Le port de Kribi, au Cameroun, entre dans sa dernière phase à quelques jours de l’arrivée du premier navire commercial le long de ses quais. Le 7 mars, l’appel public international à manifestation d’intérêt, initié le 13 novembre, pour l’exploitation et la maintenance du terminal en eau profonde de Kribi, a présélectionné cinq sociétés: Necotrans/KPMO, ICTSI, APM Terminals, Marsa Maroc et Sea-Invest/CLGG (Consignation et logistique du golfe de Guinée, anciennement Camship).
Grand absent de cette liste, le groupe de Vincent Bolloré. La filiale spécialisée sur l’Afrique, Bolloré Africa Logistics, avait déclaré en février 2013 avoir soumissionné pour le terminal à conteneurs de Kribi. Mais le 22 janvier dernier, le premier ministre camerounais, Philemon Niang, a annoncé dans un communiqué publié dans le journal Cameroon Tribune que ce marché était « infructueux ». Le chef du gouvernement du Cameroun a invité le groupe Bolloré à venir retirer sa soumission. Le groupe français reste toujours au Cameroun avec l’exploitation du terminal à conteneurs de Douala et l’exploitation de la ligne de chemin de fer Camrail.
La bataille pour l’exploitation de ce terminal revêt une nouvelle dimension. Avec le groupement Necotrans/KPMO d’une part, et Sea Invest/CLGG d’autre part, ce sont deux entreprises françaises qui postulent à la concession de ce terminal. Le groupe philippin ICTSI, qui ne cache pas sa volonté de s’implanter en Afrique de l’Ouest en postulant à plusieurs terminaux (notamment lors de l’appel d’offres du second terminal à conteneurs d’Abidjan), demeure un candidat intéressant pour son expérience internationale. Quant à Marsa Maroc, filiale en charge de la manutention, issue de la séparation des fonctions de l’Odep du Maroc, elle tente de se placer comme un Port of Singapore africain. Après avoir concouru aussi pour le terminal d’Abidjan, elle postule sur les concessions ouvertes en Afrique de l’Ouest et du centre. Enfin, le dernier candidat, et non des moindres, APM Terminals, est déjà en place. Il est membre du consortium en charge de l’exploitation du terminal de Douala avec le groupe Bolloré. Qu’adviendrait-il si APM Terminals se voyait attribuer le terminal de Kribi? Le jeu de la complémentarité entre les deux opérateurs des terminaux camerounais prendrait tout son sens. Le choix de cet opérateur pourrait être, pour le gouvernement de Yaoundé, une façon d’éviter une guerre assassine entre les deux ports du pays et de jouer sur la complémentarité. Le revers de la médaille serait de voir le duopole APMT et Bolloré prendre une position dominante dans les ports de l’Afrique de l’Ouest et du centre.
Si le résultat de cet appel d’offres est intéressant, les motivations du gouvernement le seront tout autant.