Les chiffres donnent le tournis: ces sept dernières années, les fonds allemands dédiés au financement maritime ont accumulé des pertes vertigineuses, estimées à 10 Md€. Ce système, qui a permis à l’Allemagne de financer 5 % de la flotte mondiale et de devenir le premier pavillon en termes de porte-conteneurs, est aujourd’hui à bout de souffle. Pour de nombreux observateurs, le modèle est même « fini ». « Plus personne dans le secteur n’espère encore sérieusement lever des fonds auprès du public », confie au quotidien Handelsblatt Torsten Teichert, directeur du Lloyds Fonds, une importante maison de financement de Hambourg.
Alimentées par l’argent des épargnants, ces sociétés spécialisées achètent des navires qui sont ensuite loués aux compagnies. Seulement voilà, depuis la crise de 2008 et l’effondrement des taux d’affrètement, de nombreux navires ne sont plus rentables. Conséquence: nombre de ces maisons plongent dans les rouge et les faillites se multiplient: 450 fonds mettent la clé sous la porte, créant un vent de panique chez les particuliers qui fuient ces placements jugés désormais trop risqués.
Ainsi l’an dernier, 22 M€ seulement ont été investis dans les fonds maritimes allemands, un montant divisé par 150 depuis 2007! Pour ne rien arranger, les banques ont, elles aussi, quitté le navire. Alliées traditionnelles des fonds, elles se sont délestées d’une bonne partie de leur portefeuille maritime, notamment sous la pression de Bruxelles. Mais au-delà de ces récents déboires, certains pointent du doigt un problème structurel. De fait, les placements maritimes ont été fortement encouragés par le gouvernement allemand, à grand renfort d’avantages fiscaux. À son apogée, les fonds garantissent des rendements records: jusqu’à 14 % par an, quasiment net d’impôt. Du coup, l’argent allemand a inondé le marché et les commandes de navires se sont retrouvées rapidement déconnectées des besoins. « En provoquant d’importantes surcapacités, le système a creusé sa propre tombe », conclut le journal Manager Magazin.