Le 1er mars au matin, le MSC-Mia-Summer a appareillé d’Ashdod avec à son bord 35 conteneurs frigorifiques exportés par Mehadrin et Mentfield. Cinq jours plus tard, les boîtes déchargées dans le port Slovène de Koper ont embarqué aussitôt sur le rail pour rejoindre Rotterdam le 8 mars dans la soirée.
Cette première opération, à première vue simple sur le papier, est en fait le fruit de longs mois de travail dans le cadre d’un programme européen (Inea, Innovation and Networks Executive Agency). Mehadrin Tnuport Export L.P., principal exportateur israélien, et le commissionnaire de transport Mentfield Logistics, testent une autre alternative, plus complexe, ponctuée par des ruptures de charges.
Au lieu d’exploiter des navires entre Ashdod et Rotterdam, port d’éclatement des périssables dans le Nord Europe, ou de faire rouler des camions depuis le sud de l’Europe, le schéma logistique retenu est multimodal et passe par Koper, Marseille et Venise. Les trois ports méditerranéens sont parties prenantes au programme. Exportateurs, transitaires et opérateurs ferroviaires sont également associés à cette chaîne logistique du froid qui va du producteur jusqu’au consommateur.
Projet européen sur trois ans
« La réduction des émissions de CO2 constitue l’un des principaux objectifs du projet Fresh Food Corridor », explique un porte-parole de la Commission européenne qui alloue un montant maximum de 10 M€ pour le démarrage de ce projet. Bruxelles rembourse 50 % des dépenses engagées dans le cadre de la réalisation de ce projet d’une durée de trois ans.
« Pour atteindre cet objectif ambitieux, le projet développera également des solutions TIC qui permettront d’accroître l’interopérabilité entre les différents modes de transport, d’améliorer la traçabilité des produits tout en accélérant les procédures d’inspection et de certification », a souligné la direction du port de Koper, chargée de coordonner le projet.
En Italie, aux côtés de l’autorité portuaire de Venise, deux autres partenaires sont engagés dans l’aventure: Veneta Lombardia pour la commission de transports, et Rail Cargo Logistics, désigné comme l’opérateur ferroviaire.
Synchronisation mer/fer à ajuster
Pendant la campagne d’exportation, d’avril à novembre, 2 000 conteneurs reefers devraient transiter via Koper et Venise. À Fos, le projet de Fresh Food Corridor ne semble pas aussi mûr qu’à Koper. Le démarrage de la navette Fos-Rotterdam ne devrait pas intervenir avant le mois de mai. Reste à régler la synchronisation mer/fer, les navires de Cosco ayant des difficultés à respecter les fenêtres. « Notre objectif consiste à parvenir à un transit time de sept jours entre Haïfa et Rotterdam afin de gagner de cinq à sept jours de vente supplémentaire en rayon », explique Gérard Antoine, gérant de Lvanto. Le commissionnaire de transports en France précise d’ailleurs que les premiers trains seront chargés d’agrumes, ces fruits étant moins sensibles aux variations de température.
« Nous allons effectuer des trains tests, mais la phase industrielle débutera à compter du mois de novembre. Nous espérons organiser l’acheminement d’une trentaine de trains sur la saison qui s’achève en mai. Chaque train pourra transporter 40 conteneurs reefers », précise Alexandre Gallo, directeur d’Eurorail. Autre sujet d’inquiétude à Fos, l’arrêt des contrôles phytosanitaires des fruits et légumes importés d’Israël sur le terminal de Seayard à compter du mois de juin. Si, demain, le contrôle des conteneurs était imposé au poste d’inspection frontalier, cela occasionnerait une perte de temps, des surcoûts et du CO2 supplémentaire avec un aller-retour en camion. Une pratique peu orthodoxe au regard de la philosophie du projet « zéro émission carbone ». D’ailleurs, à Fos, des voix s’élèvent pour que la dérogation dont bénéficie Seayard soit prolongée. « Si les règles changent, les trafics risquent de s’évader vers d’autres ports », avertit Claus Ellemann-Jensen, p.-d.g. de Seayard.