Charles Masse connaît bien son sujet. L’homme est un spécialiste du transport combiné. Il a à son actif la réalisation de quatre plates-formes multimodales en France. Alors que se passe-t-il au Havre? En effet, le terminal connaît depuis sa livraison mi-juin d’importants problèmes d’ordre opérationnel qui ne lui permette pas de traiter les volumes escomptés. Mais avec ces dysfonctionnements, ce sont également des problèmes financiers qui ont amené le tribunal de commerce du Havre à placer l’exploitant LHTE en redressement judiciaire le 23 octobre. Depuis, LHTE, qui regroupe les opérateurs Naviland Cargo (SNCF), Novatrans (Charles-André), Greenmodal (CMA CGM) et Logiseine (CFT), bénéficie de délais pour poursuivre son activité et redresser la barre. De son côté, LH2T, copropriétaire du terminal avec le Grand port maritime du Havre, a décidé fin février de jeter l’éponge, la société ne pouvant plus percevoir ses loyers.
Un sujet sensible
Du coup, le terminal multimodal, dont l’investissement représente 137 M€, est devenu un sujet sensible depuis plusieurs mois. Charles Masse avance plusieurs explications. « Ce n’est pas encore le moment d’en tirer des conclusions trop hâtives. Le transport combiné est un vaste sujet en France. Et Le Havre est en retard dans le domaine. Mais aujourd’hui, une chose est certaine, nous n’aurons plus à discuter des loyers qui ne nous ont pas été payés. J’ai pris acte que nous avions conclu un bail en décembre 2011 avec LHTE. Sur cette base, nous nous étions engagés. Une signature est quelque chose qui s’honore et dans le cas présent, il y avait des opérateurs de renom », explique-t-il. Pour le responsable, le volet exploitation du terminal du Havre n’a pas été correctement préparé, ce qui a entraîné très rapidement des problèmes opérationnels. « Il n’y pas de grandes explications théoriques à avancer pour justifier l’accumulation de ces problèmes. C’est très simple, au contraire. Dès le départ, les choses ne pouvaient pas fonctionner », confie-t-il en citant pour seul exemple des lignes téléphoniques qui n’avaient toujours pas été tirées quinze jours après la livraison de la plate-forme. Le GPMH est aujourd’hui seul propriétaire. Ce qui pourrait permettre aux opérateurs de ne plus payer de loyers ou alors de s’acquitter de loyers revus à la baisse, toujours selon le responsable. « Pour notre part, nous ne pouvions accepter une baisse de loyers, des loyers qui servaient d’ailleurs à rembourser nos emprunts. » Charles Masse rappelle au passage que le compte d’exploitation prévisionnelle avait été élaboré par les opérateurs dès 2011. Pour lui, la question du coût supporté par les opérateurs n’est pas un argument à retenir. Charles Masse va plus loin car selon lui, ce dossier pose la question d’opérateurs qui s’engagent sur un volume de trafic donné et s’aperçoivent une fois infrastructure construite que celle-ci est trop chère car ils ne réaliseront pas leurs objectifs de trafic. Charles Masse se demande également pourquoi les engagements des opérateurs sont parfaitement respectés sur des infrastructures équivalentes comme Dourges (Pas-de-Calais) et Grans Miramas (Bouches du-Rhône) en France et ne le sont pas au Havre, premier port français pour les conteneurs. Pas de regret, donc, car le responsable de LH2T se veut avant tout lucide sur les raisons qui ont conduit la société exploitante LHTE à se retrouver devant les juges du tribunal de commerce du Havre. Il n’y a donc pas de fatalité selon lui.