Quelles sont les raisons qui ont incité le groupe néerlandais NileDutch, en acquérant l’armement Safmarine MPV, à renouer avec le secteur du conventionnel auquel il avait renoncé pour se consacrer à la conteneurisation intégrale? Selon Jan-Willem De Braal, membre du conseil d’administration et directeur d’exploitation, et le capitaine Jean-Marc Thiebaut, directeur des lignes Afrique de Safmarine MPV, il s’agissait d’une évolution nécessaire, à plus d’un titre. « D’une part, une grande partie de la clientèle de NileDutch Container Line, outre des conteneurs, a également des flux de marchandises conventionnelles pour lesquels il fallait d’autres solutions, ce qui est maintenant résolu. D’autre part, dans le contexte de notre réseau intercontinental, nous couvrons sous un même B/L le transport de toute la gamme des conditionnements de la marchandise: conteneurs, conventionnel, projets, machinerie, sacherie, camions, colis lourds et volumineux. Et cette clientèle s’adresse à un seul opérateur qu’elle sait fiable par expérience. »
Journal de la marine marchande (JMM): la nouvelle compagnie niledutch mpv belgium, dont le siège est à Anvers, exploite pour l’instant un service régulier avec des navires affrétés de 12 000 tpl à 18 000 tpl gréés jusqu’à 160 t. Leur fréquence est d’un départ toutes les trois semaines d’Anvers, Aberdeen, Rouen, Leixões, vers Port Gentil, Sao Tomé, Douala, Luanda, Soyo, Boma, Matadi. Quelles sont les perspectives pour les prochains mois, affrètements trip-out, au voyage complet, à long terme?
Jan-Willem De Braal (J.-W.D.B): Nous poursuivrons cette technique du mixage, trip-out et au voyage. Par contre, dans le courant du deuxième semestre, nous passerons à une fréquence un peu plus élevée, d’un départ toutes les deux semaines, ceci en fonction de ports de base comme Matadi, Sonil, Port Gentil, Sao-Tomé. N’oublions pas qu’en plus de la clientèle de chargeurs propre à NileDutch, il y a également cette importante clientèle traditionnelle de l’ex-Safmarine MPV qui a suivi. Enfin, au fret de retour, comme des bois, s’ajoute le rapatriement de conteneurs vides en Europe.
JMM: les outils traditionnels sur la route de l’Afrique de l’ouest – ue sont les navires polyvalents de 12 000 tpl à 25 000 tpl gréés à 180 t – restent-ils compatibles avec certaines évolutions? des unités plus grandes de 30 000 tpl à 35 000 tpl, éventuellement avec une petite capacité ro-ro, ne seraient-elles pas plus adaptées aux développements qui s’effectuent en Afrique?
J.-W.D.B: Des navires polyvalents de plus grande taille, avec capacité ro-ro, sont difficiles à trouver. Nous optons pour des unités qui ne sont pas trop grandes et surtout compatibles avec les conditions nautiques et d’accueil de certains ports, comme par exemple Matadi.
JMM: comptez-vous escaler au nouveau terminal d’ictsi à Matadi?
J.-W.D.B: Nous connaissons les possibilités de cette nouvelle installation, mais pour l’instant nous en sommes au stade des discussions.
JMM: le trafic entre l’Europe et l’Afrique de l’Ouest, qui connaît des difficultés, n’est-il pas mûr pour des manœuvres de consolidations, voire des alliances entre opérateurs polyvalents, comme cela se fait dans le secteur des conteneurs?
J.-W.D.B: Je ne le crois pas. Il y a trop de différences tant sur le plan des destinations, des types de services que des cultures d’entreprises, dont certaines sont familiales comme c’est le cas pour NileDutch. En général, les clients-chargeurs ne sont guère demandeurs pour des services conjoints, du moins dans le secteur du conventionnel. Ils préfèrent avoir recours à un seul armement, un seul interlocuteur en qui ils ont confiance.
JMM: quelles seront les prochaines étapes pour Niledutch MPV? à terme, y a-t-il encore de l’avenir dans le conventionnel?
Jean-Marc Thiebaut (J.-M.T.): Il y a assurément encore de l’avenir dans ce domaine, notamment pour ce qui est de l’Afrique de l’Ouest. Beaucoup de projets intéressant les secteurs oil & gaz, énergie hydraulique, infrastructures, télécommunications, agriculture ont été arrêtés ou reportés pour des raisons financières. Les prix du pétrole remonteront, et ces projets redeviendront d’actualité. Il y aura donc du travail en suffisance pour les navires polyvalents. En ce qui nous concerne, nous disposons d’un réseau intercontinental unique, ce qui permet de mettre à profit cette complémentarité conteneurs/conventionnel.
JMM: Niledutch container line a vendu deux de ses quatre nouveaux navires de 3 500 EVP (dont 482 reefers) à hapag-lloyd, qui a également pris les deux autres en affrètement. est-ce à dire que cette taille ne convient plus à ce trafic pour lequel des compagnies comme cma cgm ou msc commencent à introduire des unités de 9 000 EVP à 10 000 EVP? niledutch n’a-t-il pas arrêté son service d’asie fewa pour devenir co-chargeur sur le service asaf du partenaire français?
J.-W.D.B: Je vous signale que CMA CGM est également co-chargeur sur nos navires au départ d’Europe. Il est évident que nous devons suivre certaines tendances, mais il y a toujours de la place pour des unités de 3 500 à 4 500 EVP. Nous avons d’ailleurs affrété récemment plusieurs unités de 3 650 EVP gréés pour 12 mois. Cela prendra encore du temps avant que tous les ports ouest-africains disposent de nouvelles infrastructures et d’équipements de manutention.
JMM: est-il encore rentable d’assurer en Afrique de l’ouest un service feeder en fonction de navires océaniques de 3 600 EVP?
J.-W.D.B: Oui, c’est rentable, car un tel service n’est pas en rapport avec une seule relation géographique, mais bien avec notre stratégie de réseau qui concerne d’autres relations géographiques.
JMM: ne craignez-vous pas que l’application en date du premier juillet de la norme solas (poids exact des conteneurs chargés) se traduise par un chaos tant en europe qu’en Afrique?
J.-W.D.B: Cette réglementation pose effectivement problème, mais il s’agit de la responsabilité des chargeurs. C’est aux agents, aux transitaires qu’il appartient d’agir, et surtout d’informer, car pour l’instant il y a un besoin d’un processus d’instructions. De toute manière, ce surcoût sera supporté par la marchandise.
JMM: comment voyez-vous l’évolution de niledutch dans le trafic conteneurisé avec l’afrique de l’ouest?
J.-W.D.B: Nous sommes déterminés à poursuivre notre activité et prêts à assurer des développements, comme par exemple couvrir d’autres destinations. Des études sont en cours. C’est d’ailleurs ainsi que nous venons d’ouvrir une escale à Dakar.
NileDutch, un spécialiste de l’Afrique de l’Ouest
NileDutch Container Line est assurément un grand spécialiste de la desserte de l’Afrique de l’Ouest qu’il assure au départ de l’Europe du Nord, de la Méditerranée, d’Asie, d’Afrique du Sud, d’Amérique du Sud et de la côte Est des États-Unis. Pour ces services sont alignés une vingtaine de navires affrétés. Interviennent également des feeders le long de la côte ouest-africaine. Ces services de ligne s’inscrivent dans le cadre de partenariats. Dans l’ensemble, l’armement s’assure une part de marché de 25 %. Par exemple: 25 % pour l’Angola, 30 % pour Matadi.