Le département de Seine-Maritime, au travers du Syndicat mixte de promotion de l’activité transmanche (SMPAT), est contraint de résilier, dans un délai de six mois, le contrat de délégation de service public (DSP) qui le lie à l’armateur DFDS pour l’exploitation de la ligne transmanche Dieppe-Newhaven. Le Syndicat mixte doit engager une nouvelle procédure pour désigner un opérateur « en requalifiant le contrat de DSP en marché public ». L’opérateur DFDS, dont le contrat courait jusqu’au 31 décembre 2017 (après deux prolongations), pourra candidater.
Pascal Martin, le président du département de Seine-Maritime et du Syndicat mixte de promotion de l’activité transmanche, a ainsi résumé le 24 février au cours d’une conférence de presse le contenu de l’arrêt prononcé le 28 janvier par la cour administrative d’appel de Douai. Ce jugement s’inscrit dans le cadre d’un contentieux qui oppose la société Eurotunnel et le Syndicat mixte, Eurotunnel contestant notamment « l’intérêt général lié à la continuité de service public » de la ligne et le montant des emprunts souscrits pour financer les deux navires. Le tribunal administratif de Rouen ayant rejeté le 16 juillet 2013 les arguments de la société Eurotunnel, cette dernière avait fait appel auprès de la cour administrative d’appel de Douai.
« La collectivité peut subventionner la ligne Dieppe-Newhaven »
Dans son arrêt du 28 janvier, la cour n’a pas remis en cause le principe de la contribution d’équilibre du département (de l’ordre de 20 M€ en 2015) pour l’exploitation de la ligne Dieppe-Newhaven, cette compensation ne pouvant être assimilée à une aide d’État. « La collectivité peut subventionner la ligne transmanche. Elle peut aussi le faire avec d’autres partenaires comme l’agglomération de Dieppe et la Région Normandie », a commenté Pascal Martin, entouré de Maître Michel Guenaire, qui assiste le SMPAT depuis dix ans, et de Jean-Pierre Lucas, directeur général adjoint du département. « Les juges ont considéré que le fait de revoir chaque année le montant de la compensation publique limitait le risque pris par l’opérateur privé dans l’exploitation de la ligne et que de ce fait, le contrat devait être requalifié en marché public. Ce que nous dit la cour, c’est que nous devons prendre toute l’économie du contrat et la mettre dans un marché », c’est-à-dire la compensation de service public, les redevances acquittées par le délégataire, les remboursements de frais de soute et le service annexe (possibilité d’exploitation dans le cadre d’un service privé annexe). « Cela va nous donner plus de responsabilités et nous obliger dans le même temps à être davantage impliqués », commente Pascal Martin. « Nous transformons une mauvaise nouvelle en un moyen pour organiser la stabilisation juridique de la ligne Dieppe-Newhaven ». Selon Pascal Martin, le délai de six mois est particulièrement serré, mais il doit permettre au Syndicat mixte de lancer l’appel d’offres et d’étudier les candidatures. Interrogé sur la question de savoir si l’actuel délégataire DFDS pourrait être le futur prestataire, il a répondu que rien ne l’empêchait.
La ligne transmanche Dieppe-Newhaven avait vu son destin basculer avec la mise en service du tunnel sous la Manche en 1994. La question de sa pérennité était régulièrement posée depuis le retrait de Stena Line fin 1998. Avec deux navires assurant deux rotations en hiver et trois en été, la compagnie DFDS Seaways a, en 2015, transporté 409 000 passagers, 51 000 camions et 1,6 Mt de fret.