« Civitavecchia, c’est l’avenir ». C’est avec cette formule que Pasqualino Monti, le président de l’Autorité Portuaire, résume sa vision du premier des Ports de Rome (Civitavecchia, Fiumicino et Gaeta). Situé à 90 kilomètres de la capitale, le port de Civitavecchia s’étale sur quelques deux millions de m2 de terrain.
Dès la sortie de l’autoroute, l’on aperçoit au loin les grues, les conteneurs qui forment de petits points colorés et l’on devine aussi le carré de quai dédié au charbon avec ses deux tours. En fond de toile, les silhouettes de quelques grands paquebots se dressent fièrement sur la mer. Au détour d’un carrefour, la route s’élargit et des panneaux indiquent le port, ses douanes, ses bureaux, et son emplacement croisières. Bienvenue dans le port de Civitavecchia.
Dans sa brochure, le site revendique son rôle « de leader en Méditerranée en ce qui concerne le trafic de navires de croisière avec plus de 2,5 M de passagers par an et des pointes de plus de 45 000 passagers toutes catégories confondues par jour ». Ces trois dernières années, l’Autorité Portuaire a encore mis le pied sur l’accélérateur, l’idée de Pasqualino Monti étant de faire de Civitavecchia, le site incontournable de la méditerranée. « Il y a quelques années, les activités portuaires étaient concentrées sur le trafic de passagers. Aujourd’hui, les choses ont bougé et le port a renforcé sa polyvalence, notamment avec la conteneurisation, les autoroutes de la mer, l’intermodalité, les liaisons crées entre le port et la zone de l’entre-terre. Malgré la crise, nous avons su profiter de nos atouts et élargir notre champ d’action » estime Pasqualino Monti. Profiter de ses atouts cela veut dire pour le port: renforcer le secteur conteneurs afin d’être leader dans le trafic de fruits en provenance d’Amérique latine (ananas et banane) grâce au partenariat avec l’armateur génois Cosiarma. Cela veut dire aussi: donner le coup d’envoi à la construction du nouveau terminal à conteneurs (opérationnalité prévue en 2017), qui permettra d’accueillir des unités de 18 000 EVP. Coût de l’opération: 524 M€ dont 320 à la charge d’investisseurs privés, selon les estimations de l’Autorité Portuaire .
Cela veut dire enfin: élargir le réseau des autoroutes de la mer et le trafic Ro-Ro avec le lancement en février dernier, d’une liaison directe entre Civitavecchia et les ports d’Halifax (Canada) et Baltimore sur la Côte Est des États-Unis pour le fret roulier et le transport des nouveaux modèles de Fiat Chrysler produits sur le site de Melfi dans le sud de la Botte. L’objectif est de réussir à desservir les deux ports nord-américains en moins de deux semaines grâce au déploiement de quatre navires rouliers d’une capacité de transport de 25 000 voitures. « Avec ce nouveau service, notre port deviendra rapidement le hub commercial italien par excellence » analyse Pasqualino Monti.
Le mot est lâché et l’ambition du patron de l’Autorité Portuaire clairement affichée. Mais pour mener à terme un tel projet, les idées seulent ne suffiront pas, les moyens financiers devront suivre. « Il faut créer des synergies entre les institutions et les entreprises » confie Pasqualino Monti. Le message est clair: pour concrétiser la volonté d’investissements destinés à parachever la transformation de Civitavecchia, des fonds privés et publics doivent s’ajouter aux 350 M€ débloqués par l’Autorité Portuaire. En ce qui concerne le volet infrastructures, le chapitre consacré au développement du secteur croisiériste occupe une place importante. Un volet qui s’ajoute à celui du Roma Marina Yachting inauguré il y a quelques mois et qui devrait accueillir jusqu’à 23 grands yachts de 40 à plus de 100 mètres de long.
D’ici trois ans, deux nouveaux terminaux passagers et de nouvelles zones d’amarrage au nord du port, seront construits. Montant estimé de ces deux opérations: quelques 80 M€, sans compter les probables réajustements à la hausse du coût des travaux. Dans le plan de développement du secteur croisiériste, l’organisation terroriste de l’État islamique (EI), qui rêve d’implanter un grand califat des deux cotés de la méditerranée, n’a pas sa place. « Les évènements tragiques des dernières semaines n’auront aucun impact sur le marché des croisières car les compagnies savent se retourner rapidement. Il est certain que des attentats comme celui perpétré au musée Bardo en Tunisie, sont des signaux inquiétants mais la méditerranée ne deviendra pas pour autant un territoire abandonné » assure Pasqulino Monti.
Autre point important: l’agroalimentaire. L’an dernier, le trafic de bananes et d’ananas a représenté l’équivalent de 250 000 t contre 165 000 t en 2014 et 100 000 t en 2013. L’idée pour renforcer ce secteur d’activités, est d’exploiter à son maximum le nouveau terminal à conteneurs avec ses 80 prises frigo et le terminal reefer situé sur le quai 24. Il s’agit également d’être particulièrement attentif au marché de la manutention. Une manne à laquelle le port de Civitavecchia n’a pas l’intention de renoncer. L’objectif ciblé étant d’organiser le ravitaillement des grands paquebots, des accords ont été signés en début d’année avec quelques grandes compagnies.
Au chapitre des grands travaux sur le moyen terme, le plan régulateur portuaire comprend une série d’interventions importantes. Selon la feuille de route, les travaux dits stratégiques seront terminés en 2017. Au programme: l’ouverture d’uneentrée au sud du port et la construction d’un pont mobile, l’extension du quai 13 qui servira de point d’ancrage pour les navires de croisière, la remise en ordre des quais du vieux port et la construction d’un système d’égouts pour évacuer les eaux résiduaires provenant du dépurateur directement derrière le brise-lames. « En quelques années, le port de Civitavecchia a consolidé sa croissance, les bénéfices ont augmenté, les activités se sont renforcées, ce qui a permis de grossir la masse salariale. Mais nous avons encore beaucoup de choses à réaliser » conclut Pasqualino Monti. S’étant fixé pour objectif de devenir un incontournable du secteur maritime méditerranéen et le premier port en Italie, effectivement, Civitavecchia a beaucoup à faire.