« La flotte fluviale de Lafarge s’adapte à l’activité globale du groupe »

Article réservé aux abonnés

JOURNAL DE LA MARINE MARCHANDE (JMM): COMMENT S’ORGANISE L’ACTIVITÉ DE LAFARGE AVEC LA VOIE D’EAU ET LE TRANSPORT FLUVIAL?

MARCO CANCEDDA (M.C.): Traditionnellement, Lafarge exploite des ressources alluvionnaires présentes le long de la Seine et des fleuves en général. En France, Lafarge possède des cimenteries embranchées fluvial, par exemple celle du Havre. Puis, la construction des sites de production de béton est intervenue avec des implantations notamment le long de la Seine et jusqu’au cœur de Paris. L’activité de Lafarge compte ainsi non seulement des installations de fabrication de béton mais aussi des dépôts de granulats le long de la Seine. L’articulation des activités industrielles de Lafarge avec la voie d’eau et le transport fluvial est donc le résultat d’une longue tradition.

JMM: QUELLE EST L’IMPORTANCE DU TRANSPORT FLUVIAL POUR LAFARGE?

M.C.: Lafarge développe le transport fluvial pour des raisons écologiques et économiques. En effet, pour transporter des matériaux pondéreux, la voie fluviale demeure la meilleure option. C’est aussi une solution pour desservir le cœur de Paris en harmonie avec l’environnement, que Lafarge souhaite contribuer à préserver. Elle nous permet de réserver l’utilisation du transport routier de marchandises au dernier kilomètre ou à la livraison des chantiers. Tous les tonnages qui viennent de l’amont ou de l’aval de Paris par voie fluviale, ce sont autant de poids lourds en moins sur les routes alentour et dans la capitale. Il faut rappeler qu’un convoi fluvial évite environ 250 camions en moyenne sur la route; sachant qu’un convoi fluvial transporte environ 4 000 t et permet d’économiser 33 t de CO2. L’activité fluviale de Lafarge, y compris pour alimenter les usines de préfabrication de béton prêt à l’emploi, constitue aussi un moyen de faire preuve de solidarité entre les sites des clients que nous approvisionnons, nos sites urbains au cœur de Paris, nos lieux de production. Le transport fluvial permet un lien direct, un partenariat entre tous ces lieux.

JMM: QU’EN EST-IL DE L’INSERTION DES SITES INDUSTRIELS DE LAFARGE AU CŒUR DE PARIS?

M.C.: La coexistence entre l’activité portuaire au cœur de Paris et l’utilisation des berges de la Seine par la population est désormais acquise. Cette coexistence est intéressante. Pendant une période, nous avons vécu des tentatives pour repousser en amont ou en aval les activités industrielles installées de longue date tout au long de la Seine au cœur de Paris. Ces dernières années, la tendance s’est inversée. L’enjeu de cette coexistence est multiple: le maintien des activités portuaires concilié à une fonction récréative avec ouverture au public du site en dehors des heures d’exploitation, le soir et le week-end. Cette mixité des usages peut s’exprimer de manière architecturale mais aussi en termes de partage de l’espace et du temps entre les activités industrielles et de loisirs. L’industriel doit concevoir ses installations en fonction de cette coexistence. Lafarge a l’habitude de telles contraintes dans ses sites de production parisiens du fait de la présence ancienne du groupe au cœur de la capitale. Depuis longtemps, nous savons coexister avec les habitants. Aujourd’hui, la nouveauté est que Ports de Paris a marqué clairement sa volonté d’établir une telle coexistence avec nous, industriels. Les chartes Sable en Seine ont bien montré cette ambition. Et la nouvelle installation de Lafarge à Port Victor en est le dernier exemple (voir encadré).

JMM: LE GROUPE LAFARGE EST-IL CONFRONTÉ À DES FREINS DANS SON ACTIVITÉ FLUVIALE?

M.C.: La voie fluviale n’a de sens pour Lafarge que si nous avons des sites industriels de production de granulats en bordure de rivières. Dans ce cadre, il s’agit pour Lafarge de pérenniser les ressources à proximité du fleuve et faire en sorte de continuer le transport fluvial. Si les ressources s’éloignent de la voie d’eau, la rupture de charge ne permet plus de respecter les atouts économiques et écologiques du transport fluvial. Actuellement, il est très difficile d’obtenir des autorisations pour extraire des granulats en bordure de rivières, notamment en Normandie. La législation est de plus en plus contraignante. Il existe une contradiction entre le législateur qui souhaite obtenir une diversification des modes de transport, notamment pour amener les marchandises au cœur de Paris, et ce même législateur qui crée de nouvelles contraintes qui tendent à éloigner les industriels du bord de l’eau.

JMM: QUELLES SONT LES CARACTÉRISTIQUES DE LA FLOTTE FLUVIALE DE LAFARGE SUR LA SEINE?

M.C.: La flotte fluviale de Lafarge comprend 12 pousseurs et 88 barges, représentant environ 60 000 t de cale sur la Seine. Ce sont pour Lafarge des données fondamentales et importantes: notre flotte fluviale est adaptée à nos besoins. Depuis toujours, Lafarge possède l’une des toutes premières flottes de France. Le groupe est aussi le premier client de Voies navigables de France (VNF) en transportant en propre environ 4 Mt de matériaux sur la Seine. Une soixantaine de personnes est dédiée à la flotte fluviale de Lafarge dont 48 mariniers, répartis en capitaines, seconds et matelots. Ce total tient compte du personnel travaillant à l’atelier de maintenance et de réparation situé à Nanterre. Il faut ajouter une dizaine d’apprentis, qui sont particulièrement importants car ce sont les mariniers de demain. Nous avons recours à des mariniers indépendants pour le poussage et le transport en période de pointe pour ajuster les besoins de transport à notre activité. Il en va de même pour les réparations des bateaux; si nécessaire, nous faisons appel à du personnel qualifié supplémentaire. Finalement, pour assurer le fonctionnement optimal de la flotte fluviale de Lafarge, nous contribuons à faire travailler bien plus que la soixantaine de salariés du groupe dédiés à cette activité. Il est possible d’ajouter entre 40 et 50 personnes extérieures travaillant pour Lafarge sur cette activité fluviale. Le groupe participe ainsi au dynamisme économique de la filière fluviale au même titre que d’autres industriels.

JMM: QUEL EST LE LIEN ENTRE LA FLOTTE FLUVIALE ET L’ACTIVITÉ GLOBALE DE LAFARGE?

M.C.: Notre flotte fluviale évolue et s’adapte à l’activité globale de Lafarge. Il s’agit notamment d’optimiser le plus possible les flux retours entre les sites parisiens, mais aussi vers la Normandie. Par exemple, le site de Port Victor, dont le trafic s’élève à environ 200 000 t, est approvisionné en grande partie par des matériaux arrivant par la voie fluviale. Nous essayons d’y optimiser les flux retours avec l’accueil de déblais résultant de la déconstruction. Ces déblais repartent par le fleuve vers deux destinations, selon leur nature. Les matériaux inertes sont récupérés pour remblayer nos carrières. Ceux « avec une forte probabilité de recyclage » repartent par barge vers Gennevilliers pour traitement. Une fois traités à Gennevilliers, les matériaux recyclés reviennent à Port Victor par barge et sont mis à disposition en tant que nouveaux produits finis pour alimenter le marché parisien. Nous essayons de mettre en œuvre cette logique de flux retours pour chacun des sites Lafarge installés en bord de fleuve. Elle s’inscrit dans une stratégie plus large de Lafarge qui prévoit de participer à « construire des villes meilleures ». Cela signifie donner et apporter une solution globale à la construction des villes de demain, notamment en Île-de-France. Cela conduit à créer un cercle vertueux grâce au transport fluvial et la gestion des flux retours aussi bien qu’allers dans nos sites parisiens. Pour cette stratégie, le fleuve nous aide beaucoup à partir du moment où nous disposons d’installations au bord de la Seine, d’où aussi l’importance de la coexistence d’activités industrielles et de loisirs le long du fleuve. Il est important que nous soyons à proximité de nos clients, de la voie d’eau et en relation avec nos carrières. « Villes meilleures », cela veut dire non seulement des villes bien construites, bien connectées entre elles mais aussi plus agréables à vivre. Et là, le transport fluvial joue également un rôle, non seulement en tant qu’industrie mais aussi dans une optique de distraction des Parisiens, avec 5 Mt de sable amené par voie fluviale par Lafarge pour Paris Plage début juillet.

À Port Victor, Lafarge privilégie la mixité des activités industrielles et de loisirs en bord de Seine

Après un an de travaux, la seule centrale de graves de Lafarge, située le long de la Seine dans Paris, a repris son activité au premier trimestre 2014. D’un montant de 4 M€, la réhabilitation du site de Port Victor a eu pour objectif de concilier l’activité industrielle et l’accessibilité du bord du fleuve aux piétons en dehors des périodes d’exploitation. Le réaménagement a aussi été conduit de manière à diminuer les impacts des activités industrielles au cours de la journée sur les riverains, notamment en termes de nuisance sonores ou d’émissions de poussières et de CO2 lors des opérations de chargement/déchargement ou de la circulation des poids lourds. « Le site Lafarge de Port Victor s’intègre ainsi de façon optimale dans le paysage urbain » environnant, résultat d’une conception esthétique des installations, de la voirie, de l’éclairage, de la rampe d’accès, de l’aménagement du quai. La rénovation du site a été menée par Lafarge en concertation avec Ports de Paris. Implantée dans le sud-ouest de la capitale, la centrale Lafarge de Port Victor est « idéalement » située pour l’approvisionnement en graves du secteur, sachant que les matériaux arrivent par la Seine. Elle peut aussi accueillir des déblais provenant des chantiers environnants. Ces déblais sont ensuite évacués par voie fluviale. Le trafic fluvial de Port Victor oscille entre 200 000 t et 250 000 t par an.

Pré & post acheminement

Port

Boutique
Div qui contient le message d'alerte
Se connecter

Identifiez-vous

Champ obligatoire Mot de passe obligatoire
Mot de passe oublié

Vous êtes abonné, mais vous n'avez pas vos identifiants pour le site ?

Contactez le service client abonnements@info6tm.com - 01.40.05.23.15