Au royaume de l’élite portuaire

122 en 2014. 124 en 2015. 126 en 2016. Et 135 en 2017. Si leur part de marché dans le trafic mondial diffère peu d’année en année, naviguant autour de 85 % à quelques dixièmes de pourcents près, le cénacle des ports ayant enregistré une activité conteneurisée supérieure à un million d’EVP a toutefois « coopté » en 2017 un peu plus que d’ordinaire si l’on s’en tient à ce rendez-vous annuel établi par le consultant néerlandais Dynamar.

En 2017, les 135 ports millionnaires ont ainsi totalisé 636 012 900 MEVP (plein et vide, chargé et déchargé, y compris le transbordement), augmentant de 6 % le nombre de « boîtes » manutentionnées. Les 15 premiers ports mondiaux ayant achevé l’année sur un trafic de plus de 10 MEVP* s’arrogent ainsi quelque 40 % de ce volume (autour de 290 MEVP). Mieux, les deux premiers (Shanghai et Singapour, plus de 65 MEVP) concentrent plus de 10 % de l’activité portuaire conteneurisée mondiale.

Stars asiatiques

Ces dernières années, les stars (asiatiques) portuaires – Shanghai, Singapour, Shenzen, Hong Kong, Ningbo, Busan, Guangzhou, Qingdao, Tianjin, Xiamen… – trustent les classements. Parmi les 15 tops mondiaux, une douzaine de ports sont situés en Asie du Sud-Est (dont huit en Chine) et en Extrême-Orient. Il faut descendre dans le classement pour déplacer les polarités, en l’occurrence dans le golfe Persique, grâce à Dubaï-Djebel Ali, au 9^e rang.

Néanmoins, in fine, les 25 ports chinois figurant au sein de ce club élitiste auront achevé l’année avec 213,11 MEVP. Rares sont d’ailleurs les ports chinois qui dévissent: Dandong (– 6 %) et Kaohsiung (– 2 %). Mais nombreux sont ceux qui se hissent: Jinzhou (+ 48 %), Zhuhai (38 %), Tangsham (+ 31 %), Beibu Gulf (27 %), Nantong (+ 22 %) ou encore Haikou (+ 17 %). Les premières places restent toutefois occupées par Shanghai, Ningbo, Guangzhou, Qingdao, Tianjin, Kaohsiung et Xiamen.

Les Européens, dans la masse

En Europe, seuls Anvers et Rotterdam se distinguent, en totalisant 24,18 MEVP, soit deux fois moins que le seul leader mondial, Shanghai. À noter que Hambourg est toutefois parmi les 20 premiers ports mondiaux (pour rappel, les trafics transbordés sont comptabilisés deux fois dans les statistiques de Dynamar), même si le port spécialiste de l’éclatement des flux depuis et vers la Baltique a été rétrogradé d’une place en raison d’un léger ralentissement de son trafic (– 1 %). L’allemand talonne le seul américain à émerger dans un cercle à 20: Los Angeles (9,34 MEVP).

Finalement, la quinzaine de ports européens totalisent un peu plus de 70 MEVP, dont 4,232 MEVP réalisés par les deux tricolores, Le Havre (60^e) et Marseille (109^e), toujours trois fois moins que Rotterdam, le premier de la classe européenne, dominée sans surprise par le range Nord. à l’exception des Pays-Bas, les pays qui se distinguent par une croissance au-delà des 10 % ne sont pas les leaders, mais la Pologne (+ 22 %), la Grèce et la France ou encore le Portugal. Outre-Atlantique, une douzaine de ports américains tirent leur épingle du jeu, les locomotives demeurant les californiens Los Angeles et Long Beach (+ 11 %, 7, 54 MEVP). À part Miami, apathique (0 %, 1 MEVP), Charleston, Houston, Jacksonville, New York, Virginia Ports, Savannah sont tous en croissance, entre 7 et 11 %.

Vite dit…

Parmi les autres enseignements, il est à noter qu’ils sont chaque année plus nombreux à s’afficher en croissance: 110 cette année, dont 13 de plus de 22 % (cf. tableau).

Il faut aussi relever la constance dans la performance de King Abdullah. En 2016, le port de la mer Rouge s’était distingué pour être passé en un an de 0,5 à 1,3 MEVP. Cette année, encore, à près de 1,7 MEVP, il est toujours porté par cette même dynamique (+ 21 %). Non loin, dans le golfe Persique, le jeune port émirati d’Abu Dhabi, qui se donne jusqu’à 2030 pour décupler son trafic, ne connaît pas le même sort. Il a perdu 9 places en 2017 et son trafic (– 3 %) stagne à 1,5 MEVP depuis deux ans.

Méforme

Seules 22 places portuaires sont en méforme, dont Khor Fakkan (2,3 MEVP) aux Émirats arabes unis, qui dévisse sacrément (– 45 %), mais aussi Gioia Tauro (– 12 %, 2,44 MEVP), Dammam (– 11 %, 1,52 M€), Port Kelang (– 9 %, 11,97 MEVP), Osaka (– 8 %, 2,04 MEVP) ou Algésiras (4,38 MEVP).

Neuf font en revanche leur entrée dans le cénacle de ces ports privilégiés: Caucedo, Damiette, Jacksonville, Jinzhou, Las Palmas, Nantong (qui clôture le classement des 135), Tauranga, Valparaiso et Veracruz. Un en sort: Freeport, aux Bahamas, tandis qu’on cherche aussi le port belge de Zeebrugge. D’autres sont à l’encéphalo-gramme plat: Balboa, Bangkok, Bremerhaven, Charleston, Kingston, Kwangyang et Miami.

Le classement de 2017 ne traduit finalement pas dans les faits les effets du ralentissement des échanges Asie-Europe, de la reconfiguration des alliances d’armateurs (qui génère un déplacement des flux d’un hub à l’autre) ou encore de l’augmentation de capacité de manutention de conteneurs ici et là qui font pression sur les taux d’utilisation. Sans doute celui de 2018 sera-t-il plus bavard…