Les armements pétroliers avaient profité en 2016 de la reprise des cours du brut. Ils n’ont pas bénéficié de la même façon de la hausse du prix du pétrole constatée en 2017. Après son plus bas à 28 $ le baril en janvier 2016, le cours du brent a en effet poursuivi en 2017 sa remontée entamée en 2016, pour atteindre 66 $ le baril fin 2017. Pourtant, les bénéfices des armateurs n’ont pas suivi la même tendance en 2017.
Le géant norvégien du transport maritime de brut Frontline annonce ainsi pour l’année 2017 une perte atteignant 265 M$. Selon cet armateur, les prix d’affrètement des pétroliers, toutes tailles de navires confondus, sont au plus bas depuis dix ans, à 10 000 $ par jour. Ils avaient connu un pic, fin 2015, à près de 90 000 $ par jour pour les VLCC et à 50 000 $ pour les Suezmax, et un autre sommet fin 2016 à 45 000 $ pour les VLCC et 30 000 $ pour les Suezmax. Frontline prévoit par ailleurs que le transport maritime de brut continuera d’augmenter plus rapidement que la consommation mondiale de pétrole pour atteindre 45 Mb/j en 2022. De 2008 à 2015, le transport maritime de brut avait diminué, alors que la consommation mondiale avait redémarré dès 2009.
L’armement norvégien DHT, qui exploite une flotte de 23 VLCC et deux Aframax et a actuellement quatre VLCC en construction, a constaté en 2017 un bénéfice de 6,6 M$, en baisse de 30 % par rapport à 2016 principalement à cause des pertes des troisième et quatrième trimestres. Les pétroliers VLCC de DHT ont rapporté en moyenne 27 500 $ par jour en 2017, mais seulement 23 200 $ par jour au quatrième trimestre 2017 et 20 000 $ par jour en janvier 2018.
Autre armement norvégien, Teekay affiche une perte de 151,7 M$ en 2017, après la perte de 123,2 M$ constaté en 2016. Sa filiale Teekay LNG a pris livraison depuis septembre 2017 de six navires méthaniers neufs. « Nous prévoyons que les résultats de Teekay devraient continuer à profiter des projets offshore et LNG qui vont aboutir au cours des prochaines années », indique le PDG, Kenneth Hvid, qui souligne que le groupe Teekay a pris livraison de douze navires au total au cours de l’année 2017 et devrait continuer à renouveler et accroître sa flotte jusqu’en 2020.
Höegh LNG affiche de son côté un bénéfice de 20 M$ au quatrième trimestre 2017, soit autant que les trois premiers trimestres de l’année réunis et bien davantage que les 0,8 M$ constatés au quatrième trimestre 2016. L’armement a cependant décidé de réduire les dividendes versés aux actionnaires, à cause des retards constatés dans la mise en exploitation de ses installations flottantes de regazéification de GNL (FSRU). Höegh LNG compte bien, néanmoins, poursuivre le développement de telles installations.
Augmentation des exportations américaines
L’Agence internationale de l’énergie (IEA), dans son rapport annuel Oil 2018, prévoit une augmentation de la consommation de pétrole jusqu’en 2023, portée par la croissance économique mondiale. La moitié de cette augmentation de la demande proviendrait de la Chine et de l’Inde, tandis que les pays non-membres de l’Opep en seraient les principaux bénéficiaires, en particulier les États-Unis qui devraient participer à hauteur de 80 % à l’augmentation de l’offre pétrolière mondiale hors-Opep. Au niveau des échanges, l’IEA prévoit une forte augmentation des exportations américaines à destination de l’Asie, et pointe aussi la place éminente du Brésil, du Canada et de la Norvège dans l’augmentation de l’offre.
Le rapport de l’IEA montre aussi le rôle croissant de la pétrochimie dans l’augmentation de la consommation de pétrole brut, ainsi que les changements apportés par la nouvelle réglementation mise en place par l’OMI en matière de carburants maritimes, qui représente, tant pour le secteur maritime que pour celui du raffinage, « un immense défi », d’autant que la demande de gasoil pour les usages terrestres est en forte hausse: « la nouvelle réglementation va provoquer une baisse massive de la demande de fuel et une hausse de celle de gasoil marin. La demande totale ne sera pas fondamentalement modifiée », indique l’IEA, qui pointe toutefois l’incertitude que fait planer ces changements de carburant sur les prévisions de consommation.
Davantage de pétroliers géants
L’augmentation du nombre de pétroliers neufs, déjà constatée en 2016 et 2017, devrait se poursuivre, selon la société de services maritimes Fearnleys, qui recense 56 commandes de VLCC et 51 commandes de Suezmax en 2018, après les 50 VLCC et 51 Suezmax livrés en 2017. L’année passée a aussi vu le déchirage de 13 VLCC et 12 Suezmax. Le ferraillage de sept VLCC a d’ores et déjà été annoncé pour 2018, selon le décompte de Fearnleys, qui prévoit un nombre de navires en augmentation pour la flotte pétrolière de moins de 20 ans d’âge: le nombre de Suezmax devrait plafonner à 528 en 2018 et 527 en 2019, alors que celui des VLCC atteindrait 748 en 2018 et 774 en 2019.