Disparités et développement de l’Afrique conteneurisée

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La croissance économique du continent africain est largement commentée depuis le début du nouveau millénaire. Il est bon de garder à l’esprit que moins de 5 millions de boîtes étaient manutentionnées début 2000 (hors transbordement). Et que finalement, 5 % du commerce mondial pourrait toucher les ports du continent avant 2020 si les perspectives de consommation et de production s’avèrent justes. Révélateurs fidèles de la mondialisation des échanges, les volumes manutentionnés dans les principaux ports africains en 2013 éclairent sur les disparités actuelles et les ambitions de demain (voir carte ci-contre).

En premier lieu vient l’affirmation de trois grands hubs de transbordements internationaux, aux trois points cardinaux du continent. Ces interfaces proposent de solides productivités grâce, notamment, à des niveaux d’équipements aux plus hauts standards internationaux. Les leaders de la manutention conteneurisée ancrent leur savoir-faire et leurs investissements sur ces points névralgiques qui orchestrent circulations maritimes régionales, continentales et intercontinentales. Port Saïd demeure le plus important avec plus de quatre millions de mouvements en entrée/sortie du canal de Suez. Selon JOC Group 2013, 52 mouvements par heure étaient garantis sur le plus grand port égyptien en 2012.

Les opérateurs de lignes régulières stimulent les compétitions

Tanger Med dispute dorénavant la deuxième place de grand hub de transbordement africain à Durban. Les deux ports jouissent de situations géographiques exceptionnelles à la croisée de plusieurs grandes routes maritimes continentales et internationales. Las Palmas au Nord et Ngqura au Sud taquinent dorénavant Tanger Med et Durban en proposant peu ou prou les mêmes prestations aux armements globaux et spécialisés sur l’Afrique.

Loin du jeu des grandes alliances stratégiques des routes Est-Ouest, les opérateurs de lignes régulières stimulent les compétitions entre autorités portuaires et opérateurs privés de manutention. Cross-Trade, services directs et déploiements de feeders sous-régionaux augmentent les volumes de manutention tout en exigeant de meilleures qualités de service aux escales.

Avec la croissance des volumes et l’augmentation des capacités, les places portuaires historiques comme Dakar, Abidjan ou Douala sont largement chahutées dans leur leadership. La porte sénégalaise, premier ou dernier port touché au sud du Sahara pour les services avec l’Europe, se trouve coincée entre deux logiques. La première relève des transbordements réalisés plus au nord (Tanger Med, Las Palmas ou encore Tenerife) avec des propositions géographiques, économiques et logistiques très compétitives. La deuxième constate une exacerbation des concurrences sous-régionales, notamment pour desservir Bamako et tout l’ouest Malien. Conakry et San Pedro revendiquent leurs intérêts logistiques vis-à-vis de ces trafics enclavés.

Course aux infrastructures

La crise politique ivoirienne des années 2000 a freiné l’avènement d’Abidjan comme premier hub sous-régional. Téma envisage 3,5 MEVP de capacité en 2018 pour contrer l’arrivée (tardive) de TC2 dans la course aux investissements en infrastructures. Lomé, les ports de la métropole de Lagos et, dans une moindre mesure, Cotonou, devraient aussi passer dans une autre catégorie concurrentielle avec l’avènement de terminaux capables de recevoir des navires tirant à 15 m ou même 16 m. Au moment d’écrire ces lignes, MSC modernise son service Africa Express avec des navires de 6 500 EVP en moyenne dont le Serio-Enam de 8 450 EVP qui escalera à Lomé comme unique touché du golfe de Guinée. C’est d’ailleurs dans ce carrefour géographique, à la croisée méridionale des routes Europe-Afrique-océan Indien-Asie que se localisent les plus ambitieux projets portuaires. Le géant nigérian a définitivement besoin de nouvelles capacités portuaires et les futures installations aux périphéries de Lagos devraient changer la donne concurrentielle régionale. Douala s’ankylose dans une profondeur d’eau insuffisante et une saturation quasi permanente d’un linéaire faiblement mécanisé. Même menace pour Libreville face aux ambitions de Pointe-Noire, dopé par les transbordements vers Matadi puis Kinshasa. Luanda continue d’améliorer ses performances et rivalise directement avec Pointe-Noire comme principale porte d’entrée du cône centre-sud du continent.

Sur la côte orientale, les grandes annonces portuaires laissent dubitatif (surtout celle pharaonique de Lamu et ses 10 millions de boîtes), même si les congestions de Mombasa et de Dar Es Salaam ne semblent pas vouloir trouver de solutions opérationnelles à court terme. Plus au nord, le marché éthiopien continue de nourrir Djibouti alors qu’au sud, le Mozambique espère enfin concurrencer les ports sud-africains en misant autant sur la croissance économique nationale que sur la captation logistique des flux enclavés du triptyque Zimbabwe-Zambie-Botswana. Les développements les plus avancés restent ceux constatés à Nacala et son couloir logistique qui « remonte » jusqu’aux Grands lacs.

Enfin, l’Afrique portuaire inclut aussi les rêves insulaires de l’océan Indien, parfaitement situés sur les routes avec l’Extrême-Orient. À l’instar des espoirs suscités par l’ouverture du nouveau canal de Panama aux 12 600 EVP de capacité, Madagascar, l’île Maurice et La Réunion espèrent capter une partie des dividendes des post-Panamax de 6 500 EVP, 8 000 EVP et pourquoi pas 10 000 EVP qui serviront très vite le continent africain.

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