« Depuis une décennie, il y a un drame silencieux sur le petit gabarit fluvial européen avec une diminution de 50 % de la cale disponible, a déclaré Johan Nietvelt, coordonnateur du projet Watertruck, le 25 octobre à Paris. Si cette tendance se poursuit, la flotte sur les voies fluviales de classe I à IV va disparaître, que ce soit aux Pays-Bas, en Belgique ou en France. » Cette disparition de cale a pour conséquence qu’il existe une demande de transport sur les voies à petits gabarits qui demeure insatisfaite. Deux autres constats ont conduit à l’élaboration de ce projet: la difficulté de trouver des équipages pour opérer les unités sur les voies fluviales à petits gabarits, le manque d’investissement et d’innovation du secteur de la navigation fluviale. Selon Johan Nietvelt, Watertruck constitue un « nouveau concept de transport fluvial reposant sur un groupage de micropousseurs et de barges sur les canaux et rivières à petits gabarits et sur une exploitation journalière ». Chaque barge est conçue pour transporter jusqu’à 750 t, soit près de 3 000 t par convoi poussé de quatre unités quand l’ensemble rejoint le grand gabarit, si besoin. La principale innovation de Watertruck repose sur un travail journalier du batelier qui ne vit donc pas à bord et peut rentrer chez lui tous les soirs. Le concept introduit aussi un découplage entre le transport et le chargement-déchargement, explique Johan Nietvelt. Une ou plusieurs barges peuvent en effet servir pour du stockage au bord de la voie d’eau tandis que le pousseur est utilisé ailleurs pour du transport avec d’autres barges. Depuis le lancement de Watertruck en 2011, trois projets-pilotes ont été réalisés en Flandre. Sachant que l’Union européenne soutient le concept Watertruck par le biais d’un financement dans le cadre du programme Interreg IVB, depuis mi-2011 et jusqu’en juin 2014. Le premier projet-pilote a concerné un transport de boues déshydratées par deux barges de 250 t. Le deuxième a porté sur un transport de ferrailles (4 × 120 t) et le troisième du sel (4 × 220 t). Pour Johan Nietvelt, « la viabilité économique a été démontrée pour ces trois projets pilotes ». Un quatrième est programmé dans les prochaines semaines et concerne un transport de déchets ménagers en Belgique. Un cinquième devrait suivre.
Des flux entre plusieurs pays européens
Ainsi, Watertruck fonctionne actuellement en mode projet. Le coordonnateur cherche à démontrer la capacité du concept à redynamiser et optimiser le transport de marchandises sur les voies fluviales de classe I à IV. Pour cela, il a invité les professionnels du secteur de la navigation fluviale française présents lors de sa présentation à faire connaître les besoins de transport sur les voies à petits gabarits. « Il faut toutefois bien comprendre que Watertruck est un projet de niveau européen, a souligné Johan Nietvelt. Il privilégie les échanges de flux entre plusieurs pays, plus particulièrement les Pays-Bas, la Belgique et la France. » Il ne peut donc être mis en place pour des flux très locaux en Bourgogne ou dans le centre de la France, par exemple. Il n’est pas non plus adapté à des transports sur des voies de gabarit réduit dotées de multiples écluses. Il est aussi contraint par le manque de personnel commun à l’ensemble du secteur de la navigation intérieure. Watertruck est à la recherche de bateliers prêts à s’engager dans les projets pilotes. Enfin, « il reste plusieurs étapes à franchir pour passer du mode projet au développement du concept », a conclu Johan Nietvelt. Par exemple, les porteurs de projets sont freinés par des capacités d’investissements insuffisantes et les réticences du système bancaire à les soutenir financièrement. Une réflexion doit également être menée sur « la normalisation des tailles des barges afin qu’elles soient identiques partout où Watertruck se met œuvre ».