Pour relier l’Europe à la Chine, les opérateurs logistiques pensent tout de suite « maritime ». Un automatisme que les responsables de YHF Intermodal Logistics veulent faire tomber. Ils commercialisent une solution ferroviaire. En soi, la solution n’est pas neuve puisque plusieurs opérateurs développent depuis quelques années des liaisons ferroviaires entre la Chine et l’Europe, soit sur Anvers, soit sur Duisbourg. Depuis le 26 avril, YHF Intermodal Logistics aligne chaque semaine un train au départ de Chengdu pour rejoindre la gare polonaise de Lodz avec 41 EVP à son bord. « Nous sommes une cargo company », explique Sofiane Rachedi, président de YHF Intermodal Logistics. La décision d’emprunter la route depuis Chengdu tient surtout à la régularité. Cette ligne a essayé la route Nord depuis la Chine au travers de la Mongolie. L’essai ne s’est pas avéré concluant. Elle s’est alors concentrée sur Chengdu. « Cette ville est inscrite dans le programme Go West initié par le gouvernement chinois qui prévoit de déplacer l’industrialisation des côtes du pays vers les régions centrales. »
Pour réussir son projet, la société a développé une solution EDI pour les marchandises. « L’avantage de notre solution est de procéder au dédouanement des marchandises pendant le transfert entre la gare de départ et la frontière », continue le président de YHF. Cette société, qui a développé ce système, est l’un des principaux actionnaires de la société YHF Intermodal Logistics. Elle a développé un système de dédouanement par EDI et elle est la seule à pouvoir offrir des capacités d’entreposage tant en Europe qu’en Russie.
Depuis le mois d’avril, la société a transporté quelque 800 conteneurs sur sa liaison avec un taux de blocage insignifiant. Seuls deux conteneurs ont été arrêtés en douanes pour des déclarations fausses ou mauvaises. Avec cette facilité douanière et un transit time de 12 à 14 jours entre les deux villes, YHF propose une solution qui est davantage en concurrence avec l’aérien que le maritime. En outre, soit depuis Chengdu soit depuis Lodz en Pologne, la société offre des services pour relier ensuite les principaux centres de consommation européen et chinois. « Nous proposons un transit time de trois jours avec Pékin depuis Chengdu, et autant entre Lodz et la France. »
Outre les conditions de transport, YHF table sur la réussite de son système logistique par une réduction de coût. YHF a réalisé une étude de benchmarking avec les autres modes de transport. D’usine à usine, l’avion est dans les mêmes temps de transport mais avec un prix cinq fois supérieur. Quant au transport maritime, il est quatre fois plus long mais avec un coût bien inférieur. « Nous ne pouvons pas nous placer en concurrence avec le maritime parce que nous ne disposons pas de suffisamment de matériel pour répondre à la demande. Nous sommes plus en concurrence avec l’aérien voire les trafics en sea-air », explique Sofiane Rachedi.
La solution proposée par YHF se veut ouverte. « Nous avons un menu à la carte. » Les trains quittent la Chine et peuvent, à leur arrivée à une frontière, décharger des boîtes pour des destinations intérieures du pays.
Retour d’Europe vers la Chine
Actuellement, cette solution logistique se réalise surtout pour des trafics en sortie de Chine vers l’Europe. « Dès la fin du mois d’octobre, nous espérons charger notre premier train au départ de l’Europe pour rejoindre nos différents hubs et finalement la Chine. » La boucle est bouclée. D’ores et déjà, les gouvernements européens regardent avec attention ces premières expériences intercontinentales ferroviaires. « La solution ferroviaire a été initiée par le gouvernement allemand et reprise par celui de Moscou. Le gouvernement français ne nous a pas contactés. » Difficile de le croire à la lecture du budget du ministère tourné vers le ferroviaire. Outre ces supports, le gouvernement chinois a axé sa stratégie sur le développement de ce mode de transport. Il prévoit de construire une seconde voie, « ce qui nous permettra de gagner un à deux jours sur notre temps de transport vers l’Europe », se réjouit Sofiane Rachedi. Il reste la crainte du vol et du terrorisme dans les pays traversés. « Les problèmes de vol se font surtout à la frontière avec la Russie. Nous les avons identifiés et nous prévoyons des solutions. »
Selon un rapport récent, le transport ferroviaire entre la Chine et l’Europe devrait enregistrer une croissance exponentielle. Dans les années 2020 à 2030, il est prévu de voir circuler quelque 2 000 trains entre les deux continents. YHF Intermodal Logistics a déjà posé ses jalons dans ce marché.