Pour Michel Segain, il y a urgence à redonner une image « sereine » au port du Havre. « Ça va être dur et nous le savons. Les conséquences déjà mesurables résultent de l’annulation de nombreuses escales, voire du détournement de navires, du retard considérable dans la livraison et la réception des marchandises destinées à nos clients, stoppant ainsi l’économie de toute une région, et ceci dû principalement à l’absence de dialogue social », a expliqué Michel Segain. Pour le responsable, la revalorisation de la place portuaire havraise passera obligatoirement par des campagnes de promotion, « et le plus tôt sera le mieux ».
« Les entreprises sont fatiguées »
Même analyse chez Brice Vatinel, le président de l’association pour la défense des intérêts vitaux du port du Havre, lui-même p.-d.g. de la société familiale G Vatinel, organisatrice de transport international et commissionnaire en douane. « La conjoncture économique est difficile et les entreprises sont fatiguées. Depuis 2008, les flux sont globalement en baisse. Il n’y a qu’un léger frémissement à l’export. Il faut maintenir la clientèle existante mais aussi essayer de la développer. Nos clients se positionnent à l’international car ils cherchent des relais de croissance. Dans ce contexte, une journée de grève par semaine, ce n’est pas supportable. Et deux jours, c’est véritablement insupportable », explique-t-il. Brice Vatinel évoque des salariés qui n’ont pas pu accéder à leurs entreprises lors des blocages, ou encore des entrepôts logistiques incapables de fonctionner faute de marchandises. « Il n’y a aucune visibilité pour les entreprises. Des mouvements de grève ont même été organisés par surprise. Il y a la pression des clients qui demandent où sont leurs commandes. On ne peut pas facturer quelque chose qu’on est dans l’incapacité de faire. Tout cela a un coût direct mais aussi des conséquences indirectes. Une fois de plus, c’est l’image du Havre qui en souffre. »
Préjudice financier
Brice Vatinel estime qu’à raison de deux journées de grève par semaine, le préjudice financier pour les entreprises s’élève à 25 % du chiffre d’affaires. « Certaines entreprises, de par leur taille, peuvent supporter ce coût, d’autres non. » Pour le président de l’association, il y aurait eu à fin mai une perte de plus de 70 escales au profit de ports concurrents comme Anvers. Un chiffre qui a probablement dû évoluer depuis. « Les clients ne veulent pas prendre de risques avec Le Havre. Ils prennent leurs dispositions avant même que soit acheminée la marchandise. »
Une volonté de chasser en meute
À l’occasion de son assemblée générale du 24 juin, l’Umep a dévoilé quelles seraient ses orientations pour les mois à venir. L’Umep souhaite aller chercher des subventions pour le port du Havre auprès des instances européennes. « Il est important pour nous de chasser en meute auprès de Bruxelles pour capter des subventions qui nous échappent actuellement et qui profitent aux ports concurrents nord-européens. Il faut faire du lobbying auprès des parlementaires », a insisté Michel Segain, le président de l’Umep. Outre le fait que l’Umep représente un poids important en termes d’emplois directs et indirects, elle s’est également fédérée récemment avec d’autres acteurs de l’axe Seine. « Avec les instances professionnelles de Rouen, Gennevilliers et Paris, nous sommes une fédération représentative qui compte également peser sur les dossiers à Bruxelles. D’ailleurs, nous sommes en train de rédiger un plan stratégique. » Récemment, au niveau local, les fédérations de transporteurs routiers ont rejoint le conseil d’administration de l’Umep. Michel Segain appelle de ses vœux la mise en place d’un véritable plan Marshall pour les ports de l’axe Seine. L’Umep cite parmi les priorités des cinq prochaines années l’électrification de l’axe ferroviaire Serqueux-Gisors et la construction des infrastructures manquantes sur Port 2000 (chatière, aménagement des postes 11 et 12). Autre impératif à plus long terme pour Michel Segain, la nécessité d’élargir l’hinterland à l’est, jusqu’en Allemagne. « Il faut aller bien au-delà de l’axe Seine. »