« La logistique urbaine se définit comme l’art d’acheminer dans les meilleures conditions les flux de marchandises qui entrent, sortent et circulent dans la ville », introduit le Centre d’analyse stratégique (CAS), dans une note d’analyse publiée début avril. La logistique urbaine doit prendre en compte des composantes multiples et diverses comme les contraintes foncières, d’espace, de congestion, économiques, environnementales, etc. Elle peut représenter jusqu’à 20 % du prix du transport global et est à l’origine de nombreuses émissions polluantes, continue le CAS. Cette institution d’expertise et d’aide à la décision placée auprès du Premier ministre rappelle que « ce thème a fait l’objet de nombreuses réflexions depuis quarante ans. Mais force est de constater que les pistes de solution explorées ne sont que très partiellement mises en œuvre, en raison probablement de leur coût, ce qui doit conduire l’ensemble des acteurs concernés à trouver de nouvelles solutions pour un transport durable des marchandises en ville ». Dans sa note, le CAS présente plusieurs exemples de logistique urbaine. Le premier est la solution de Monoprix, lancée en 2007 et fondée sur l’acheminement de marchandises par train des entrepôts de Combs-la-Ville et Lieusaint à une plate-forme située à la halle Gabriel-Lamé de Paris-Bercy. En 2011, ce sont 120 000 t de marchandises qui ont été ainsi transportées, soit 200 000 palettes. Le CAS cite aussi une expérimentation de transport fluvial menée depuis le début des années 2000 pour livrer des fûts de bière, des produits frais et congelés dans le centre-ville d’Utrecht. La logistique urbaine peut aussi tirer profit des lignes de tramway. Depuis 2004, à Zurich, un tram-cargo est dédié au ramassage de déchets électroniques, électriques et d’encombrants. À Paris, une expérience a été menée en 2011 avec la circulation d’un Tramfret à vide deux fois par jour entre deux rames de voyageurs; aucune suite n’est pour l’instant envisagée. Et là repose bien toute la difficulté des projets de logistique urbaine: des expérimentations nombreuses, mais jamais un déploiement conséquent.
Un guide national
Pour dépasser cette situation, le CAS formule trois propositions. La première est de créer une concertation entre tous les acteurs concernés afin de dégager des pistes d’action qui seraient compilées dans un « guide national sur la logistique urbaine », destiné aux élus locaux, aux services techniques des collectivités, aux entreprises. La deuxième proposition du CAS est de « donner toutes les compétences nécessaires aux autorités organisatrices de transport urbain pour coordonner les actions liées au transport de marchandises et permettre aux entreprises de transport de voyageurs d’assurer aussi du transport de fret ». Enfin, le CAS suggère de lancer un « appel à manifestation d’intérêt » portant sur des pratiques innovantes dans la livraison des marchandises en ville et s’appuyant notamment sur la voie d’eau et le chemin de fer, sur la mutualisation des plates-formes logistiques ou sur la combinaison de solutions mixtes voyageurs/marchandises.
Vers une expérimentation de CMDU à Lille
Fin mars, le projet de centre multimodal de distribution urbaine (CMDU) de Lille a fait un pas vers une expérimentation grandeur nature. Les Ports de Lille, la CCI Grand Lille, Generix Group, le MIN de Lomme, TLF et Veolia Propreté se sont associés officiellement au sein du GIE-CMDU « pour concevoir, développer et expérimenter dès 2013 des services nouveaux de logistique urbaine et de transports de marchandises en ville au travers d’un CMDU ». Ce dernier devrait être situé à proximité du centre-ville de Lille et utiliser les infrastructures des Ports de Lille. Il devrait recevoir des marchandises par la voie d’eau, par la route ou par train. Avec le CMDU, les transporteurs vont mutualiser, organiser et optimiser les tournées de livraison de marchandises avant de distribuer ces dernières au sein de l’agglomération lilloise. Ces tournées devront aussi privilégier les modes « doux », notamment des véhicules électriques. Les membres fondateurs du GIE-CMDU précisent que « le transport de marchandises en ville est l’un des grands enjeux des collectivités qui doivent gérer des équilibres fragiles, à savoir proposer à la population des conditions de vie agréables tout en permettant aux citoyens de disposer de points de vente et de commerce de proximité correctement achalandés ».