Le 31 octobre, le cabinet Price Waterhouse and Coopers (PWC), en partenariat avec Panteia, a publié son rapport sur les licences de capitaine pilote. Ce document, commandé par la Commission européenne s’inscrit dans la suite de la directive européenne FAL, sur la facilitation documentaire. Ce texte a voulu imposer l’anglais comme langue d’usage dans tous les ports européens, une proposition qui a fait bondir bon nombre de fédérations professionnelles portuaires. La directive a été adoptée sans cet article mais, dans les considérants du texte parlementaire, il a été prévu qu’une étude sur les conditions d’octroi des licences de capitaine pilote soit menée en Europe.
Les analystes ont abordé la question de ces licences sans oublier de s’attarder sur le pilotage en Europe. « L’analyse de ce rapport va plus loin. En abordant la question générale du pilotage, PWC tente de relier les questions des licences de capitaine pilote pour l’intégrer dans la directive des services portuaires », souligne Frédéric Moncany de Saint-Aignan, président de la Fédération française des pilotes maritimes. Le rapport présente les diverses réglementations attachées au pilotage. Cette activité est régie par le principe de subsidiarité, à savoir qu’elle est tributaire de lois nationales avec une déclinaison locale.
Si l’on va davantage dans le détail, les licences de capitaine pilote sont prévues dans la quasi-totalité des pays étudiés à l’exception de la Grèce, de l’Italie, de Chypre et de la Roumanie. Toutefois, aucune licence n’a été attribuée en Croatie ou en Slovénie, et très peu sont délivrées au Portugal, à Malte et en Bulgarie. Le sujet des licences de capitaines pilotes touche ainsi principalement les pays du nord de l’Europe. Sur les premières marches du podium, on trouvera la Finlande, l’Allemagne, la Norvège et la Suède.
Une licence à 462 € en Suède
Le constat des auteurs du rapport montre que le coût d’une licence de capitaine pilote peut varier, pour le gouvernement, de 60 € en Pologne à 462 € en Suède. En outre, les études menées sur un certain nombre d’accidents survenus en Europe montrent que les capitaines pilotes engendrent moins de sinistres que les navires accompagnés de pilote. De là à imaginer qu’il faille étendre les capitaines pilotes pour réduire le nombre d’accidents est une analyse réductrice. « Les capitaines pilotes interviennent dans un cadre déterminé. En France, ils peuvent faire entrer un navire dans un endroit facile d’accès du port et dans des conditions normales. Dès que les conditions ne sont plus réunies, le commandant fait appel à un pilote. Il est donc logique que le nombre de sinistres avec pilote soit plus important compte tenu des conditions de leur intervention », continue Frédéric Moncany de Saint-Aignan.
Pour le président de la Fédération française des pilotes maritimes, ce rapport aborde la question du pilotage davantage d’un point de vue économique que sous l’angle de la sécurité. « Le régime des capitaines pilotes en France est en conformité avec les prescriptions de l’OMI. Nous constatons que toutes les professions qui sont directement concernées par notre profession, à savoir les autorités nationales, les administrations portuaires, les pilotes et les capitaines de navire ont la même analyse. Les licences de capitaine pilote ont un régime qui fonctionne bien. » Le rapport expose les positions de la Croatie, de l’Estonie et de la Roumanie qui se montrent favorables à l’ouverture de ce régime. La dernière n’a pas de régime national, quant aux deux premières, elles utilisent très peu ce système.
Pour pousser l’analyse jusqu’au bout, PWC aborde aussi les conditions du pilotage depuis la terre. « Il s’agit d’un outil et non pas d’une alternative à la présence à bord d’un pilote », rappelle Frédéric Moncany de Saint-Aignan.
Le choix de la langue revient au pays
Enfin, pour revenir sur la langue utilisée dans les ports, les exigences linguistiques sont le plus souvent décidées nationalement. En France, il est demandé aux capitaines pilotes de disposer d’un minimum de connaissance de vocabulaire maritime français pour certains ports. Dans le port de Calais, par exemple, les capitaines britanniques peuvent utiliser leur langue, « mais cela parce que la tradition locale le permet. La langue française n’est pas un frein à ces licences », ajoute le président de la FFPM. La France se positionne en effet à la quatrième place des pays ayant délivré ce type d’agrément. D’autres régimes sont plus sévères. Ainsi, en Allemagne, les connaissances linguistiques sont plus rigoureuses.
Le secrétaire général de l’organisation européenne des ports, Espo, Patrick Verhoeven, reconnaît les informations importantes de cette étude. « Nous en reconnaissons l’importance pour le secteur maritime et plus particulièrement pour le short sea. Si un régime commun des licences de capitaine pilote peut être utile au niveau européen, il doit se cantonner aux grandes lignes plutôt que d’essayer de régenter ce régime dans les détails. »