Dans son discours, Jean-Louis Le Yondre, le président du Syndicat des transitaires et des commissionnaires en douane du Havre (STH) s’en est directement pris à la CGT. Un discours qui fait écho à celui du président de l’Union maritime et portuaire du Havre (Umep) qui, il y a quelques semaines, a évoqué une « grève particulièrement destructrice ». Mais Jean-Louis Le Yondre a voulu aller plus loin. Le ton est donc monté d’un cran, démontrant une fois encore l’exaspération de toute une profession. « L’attitude de notre CGT GPMH et du Syndicat des dockers est pour le moins paradoxale. Les encartés CGT-Syndicats des dockers comptent 2 200 personnes, ceux du port, 400. Le monde du transport maritime et industrialo-portuaire est composé de 32 000 salariés. C’est-à-dire, en clair, que 2 600 apparatchiks bloquent l’économie des 26 900 autres. » Selon Jean-Louis Le Yondre, les dockers et les employés du port CGT ne sont « soumis en aucun cas à la loi El Khomri », expliquant au passage que ces personnels font partie « des nantis dans leur catégorie ».
« Nous touchons le fond de l’aberration »
Le président du STH dénonce le comportement des grévistes envers les autres salariés. Il cite le cas de personnels injuriés ou encore d’exactions faites sur des véhicules. Il dénonce tout autant l’attitude de certains officiers de port qui, sans préavis de grève, auraient participé à des blocages. « Lorsqu’on est officier, on a un comportement d’officier, sinon on fait autre chose. Autre procédé inadmissible, un employé du port, alors qu’il n’y avait pas de grève ce jour-là, s’est permis de refuser la pose d’une échelle de coupée à un paquebot. Le commandant du paquebot a fait demi-tour. Des faits comme ceux-là – et il y en a eu beaucoup d’autres – devraient faire l’objet de sanctions exemplaires. » Pour le responsable, tous les efforts qui ont été fournis ces dernières années pour redonner une place de choix au port risquent d’être anéantis. Sur ce thème, Jean-Louis Le Yondre enfonce le clou. « Comment allons-nous prospecter dans le monde entier en vantant les mérites du port du Havre alors que nous n’avons plus de fiabilité, plus de performance et que nous ne savons même pas comment nous clôturerons nos bilans? Comment programmer des budgets sur de lourds investissements alors que nous ne savons pas ce que seront l’économie et le social de demain? Comment convaincre nos équipes commerciales qui voyagent à l’étranger et prêchent la bonne parole alors que nous touchons le fond de l’aberration? » Le responsable veut alerter également la classe politique de tous bords sur ce qui se passe actuellement chez les professionnels du monde du transport maritime. Et sa conclusion est encore plus cinglante: « Vous, CGT, vous voulez nous faire crever, je vous souhaite bien du plaisir, vous crèverez avec nous. »
Des routiers exaspérés
Dans une lettre adressée le 10 juin à l’Umep (Union maritime et portuaire du Havre), l’Otre Normandie (Organisation des transporteurs routiers européens) a exprimé son indignation sur le volume important d’opérations que les transporteurs ont dû opérer au lendemain de la grève du 9 juin. Ils pointent du doigt l’incapacité de rentrer certains conteneurs sur les terminaux, mais aussi l’impossibilité de sortir des conteneurs à livrer dès le 13 juin. L’Otre a demandé à l’Umep d’intervenir auprès du Groupement des employeurs de main-d’œuvre (Gemo) pour que ce dernier facilite le transfert et le flux des marchandises sur le port. « À plus long terme, quelle image allons-nous renvoyer une fois de plus aux donneurs d’ordre qui font le choix de continuer à faire transiter leurs marchandises par le port du Havre? », s’inquiète également l’organisation. Quelques jours auparavant, l’Otre avait également interpellé le préfet de Région sur les conséquences des blocages sans préavis qui ont régulièrement lieu sur la zone industrialo-portuaire havraise. Il indiquait que les chauffeurs et leurs ensembles routiers s’étaient retrouvés « pris en otage » sur le parking routier de Gonfreville l’Orcher, dans l’impossibilité de quitter cet endroit. De plus, tous les services de restauration et d’accès aux sanitaires du centre étaient fermés, le personnel n’ayant pas pu se rendre au travail. « Solennellement, notre organisation demande que l’État montre son autorité et que ces pseudo-manifestants aux méthodes de preneurs d’otages soient mis rapidement hors d’état de nuire », avait ajouté l’Otre dans cette lettre.