Pomelos de Floride, oranges d’Afrique du Sud, agneaux de Nouvelle-Zélande, tous ces produits déchargés à Dunkerque sont susceptibles d’être contrôlés par les inspecteurs du nouveau poste d’inspection frontalier (PIF) du Sivep, construit à proximité du terminal à conteneurs du port de Dunkerque. Inauguré le 9 octobre et cofinancé par Dunkerque Port et la communauté urbaine, ce service qui dépend du ministère de l’Agriculture vérifie l’absence de maladies ou de parasites pouvant affecter la santé humaine ou animale ou les plantes. « Nous sommes le dernier rempart avant l’entrée dans l’Union européenne », explique Adeline Croyère, chef du service national du Sivep. Ses outils: le contrôle documentaire, mais aussi des tests sur prélèvements, « selon les analyses de risque ». « Un travail primordial », résume-t-elle.
Considérées comme plus rigoureuses que leurs homologues belges ou néerlandaises, les pratiques de l’administration française sont observées avec attention par les chargeurs. « Des conteneurs peuvent être bloqués pour une virgule. Jamais la marchandise n’est en cause », s’agace ainsi le Belge Luc Van Holzaet, dirigeant de Conhexa, qui importe via Dunkerque des produits frais et surgelés. « Sur environ dix navires, seulement trois sont déchargés en France », observe Christian Choupin, de la Chambre syndicale des importateurs français de fruits et légumes frais (CSIF). « La différence est due aux variances d’application de la réglementation européenne. Elle devrait être appliquée de la même façon dans tous les ports », ajoute-t-il.
Plus d’efficacité
« Le dialogue (avec l’administration) s’améliore », constate néanmoins Christian Choupin. À Dunkerque, par exemple, le volume des contrôles des végétaux a quadruplé en deux ans. Et le nouvel équipement du Sivep, conçu pour contrôler sur un même lieu cinq fois plus de lots par an qu’auparavant, permettra aussi « plus d’efficacité », assure Adeline Croyère. L’administration « mobilise ses services dans une dynamique de développement économique du port », souligne Antoine Lebel, de la Direction régionale de l’alimentation et de l’agriculture (Draaf). « En cas d’afflux, des agents renforcent l’équipe du port pour réaliser les contrôles en un temps plus court », indique Émilie Hennebois, chef du service de l’alimentation à la Draaf. Temps moyen pour une inspection: de 24 heures à 48 heures selon le type de produits, si le dossier est apporté en amont par le transitaire.
Une partie de la réponse viendra aussi de l’harmonisation européenne. Pointées du doigt par les Français, la Belgique et les Pays-Bas (pays de transit) « ont des échantillonnages de 10 % à 20 % inférieurs à nous », note Adeline Croyère. En plus des échanges avec ses homologues européens (Hambourg, Rotterdam, Anvers, Gand…), cette dernière attend aussi de la Commission européenne qu’elle donne « ses arbitrages », « pour que le choix d’un port par les importateurs corresponde aux enjeux logistiques » et ne soit lié aux différences d’interprétation de la réglementation.
L’enjeu: rapatrier vers Dunkerque des flux d’importation. « En passant par Dunkerque plutôt que par Anvers ou Rotterdam pour aller à Rungis, on économise 400 € par conteneur en pré et post-acheminement, soit environ 50 % du coût du passage en entrepôt », avance Daniel Deschodt, directeur commercial de Dunkerque Port. Outre les grands marchés de consommation de l’Ile-de-France, le Dunkerquois pense aussi à Boulogne-sur-Mer, premier site de transformation de produits de la mer, à une heure de route.