvernementaux qui viennent d’être actés représentent une valeur de 20 Md€. Certains accords sont importants.
Je pense particulièrement à l’accord de coopération entre les ports de l’Adriatique (la partie italienne) et China Communications Construction Company (CCCC). Je pense aussi à l’accord entre le commissaire extraordinaire à la reconstruction du pont de Gênes et toujours le groupe CCCC. Pour le port de Gênes, et plus largement pour la ville, les investissements chinois représentent une grande opportunité compte tenu des capitaux dont dispose Pékin mais aussi en raison de la position géographique de notre ville, porte du Sud de l’Europe.
Les routes de la soie vont-elles exiger de nouveaux investissements?
IM: Nous avons des spécialistes des infrastructures en Italie capables de s’atteler à des grands projets. Tel le brise-lame du port de Gênes, qui va permettre de faire passer des navires de grande dimension dans le bassin de Sampierdarena et de développer ultérieurement le trafic maritime portuaire. Malgré nos faiblesses, l’Italie est capable de s’imposer sans subir. Elle est aussi en mesure de gérer le risque de « colonisation » comme cela a été le cas dans certains pays du continent africain. Nos responsables politiques vont devoir être suffisamment forts pour défendre, le cas échéant, les intérêts des ports et les infrastructures. Si ces conditions sont respectées, les routes de la soie représenteront alors une belle opportunité pour la péninsule.
Quelle forme de concurrence avez-vous sur ces routes?
IM: Les grandes compagnies maritimes et les sociétés logistiques, qui œuvrent sur les routes et dans les pays où nous sommes présents au quotidien depuis presque 100 ans! Nous avons quelques problématiques dans certains pays bordant la mer Rouge et en Afrique orientale et ce, pour deux raisons: la Chine « oblige et engage » les pays dans lesquels elle investit à tisser des relations commerciales essentielles avec elle au détriment du reste du monde et par conséquent aussi de l’Italie. La qualité des infrastructures dans ces deux régions pose problème en termes de qualité et d’utilité. Je pense notamment aux lignes ferroviaires à voie unique, reliant Djibouti à Addis Abeba et Mombasa à Nairobi, ce qui ralentit le trafic.