Russie: identifier les besoins en nouveaux terminaux charbonniers

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Selon les statistiques publiées par le ministère russe de l’Énergie, en 2012, les exportations de charbon ont augmenté d’environ 20 % à 125,2 Mt. Cette croissance s’inscrit dans une tendance lourde. De 2001 à 2012, les exportations de charbon ont triplé. La baisse du prix du charbon sur les marchés internationaux a joué un rôle. Comparé au gaz, le charbon est devenu moins cher pour les Européens et, par conséquent, les importations de charbon ont crû en Europe malgré la crise économique. L’Union européenne reçoit quasiment les deux tiers des exportations russes de charbon. Parmi les importateurs de charbon russe préférant le transport maritime apparaissent la Chine, la Grande-Bretagne, le Japon, la Corée et la Turquie. Au cours des sept dernières années, la part du transport maritime dans les exportations de charbon est passée de 87 % à 93 %. Environ un quart (26 %) des exportations maritimes se fait par les ports de la Baltique et l’Ukraine. Les exportations russes de charbon profitent aussi aux ports russes qui voient leur part de marché passer de 57 % en 2006 à 75 % en 2012.

La croissance dans la manutention de charbon dans les ports russes de l’Est se remarque dans les ports du bassin Pacifique. Pour ces ports, le charbon intervient au même niveau que le pétrole ou le gaz. Au cours de la dernière décennie (de 2002 à 2012) le trafic de charbon a été multiplié par 2,7. Sa part dans le trafic total de ces ports est passée de 25 % à 33 %. Il ne s’agit pas d’une coïncidence. Le Japon, la Corée, la Chine et l’Inde, les principaux consommateurs de charbon, sont à l’Est, et les principales sources de croissance de ce trafic sont dans la région Asie-Pacifique. En Asie, la croissance annuelle du charbon entre 2003 et 2008 s’est élevée à 8 % par an.

Les ports orientaux de la Russie affichent les plus fortes hausses du trafic charbonnier ces dernières années. En 2012, le trafic de charbon dans les ports russes de l’Extrême-Orient a enregistré une croissance de 16 % à 6,3 Mt.

L’Europe joue aussi un rôle prépondérant pour les exportations russes de charbon et les investissements dans les infrastructures restent d’une grande intensité. Outre les ports de la Baltique, des ports comme Mourmansk, Arkhangelsk et Kandalaksha sont des points de sortie pour les exportations.

Sur l’ouest de la baie de Kola, un terminal charbonnier est en cours de construction à Lavna, pour une capacité de 18 Mt. La société est prête à démarrer les travaux et à construire une voie de chemin de fer privée. Tous les permis ont été délivrés et les travaux devraient démarrer dans le courant de 2013. En marge de ce développement, des projets d’extension du port de Mourmansk sont en cours pour voir la capacité des terminaux augmenter de 6 Mt.

En 2012, la plus forte croissance dans les exportations russes de charbon est à mettre à l’actif des ports du bassin de la Baltique avec une hausse de 20 % contre 11 % au niveau national.

Où sont les besoins?

Selon les experts, le manque d’infrastructures reste la seule barrière à la croissance pour le trafic depuis les ports de la Baltique. Comment identifier le déficit en termes d’infrastructures? Sergei Semenov, directeur du développement du cabinet Morstroytechnology, déclare: « L’approche classique se reporte sur l’équilibre entre la demande (le trafic) et l’offre (les terminaux). Cette approche est appliquée avec plus ou moins de réussite dans d’autres marchés comme les produits pétroliers ou les minéraux. » Il ajoute que pour le marché du charbon, une telle analyse ne peut fonctionner. La moitié du charbon est rechargé dans des terminaux multi-purpose. La réalité de la capacité des terminaux dépend surtout de la régularité des lignes ferroviaires, de la fréquentation par les navires et de nombreux autres facteurs. « Pour déterminer si le besoin d’un terminal se fait sentir, il faut procéder à une analyse multifactorielle intégrant les avancées technologiques et une connaissance du marché », conclue le directeur du développement. Le cabinet de consulting Morstroytechnology a prouvé que la répartition entre les différents terminaux baltes est déséquilibrée et qu’il n’existe aucune réserve de capacité.

Les installations de chargement de charbon dans les ports baltes peuvent être classées en trois catégories. La première représente les terminaux spécialisés avec des équipements spécialisés. Il en existe trois en Baltique avec une capacité de 25,5 Mt. Ces terminaux manutentionnent 44 % du charbon en sortie des ports baltes. Deux d’entre eux sont à la limite de la saturation: Rosterminalugol à Ust Luga, opérant à 98 % de sa capacité, et le Baltic Coal Terminal de Ventspils qui travaille à 80 % de ses possibilités. Le Estonian Coal terminal de Tallin demeure une exception avec aucune opération en 2012. Dans les autres bassins russes, les terminaux spécialisés enregistrent des chiffres identiques.

La seconde catégorie comprend les terminaux spécialisés dans les vracs solides. Ils utilisent des équipements pour tous les types de vracs mais traitent principalement des trafics de charbon. Cette catégorie regroupe sept terminaux qui représentent 36 % des exportations russes de charbon. Dans le bassin de la Baltique, ces terminaux entrent pour 55 % des exportations. En moyenne, ces terminaux sont à 70 % de leur capacité avec un pic pour le Riga Central Terminal qui est à 90 % de ses capacités.

La dernière catégorie de terminaux reprend les terminaux multi-purpose. Ils utilisent des équipements qui n’ont aucune spécificité et entrent pour 1 % des exportations charbonnières russes par les ports baltes.

Au final, il n’existe aucune réserve de capacité dans les terminaux spécialisés de première catégorie, et celles disponibles pour les terminaux de la seconde catégorie devraient être orientés vers le développement de nouveaux trafics.

L’infrastructure continue de se développer

En 2012, le Baltic Coal Terminal a traité 4,8 Mt. Zarechnaya Coal company, le chargeur, investisseur et propriétaire du terminal, a prévu d’investir et de porter la capacité de ce terminal à 10,5 Mt en 2014, soit plus que son doublement. C’est une tendance récurrente du développement des terminaux, qu’ils soient en Baltique ou dans d’autres bassins, d’améliorer les capacités nautiques et toucher des marchés européens comme la Grande-Bretagne et le nord de l’Espagne. Ainsi, les principaux terminaux exportant du charbon russe draguent leur chenal d’accès pour recevoir des navires de type Panamax. Dans le port d’Ust Luga, le chenal a été approfondi à 16 m. Une amélioration qui a permis au terminal d’augmenter sa capacité de traitement. En 2012, le terminal a pu charger 104 000 t sur un navire. Le Multipurpose Reloading complex, dans le port d’Ust Luga, qui traite du charbon de la Siberian Coal Energy Company (SUEK), a prévu un programme d’extension pour porter la capacité du terminal à 5,5 Mt. À l’heure actuelle, aucun investisseur ne s’est fait connaître mis à part la SUEK.

Dans le port de Vystok, le chenal a été approfondi à 12,7 m et élargi, ce qui lui permet de recevoir des navires de 80 000 t même si une partie de la marchandise doit être chargée sur rade. Certains développements de ports sont limités par les capacités des voies ferroviaires. Pour éviter ce handicap, une nouvelle voie entre Losevo et Kamennogorsk est annoncée. Elle devrait entrer en service en 2013.

Avec ces développements, les terminaux de la mer Baltique devraient augmenter de 11 Mt après 2015.

La capacité du transport ferroviaire et ses coûts sont deux facteurs cruciaux pour déterminer la compétitivité d’un terminal. Selon les données fournies par la société ferroviaire russe, des projets de construction sur le tronçon entre Losevo et Kamennogorsk, la reconstruction de la ligne Mga-Gatchina-Veymar et Ivangorod, l’accès aux ports du golfe de Finlande sont des éléments majeurs pour améliorer la desserte des ports de la Baltique. Ils sont suffisamment attractifs pour les investisseurs pour faire partie des priorités de développement des sociétés concernées par les terminaux. La politique tarifaire ferroviaire russe est en pleine restructuration. Plusieurs processus sont en train de se mettre en place. En janvier, une unification du tarif a été décidée pour l’espace commun russe. L’objectif est d’avoir un seul tarif pour les États tiers. Mais ce processus est long. Les tarifs doivent d’abord être différenciés selon le type de marchandise avant d’être unifiés.

Récemment, dans le cadre de la réforme de l’industrie et de la réduction budgétaire apportée aux transports ferroviaires, l’autorité de régulation des tarifs a publié une nouvelle réglementation par corridors, la « On Price Corridor », dans laquelle la relation entre les tarifs et les utilisateurs du transport sont désormais libres. Les chemins de fer russes peuvent alors adapter les tarifs selon les limitations imposées par l’infrastructure pour un meilleur contrôle des flux. « Tous les réformateurs de ces tarifs, y compris les idéologues des chemins de fer russes, veulent faire de leur mieux mais le coût actuel du développement sera reporté sur les chargeurs soit sous forme de hausse de tarif soit sous la forme d’un investissement dans de l’infrastructure. D’un autre côté, cela pose les bases légales d’un investissement du secteur privé dans les projets ferroviaires », analyse le directeur du développement du cabinet de consultants.

Même si le processus actuel de réforme des tarifs ferroviaires n’aura que des effets limités sur le coût direct du transport de charbon, il entraînera une volatilité du marché du transport et un redéploiement des flux de fret dans tout le réseau ferroviaire. Et enfin, le niveau de chargement sur chaque section du réseau pourrait à terme être modifié.

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