Sur la campagne céréalière 2014/2015, Sénalia, manutentionnaire dans le Grand port maritime de Rouen (GPMR), a réalisé un trafic de de 7,5 Mt, en hausse de 8 %. Les exportations de céréales sont en hausse de 19 % à 4,1 Mt. Une belle année sur ce secteur tiré par les pays de l’Extrême-Orient. La Chine est devenue le premier client du groupe rouennais. Avec 28 % des exportations de céréales, l’empire du Milieu a dopé les trafics notamment par des commandes d’orge. Pris dans leur ensemble, les pays d’Asie, Chine, Thaïlande, Bangladesh, Philippines et Corée du Sud ont totalisé globalement 45,5 % des exportations. Si la Chine a surtout été à l’honneur avec des exportations d’orge, les autres pays d’Asie ont surtout été présents au cours de cette campagne avec du blé fourrager.
Activités de diversification: – 3,8 % à 3,38 Mt
Sur les autres pays tiers, l’Algérie, qui a été pendant des années le principal client de Sénalia, a vu ses importations se réduire au départ de Rouen. Au cours des années précédentes, les trafics à destination de l’Algérie ont été de l’ordre de 1,2 Mt à 1,8 Mt. Sur la dernière campagne, ils ont chuté de 80 % à 376 000 t. Le Maroc a alors pris la place de premier port des pays tiers autres que ceux de l’Asie avec 18,1 % des exportations de céréales. Quant à l’Union européenne, elle a triplé ses tonnages. L’Espagne et le Portugal ont tiré les exportations de Sénalia pour leurs besoins en blé fourrager. Parallèlement aux exportations de céréales, Sénalia réalise 45 % de ses trafics sur les « activités de diversification ». Il s’agit notamment des trafics de sucre, de cacao, de bioéthanol et d’engrais. Au global, ces différents courants ont réalisé un trafic de 3,38 Mt, en recul de 3,2 % sur la dernière campagne. Concernant la trituration, les entrées de graines de colza sont stables à 951 000 t. La production de l’usine a enregistré deux arrêts techniques de trois semaines chacun sur la campagne. Ces interruptions ont permis d’augmenter le processus de trituration pour passer de 2 800 t/j à 3 000 t/j. En sortie, les trafics sont stables avec l’Ester en hausse de 5 % qui compense la baisse de 14 % des huiles. Second secteur de ces activités de diversification, le cacao a perdu 10,3 % à 95 000 t. Les entrées perdent 2 % à 48 000 t et les sorties régressent de 16 % à 47 000 t. Sénalia explique que si les volumes de cacao ont été stables pour Cargill, ceux destinés à l’usine de Barry Callebaut, à Grand Couronne, ont baissé. Le décalage de la mise en production des nouvelles lignes de production de l’usine de Louviers a touché ces trafics.
Du côté du Bioéthanol, la campagne affiche un résultat en baisse. Le volume de blé consommé a baissé de 9,3 % à 850 000 t. En sortie, les drèches destinées à la Norvège perdent 19,4 % à 141 000 t, alors que le gluten, expédié par voie fluviale, augmente de 17,6 % à 20 000 t. Autre courant en baisse dans les activités de Sénalia, le sucre a perdu 26 % à 79 000 t.
Cette activité est principalement expédiée vers l’Union européenne, dont la France qui entre pour 32 000 t, l’Espagne pour 27 000 t, l’Italie pour 10 000 t, le Royaume-Uni pour 7 000 t et, pour les pays tiers, Israël (2 000 t). Un changement radical dans ces exportations puisque l’Union européenne représente 97 % des expéditions contre 44 % lors de la campagne précédente. Enfin, les engrais sont en nette croissance avec une production supérieure à 40 % des prévisions. Sénalia a réalisé un trafic de 98 000 t. Un surplus d’activité que le groupe a géré par le doublement des équipes avec l’exploitation d’un hangar complémentaire sur la presqu’île Elie.
La campagne céréalière 2014/2015 a aussi été marquée par une nouvelle approche des modes de transport terrestre. Manutentionnaire au Grand port maritime de Rouen, Senalia a joué le jeu des transports massifiés. Sur la campagne 2011/2012, le ferroviaire et le fluvial ont représenté 22 % des pré et post-acheminements. Sur la campagne 2014/2015, ces deux modes entrent pour 36 %. Entre les quatre campagnes céréalières, le fluvial est passé de 13 % à 24 % quand le ferroviaire a vu ses parts de marché progresser de 9 % à 12 %. Une performance logistique que le groupe a pu réaliser avec des investissements. En effet, Sénalia a entrepris des travaux sur le poste de déchargement des péniches. Il a remplacé cet outillage pour permettre un débit de 400 t/h. Un poste qui a nécessité un investissement de 5,7 M€. Sur la presqu’île Elie, le nouveau système de chargement, opérationnel depuis le mois de février 2015, permet de charger les navires à une cadence de 300 t/h. Cette installation a coûté 12,8 M€.
Un nouveau poste de chargement à 300 t/h
Outre les investissements qui ont permis de porter les modes de transport terrestre massifiés à des niveaux jamais atteints, Sénalia a aussi tiré vers le haut le ferroviaire. Sur la dernière campagne, avec 512 000 t réalisées par voie ferroviaire sur la campagne 2014/2015, le fer a plus que doublé sa part de marché. Sénalia a créé avec Ecorail un système de navettes pour les coopératives. Alain Charvillat, directeur céréales export de Sénalia, a expliqué que la démarche s’est étalée sur deux ans et demi. « Il a fallu fédérer l’ensemble des organismes stockeurs et des opérateurs pendant cette période pour disposer de tonnages, mais aussi d’une régularité dans la desserte. » Un système intermodal qui fonctionne depuis 2014. Pour certains collecteurs, ce nouveau système a suscité des craintes lors de sa conception. « Nous nous sommes posé des questions mais, au final, ce système s’inscrivant dans la durée est devenu un outil logistique satisfaisant », a souligné un responsable de Vivescia. Pour Alcolyance, la réussite de ce projet lui a permis de passer de 80 % des transports par route à une part de 60 % par fer, réduisant ainsi la part modale de la route. Si, en amont, la navette ferroviaire apporte son lot d’atouts, pour le silo, il est aussi une garantie d’avoir une régularité dans l’approvisionnement des silos.
Après avoir mené à bien la réalisation de cette navette ferroviaire, Alain Charvillat a décliné ce système sur le transport fluvial. Depuis 2015, une navette fluviale dessert régulièrement les silos rouennais. « Et déjà, affirme le directeur export céréales de Sénalia, les trafics sur les premiers mois de l’exercice de cette navette fluviale dépassent nos prévisions. » Et pour Charles Descamps, directeur du pôle aval de Valfrance, « la péniche a le mérite d’apporter de la régularité et de la souplesse dans les approvisionnements ».
La campagne céréalière 2015/2016
Dans son discours de clôture, le président de Sénalia, Thierry Dupont, a fait le point sur la campagne en cours. « Avec 2,5 Mt de plus à commercialiser, difficile d’imaginer le scénario des six mois à venir. Au 31 décembre, nous étions en avance de 500 000 t par rapport au 31 décembre 2014, mais avec du retard sur le blé. Au regard de la dernière campagne, je ne me hasarderai pas à faire des pronostics. » Pour le président du manutentionnaire rouennais, la réussite de cette campagne tient aussi à la logistique portuaire. « Il faut continuer à travailler pour que la logistique portuaire soit encore plus demain qu’aujourd’hui un atout pour notre filière céréalière. Cette filière est souvent citée en exemple pour son organisation, sa performance, sa fiabilité et sa capacité à s’approprier les problématiques, le plan protéines en est le parfait exemple. » Et la campagne actuelle met en lumière de nouveaux concurrents. Après avoir bataillé contre les céréales de la mer Noire, ce sont celles de la Baltique qui viennent jouer dans la cour des blés français. La faiblesse des taux de fret dans les vracs secs plaide en leur faveur, a continué le président de Sénalia. « Je pense qu’au niveau de chaque acteur de la filière, nous devons réfléchir à comment renforcer notre compétitivité et être capables de défendre notre position de premier exportateur européen de céréales. Sur le port de Rouen, nous travaillons toujours à trouver des complémentarités entre les différents silos, pour être plus efficaces. Mais pourquoi ne pas trouver des synergies au-delà du port de Rouen? », s’est interrogé Thierry Dupont pour qui, à l’export de céréales, doit venir s’ajouter celui des pratiques logistiques.