C’est un outil indispensable pour l’avenir du port du Havre. Les travaux de la plate-forme multimodale située au pied du Pont de Normandie battent son plein. Les opérations de terrassement menées ces derniers mois par le Grand port maritime du Havre (GPMH) permettent désormais de discerner les contours du terminal qui associera fer, fleuve et route. Sa mise en service est prévue pour le second semestre 2014. La plate-forme devrait traiter annuellement 125 000 UTI (unités de transport intermodal). Situé à proximité de la réserve naturelle de l’estuaire de la Seine, le terrain se trouve sur une zone dite sensible du point de vue environnemental. La société d’investissement Le Havre Terminal Trimodal (LH2T), maître d’ouvrage, et le GPMH ont voulu prendre en compte ce facteur. Nous avons rencontré Pascal Galichon, chef du service environnement du GPMH et Sylvain Chauvaud, directeur de TBM, la société chargée de la coordination environnementale sur le chantier.
JMM: COMMENT S’EST DÉROULÉ LE TRAVAIL EN AMONT?
SYLVAIN CHAUVAUD: Nous avons la particularité de bien connaître ce territoire, ses enjeux et ses espèces. Le GPMH et le maître d’ouvrage se sont engagés dans une démarche environnementale avant le chantier. Il a fallu remettre à plat toutes les contraintes. Un document de préconisation environnementale a été inscrit dans le cahier des charges des entreprises intervenantes.
PASCAL GALICHON: Du point de vue environnemental, ce chantier constitue un nouveau pas par rapport au passé. Des études d’incidences ont été préalablement menées. Pour la construction de Port 2000, nous avons déjà pris en compte cet aspect. Mais l’enjeu était un peu différent. À Port 2000, une partie de l’espace a été gagnée sur la mer, ce qui n’a pas posé de souci particulier de ce point de vue. Sur les autres zones, nous avons mis en place une surveillance ornithologique assurée par la Maison de l’Estuaire. Mais la démarche était moins systématique qu’aujourd’hui. Dans un chantier comme celui-ci il y a forcément un impact, mais nous avons voulu travailler le plus proprement possible. Un ingénieur de TBM est constamment sur le chantier de la future plate-forme. Tout cela a un coût, mais nous l’assumons.
COMMENT SE CONCRÉTISE LA PRISE EN COMPTE ENVIRONNEMENTALE?
SYLVAIN CHAUVAUD: Le rôle de TBM est un rôle de coordinateur environnemental. C’est un métier relativement nouveau en France. Aujourd’hui sur le chantier, nous avons autant de poids qu’une commission hygiène et sécurité. Notre pouvoir est relativement fort car il y a des règlements préfectoraux à respecter. À partir du moment où une entreprise a été retenue via l’appel d’offres, elle doit désigner un référent environnement qui déclinera un plan d’assurance environnement (PAE). Notre rôle est d’examiner ce plan et de le valider. Nous aidons les entreprises à le rectifier si besoin. L’entreprise doit s’engager à respecter le PAE. Notre ingénieur Marie-Anne Gulielmi est présente sur le terrain pour faire respecter ces engagements. Elle participe à toutes les réunions de chantier. Elle a également une mission d’information en collaboration avec le GPMH. Généralement, les choses se règlent rapidement. Il peut s’agir de la pose d’un panneau de balisage, par exemple. Il n’y a aucune initiative sans notre accord. Nous avons même le pouvoir d’arrêter le chantier si cela s’avère nécessaire. Un ornithologue vient en plus effectuer des inspections régulières. Un livret d’accueil est remis à chaque nouvelle entreprise intervenante pour rappeler les enjeux, les informer sur la flore et la faune notamment les oiseaux, les crapauds. Parfois, les entreprises sont un peu surprises par ces démarches, mais elles s’acclimatent rapidement. Les contraintes, ce sont souvent des mesures de bon sens. Un des défis, c’est que les oiseaux ne viennent nicher sur le site, car certaines espèces qui sont rares aiment nicher sur des espaces sableux.
PASCAL GALICHON: Nous pouvons citer un exemple concret. Le GPMH a eu pour mission d’effectuer des travaux de terrassement. Ils ont été menés avant le 15 mars, car après cette date, nous entrons dans une période de nidification des oiseaux. Un jour, nous avons dû sécuriser une zone sur laquelle des hirondelles de rivages se sont installées. Le site est une zone humide. Pour les batraciens qui sont relativement nombreux, nous avons installé des crapoducs. Des kilomètres de chaînettes ont également été mis en place pour délimiter les zones sensibles.