C’est un retour symbolique. Les fruits, denrée sensible, avaient déserté les bassins Est de Marseille depuis quinze ans, faute de fiabilité des opérations portuaires. Contraint de passer par le nord de l’Europe pour approvisionner le sud de la France, Canavese a signé son grand retour à Marseille le 23 mars après avoir obtenu des garanties de CMA CGM, du port et de la manutention.
Aberration économique: les bananes cultivées en Côte d’Ivoire par Canavese et destinées aux trois mûrisseries d’Aubagne, de Marseille et de Valence transitent depuis quinze ans par Anvers et Dunkerque. Aussitôt débarqués du navire, les conteneurs réfrigérés repartaient en camion vers le sud de la France moyennant un surcoût de 1 000 €.
Avec le retour de la paix sociale à Marseille, le groupe aubagnais, qui produit chaque année 50 000 t de bananes, a décidé de basculer ses flux par la route naturelle, celle du Sud.
« Les fruits ne peuvent subir des aléas et la grande distribution a besoin d’un service fiable et régulier. Nous passions par les ports du Nord. Ce n’est pas logique du point de vue économique et écologique », explique Christian Métadier, directeur général Afrique de Canavese qui a signé une Charte CO2 avec l’Ademe (Agence de l’environnement et de la maîtreise de l’énergie).
Le producteur s’engage ainsi à importer en 2015, via Mourepiane, 2 000 conteneurs confiés à CMA CGM. « Depuis l’abandon du service Diams, il y avait un chaînon manquant entre Marseille et la côte occidentale africaine. Avec des flux en croissance en sortie de Côte d’Ivoire et du Cameroun, Canavese nous a incités à revenir. Nous serons à Marseille tous les mardis mais nous avons besoin de flux supplémentaires notamment en sortie d’Europe vers l’Afrique pour pérenniser l’escale », détaille Ludovic Rozan. Le vice-président des lignes Afrique de CMA CGM avoue, pour l’instant, qu’il « ne gagne pas d’argent ».
Le transit time, de trois semaines, ne sera pas plus court par la route Sud, la trentaine de conteneurs par navire étant transbordée à Tanger avant de repartir sur le service NAF (Afrique du Nord).
Canavese ne quitte pas pour autant le nord de l’Europe puisque 60 % de la production ivoirienne alimente l’Angleterre, Dunkerque et Anvers. Après le retour des fruits et légumes d’Israël à Fos en 2014, de Canavese en 2015, le port de Marseille se plaît à imaginer que la compagnie fruitière fera de même un jour. Basée elle aussi non loin des quais, elle opère ses navires depuis vingt ans à Port-Vendres.