L’Italie et les routes de la soie, concrètement?

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Les Chinois sont avertis. Les ports de Trieste et de Gênes ne deviendront pas des colonies de l’Empire du Milieu. « Personne ne peut devenir majoritaire dans les ports de Gênes et Savone, notre législation ne le permet pas », plante le président du site portuaire génois, Paolo Emilio Signorini. Des propos qui trouvent un certain écho chez Zeno D’Agostino, son homologue de la place portuaire de Trieste. Depuis la signature en mars dernier des accords entre Rome et Pékin, dans le cadre des nouvelles routes de la soie, certains opérateurs craignent d’être rapidement accommodés à la sauce pékinoise. « La Chine étant un partenaire puissant, nous devons rapidement délimiter les confins de l’alliance pour sauvegarder au mieux nos intérêts. Exceptée l’augmentation certaine des échanges commerciaux, elle doit nous permettre de renforcer les flux des investissements chinois », affirme pour sa part Alberto Banchero, président des agents maritimes à Gênes.

Entre 2017 et 2018, les exportations italiennes vers l’Empire du Milieu ont baissé de 2,4 % et n’ont pas dépassé 13 Md€ en 2018 quand les importations ont augmenté de 8,2 %, à 30,8 Md€. La Chine aurait investi quelque 14 Md€ en Italie.

Le message est clair: il va falloir jouer serrer pour profiter au mieux de l’opportunité que représentent les nouvelles routes pour le développement à long terme des activités portuaires italiennes, en établissant des conditions de parité, de façon à éviter de tomber sous le joug de Pékin. Une opération à priori compliquée, les entrepreneurs chinois n’étant pas connus pour leur sens de la circulation dans les deux sens.

Renforcer le rail

Si les grandes lignes ont été présentées, les opérateurs sont encore discrets sur les détails qui feront demain les grandes rivières. À peine sait-on que l’accord avec Gênes cible la relance du port, en difficultés depuis l’effondrement du pont Morandi le 14 août dernier. Il est notamment question de la construction d’une grande digue qui devrait élargir le bassin portuaire de façon à accueillir des navires de grande taille et d’un terminal à conteneurs, en collaboration avec le conglomérat chinois de travaux publics China Communications Construction Company (CCCC), dont les différentes filiales sont actives en Afrique dans l’ensemble des infrastructures (ports, routes, voies ferrées).

À Trieste, autre principal bénéficiaire du pacte italo-chinois, un accord pour renforcer le réseau ferroviaire portuaire en collaboration avec le gestionnaire italien RFI a été signé (cf. notre entretien avec Zeno D’Agostino). Le port veut aussi s’insérer dans le projet de construction et de gestion d’un immense terminal intermodal construit également par CCCC à Košice en Slovaquie.

Une collaboration dans le domaine de la logistique afin de fluidifier les flux de la péninsule vers l’Empire du Milieu est aussi mentionnée. « L’autorité portuaire est prête à aider les entreprises italiennes qui veulent développer des plateformes logistiques et portuaires en Chine pour augmenter les volumes des flux commerciaux », confie Zeno D’Agostino. à Gênes, l’association Confassociazioni Liguria (émanation locale de Confassociazioni Italia, fédération de 425 associations professionnelles, 750 000 travailleurs indépendants et 136 000 entreprises) veut réunir régulièrement entreprises et professionnels de secteur pour examiner les différents projets d’investissements et définir les possibilités en matière de coopération industrielle et financière. En somme, à aider chacun à « faire son marché »…

Alors que les entrepreneurs et les opérateurs génois multiplient les déclarations sur la nécessité de préserver l’indépendance de la cité natale de Christophe Colomb, et que Zeno D’Agostino multiplie les allers-retours en Chine, Pékin a déjà lancé un ballon d’essai à Vado Ligure, avec la construction d’un nouveau terminal à conteneurs.

Vado, point de chute

L’inauguration est prévue pour décembre. Si tout se passe bien. Le capital social du terminal, géré par APM Terminals, se répartira entre Maersk (50,1 %), Cosco Shipping Ports (40 %), qui s’est déjà offert le port du Pirée il y a quelques années (et dont l’activité a été multipliée par cinq depuis) et Qingdao Port International (9,9 %), propriétaire du port chinois situé dans la péninsule du Shandong à l’Est de la Chine. L’opération, qui aurait coûté quelque 53,3 M€ à Cosco et 15 M€ à Qingdao Port International, a été bouclée en 2016. Le projet prévoit la construction d’un quai de 700 m (pour une capacité de traitement de conteneurs d’au moins 1 MEVP) et les conteneurs seront acheminés sur la zone de stockage par des véhicules autoguidés. « Alors que les discussions étaient encore en cours à Gênes et Trieste, le port de Vado Ligure joue déjà un rôle important et constituera un point de chute important pour la route maritime de la soie », estime Paolo Cornetto, directeur d’APM Terminals Vado Ligure.

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