En Belgique, les acteurs économiques continuent à croire en Seine-Escaut

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La rencontre des acteurs économiques organisée par le Groupement européen d’intérêt économique (GEIE) Seine-Escaut le 17 octobre à Tournai, s’est déroulée dans un contexte particulier. Les sorties médiatiques sur le canal à grand gabarit Seine-Nord Europe (SNE) pendant l’été en France ont jeté un doute sur sa réalisation, et les acteurs économiques pouvaient légitimement s’interroger sur la réalité sous-jacente des rumeurs. La nouvelle équipe gouvernementale française a souhaité procéder à « une mission d’analyse » des grands projets d’investissement élaborés au cours des dernières années. Et SNE en fait partie (voir encadré). Il s’agit avant tout de confirmer la pertinence économique et le mode de financement des projets. Une telle décision peut se comprendre dans le contexte d’alternance politique actuelle en France. Lors de la réunion à Tournai, Carlo di Antonio, ministre des Travaux publics, de l’Agriculture, de la Ruralité, de la Nature, de la Forêt et du Patrimoine, a rappelé l’intérêt de la Wallonie pour Seine-Escaut, la volonté et l’engagement des partenaires belges par rapport à ce projet. Il a aussi indiqué que le gouvernement wallon a manifesté par écrit son soutien à son homologue français et demandé à être entendu dans le cadre de l’audit. Le GEIE Seine-Escaut compte en effet trois partenaires, la France, la Wallonie et la Flandre, par l’intermédiaire de leurs gestionnaires des réseaux des voies navigables, et la concrétisation du projet dépend notamment de la détermination commune des trois pays. Le ministre a aussi réaffirmé que, en plus du projet Seine-Escaut, la Wallonie poursuit une politique globale de développement des voies navigables et des modes alternatifs.

Préparer l’ouverture de l’infrastructure

La mission d’analyse sur SNE devrait être menée plus rapidement que celle sur les autres projets d’infrastructures. Les conclusions de cet audit devraient être connues au plus tard début janvier 2013, ce qui évite un report trop long de la signature du contrat de partenariat public-privé, initialement prévue fin 2012. La Wallonie et ses dirigeants restent toutefois optimistes et continuent à croire à la pertinence du projet qu’elle soutient activement. Il n’y a cependant pas encore une assurance totale sur la réalisation du projet SNE. L’audit aura sans doute un impact significatif sur la décision du gouvernement français. Toutes ces précisions apportées par les autorités dès le début de la rencontre ont permis de rassurer les 250 acteurs économiques présents et de faciliter les échanges sur l’essentiel: préparer l’ouverture de la liaison à l’horizon 2016 ou 2017. Les chargeurs de nombreux secteurs phares du fluvial, les ports, les sociétés actives dans le transport, la logistique, la gestion des conteneurs, etc., ont déjà intégré Seine-Escaut dans leur stratégie et planifient des investissements dans la perspective de la mise en service de l’infrastructure le plus tôt possible, affirme le SPW. Tous sont conscients des opportunités offertes par le futur canal, maillon manquant du réseau fluvial européen à grand gabarit qui va relier le bassin de la Seine à ceux de l’Escaut et du Rhin, donnant accès à plus de 20 000 km de voies navigables. Le 17 octobre, ils ont tous réaffirmé leur volonté et leur souhait d’utiliser au plus tôt ce nouvel outil. Pour le SPW, les acteurs économiques savent que la clé du succès est en partie dans leurs mains et qu’ils doivent s’organiser, planifier, intégrer ce nouveau potentiel dans une logistique qui va au-delà d’un simple transport fluvial, mais qui relève les défis de l’efficacité multimodale économique et environnementale. Les entreprises attendent des autorités des engagements sur des dates de mises en œuvre, des conditions d’exploitation viable, des conditions d’accès aux marchés, etc. « Les grands groupes détestent le flou et l’incertitude , signale Pascal Moens, directeur de la promotion des voies navigables et de l’intermodalité du SPW. Ils sont demandeurs quant au délai de décision sur la poursuite du projet une fois l’audit français terminé. Le vrai enjeu va être de continuer à tenir informé les milieux économiques sur l’avancement du projet pour qu’ils gardent tout leur intérêt pour Seine-Escaut et continuent à l’intégrer dans leurs schémas de développement. »

En France, l’heure est à la mobilisation autour de Seine-Nord

Le 29 août, Yves Gabriel, P-DG de Bouygues Construction, en marge d’une conférence de presse du groupe, a déclaré: « L’opération d’attribution du partenariat public-privé pour la construction et la maintenance du canal Seine-Nord est suspendue. » Bouygues, avec Vinci, est l’un des deux groupes retenus dans le cadre du dialogue compétitif lancé le 5 avril 2011 par le précédent gouvernement en vue de l’attribution d’un contrat de partenariat public-privé portant sur le financement, la conception, la construction, l’exploitation, l’entretien, la maintenance et la régénération du futur canal Seine-Nord Europe (SNE) et de ses aménagements connexes, dont la réalisation de quatre plates-formes multimodales. Ce dialogue compétitif devait s’achever en octobre 2012 et le contrat être signé en fin d’année. Ces délais ne seront finalement pas respectés. En effet, Frédéric Cuvillier, ministre délégué aux Transports, a reconnu le 30 août que « la communication du groupe Bouygues ne fait que confirmer les difficultés du bouclage du projet ». Il a rappelé que le coût global du projet SNE, plates-formes comprises, a été évalué en août 2009 par Voies navigables de France (VNF) à 4,3 Md€. Le plan de financement envisagé repose, d’une part, sur l’apport d’une subvention publique initiale de 2.2 Md€ et, d’autre part, sur un préfinancement du complément par le partenaire privé. Or, selon le ministre, « compte tenu du contexte financier international actuel, les candidats semblent rencontrer des difficultés à progresser sur le financement bancaire de leur partie du projet et à stabiliser des annuités acceptables par VNF et l’État. Cela nécessite d’engager un dialogue avec la Commission européenne, la BEI, d’étudier les possibilités de recours aux “project bonds” pour ce projet et de se rapprocher des collectivités publiques pour des financements complémentaires ». Dans ces conditions, « l’État a décidé de confier au Conseil général de l’environnement et du développement durable et à l’Inspection générale des finances une mission d’analyse et de proposition portant sur la faisabilité financière du projet dans le cadre de la procédure en cours d’attribution d’un contrat de partenariat. Cette mission analysera la capacité des candidats à réunir les financements privés nécessaires à la réalisation de l’opération », a annoncé le ministre. Suite à ces décisions, les élus et les acteurs économiques français ont multiplié les déclarations pour rappeler l’importance de SNE. Réunis le 14 septembre à Cambrai, « les responsables politiques et les acteurs socio-économiques territoriaux ont encouragé l’État à poursuivre la mise en œuvre de SNE et à solliciter des financements complémentaires auprès de l’Union européenne », rapporte l’Association SNE. Les participants ont aussi souligné l’importance du projet pour les initiatives économiques et les emplois pérennes qu’il crée. Fin septembre, dans une lettre adressée au Premier ministre, le président du conseil régional du Nord-Pas-de-Calais et ses homologues des conseils généraux du Pas-de-Calais, du Nord, de la Somme et de l’Oise ont « réaffirmé leur profond attachement à la réalisation du canal et savent pouvoir compter sur la détermination du gouvernement et de l’État au plus haut niveau pour concrétiser au plus vite cet ouvrage ». Mi-octobre, c’est une lettre signée par près de 150 élus des territoires qui est arrivée sur le bureau du Premier ministre: « Nous souhaitons réaffirmer notre détermination à la concrétisation de ce projet, synonyme de développement pour tout le Nord de la France. […] Lucides sur la situation des finances publiques mais persuadés que la relance de l’économie passe par la réalisation d’infrastructures comme le canal, nous sommes décidés à ne pas laisser s’envoler cette chance historique pour le pays et ses habitants. » Enfin, fin octobre, le président de la République a également eu droit à un courrier de la part de trois députés de la Somme, de l’Oise et du Nord: « Nous demandons que l’analyse du coût et du financement du canal soit faite de façon réellement objective en intégrant aussi les recettes et les gains directs ou indirects procurés par le projet. »

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