Il faisait nuit lorsque le vraquier Interlink-Veracity a déchargé les dernières 20 000 t de combustibles destinées à la centrale électrique Enel située dans le port de Gênes. Les dernières tonnes, car c’était la dernière fois qu’un navire déchargeait du charbon à la Lanterne, le nom donné au port en raison de la grande lanterne qui guidait auparavant les navires et qui se trouve à l’entrée du site. C’était le 22 juillet. Les travaux de démantèlement de la zone devraient commencer assez rapidement, enfin selon la feuille de route, le terrain qui appartient à l’État devant être restitué. Selon les accords, d’ailleurs, le paysage devra être remis en l’état dans lequel il se trouvait en 1929 avant l’inauguration de la centrale en grande pompe par le régime fasciste. Seule la partie centrale du bâtiment échappera aux coups de marteaux-piqueurs et sera reconvertie en un espace social qui sera utilisé pour les débats politiques et les activités culturelles.
Avec la fin du charbon, c’est toute une page de l’histoire portuaire génoise qui est tournée. Au début du siècle dernier, quelque 7 000 travailleurs étaient employés sur les quais. La moitié s’occupait du charbon transporté par les navires arborant les pavillons allemands et anglais. Aujourd’hui, ils sont moins d’une centaine. Selon les chroniques portuaires de l’époque, quelque 350 à 400 wagons ferroviaires chargés à bloc de charbon quittaient le port tous les jours en direction du Nord industrialisé. Puis les temps ont changé ainsi que les activités portuaires. Le pétrole brut a remplacé le charbon relégué à l’état de parent pauvre et dangereux, car polluant.
Après le passage du dernier charbonnier, le port de Gènes doit affronter un énorme défi: remplacer le volume de trafic de charbon par d’autres marchandises pour éviter un creux dans les résultats. Les manutentionnaires sont déjà à pied d’œuvre.