La période des vœux va de pair avec des discours parsemés de messages. À cette occasion, les directions des ports d’Anvers et de Zeebrugge ont abordé des sujets assez sensibles. Plaidoyer est ainsi fait en faveur d’une coopération entre les ports maritimes de la Flandre pour combattre les tendances à l’hégémonie du port de Rotterdam, surtout dans le domaine des conteneurs. En 2010, Anvers et Rotterdam ont traité ensemble autant de boîtes que le concurrent néerlandais. Par contre, en 2011, Rotterdam a inscrit à son compte 1 MEVP de plus, alors que la seconde Maasvlakte n’est pas encore opérationnelle. Le président du port de Zeebrugge, Joachim Coens, plaide pour l’élaboration d’une stratégie d’ensemble impliquant la concentration de tous les atouts pour faire face à cette concurrence. Cet objectif est certes logique, car s’il est possible d’éviter qu’un des deux ports perde un service régulier ou ne puisse attirer un nouveau service, il est préférable que l’autre s’emploie à faire offre, ceci plutôt que de laisser partir ce trafic à Rotterdam. Sujet sensible, car en dépit des bonnes intentions et des propos de circonstances, Anvers et Zeebrugge, même si certains manutentionnaires sont engagés dans les deux ports, sont concurrents et ont chacun des atouts très valables. Zeebrugge, qui à l’avantage d’être en bordure de mer, a été le premier à traiter les ULCS de 15 500 EVP de Mærsk Line et il s’avère maintenant que ce type de navire est accessible à Anvers. Le port scaldien a l’avantage de coûts logistiques terrestres moins élevés puisque plus proche des marchés. L’un comme l’autre se doivent de mettre leurs atouts en évidence, mais c’est finalement le marché et les armements qui décident… ce qui depuis peu n’est plus aussi évident. Les récentes rationalisations qui marquent l’évolution des alliances et autres groupes d’armements font que des armements se retrouvent soudain dans des ports qu’ils ne fréquentaient pas. Par exemple, l’apparition de MSC à Zeebrugge dans le cadre de ses VSA avec CMA CGM. Toujours face à Rotterdam et sa seconde Maasvlakte, tant Anvers que Zeebrugge ont l’avantage d’avoir de la capacité terminale en réserve à l’échelle d’ULCS, mais ont aussi des installations qui sont soit déjà amorties, soit en grande partie.
En ce qui concerne plus particulièrement le port côtier belge, les responsables insistent pour un désenclavement fluvial rapide et ce pour plusieurs raisons. Le rail, qui fait l’objet d’importants développements en matière d’infrastructures locales, ne pourra pas faire face seul au développement des trafics. D’autre part, la navigation d’estuaire n’est pas une alternative pour la navigation fluviale à grand gabarit. La direction du port insiste pour qu’une décision rapide soit prise par l’autorité flamande, ce qui implique des investissements dans le cadre d’une vision à long terme. Il est impératif que la flotte fluviale européenne puisse avoir accès au port. Dans les faits, il s’avère que l’adaptation du canal de Schipdonk a accusé du retard. Selon le ministre flamand responsable, les résultats d’une étude devraient être soumis prochainement au Parlement flamand, ce qui permettra de débloquer le dossier. Mais il faudra encore réaliser les études environnementales. L’impatience des Zeebrugeois est compréhensible, d’autant plus que le port vient de bénéficier de la venue prochaine en direct d’un second service asiatique de Mærsk Line
Le gouvernement flamand aura-t-il les moyens financiers nécessaires?
Face aux trois ports belges que sont Anvers, Gand et Zeebrugge, le gouvernement flamand aura-t-il les moyens financiers nécessaires pour assurer les déve- loppements projetés? La mise en place d’un nouveau gouvernement fédéral belge, s’inscrivant dans le cadre d’une réforme globale de l’État, implique une redistribution des compétences vers les Régions, qui vont devoir elles aussi veiller à respecter un équilibre budgétaire et, partant, réduire l’endettement.
Le financement (près de 690 M€) d’une très grande écluse donnant accès à la zone portuaire de la rive gauche à Anvers est assuré. Le port d’Anvers intervient pour 25 %, et des banques pour une majeure partie. Toutefois la question peut se poser: le gouvernement flamand aura-t-il les moyens financiers nécessaires pour rembourser, via la « sa Infrastructure Flandre », les banques qui interviennent? Idem pour le projet de grande écluse à Terneuzen (on attend toujours la décision) que réclame Gand (630 M€ dont 75 M€ pour le port et 140 M€ pour les Pays-Bas). Zeebrugge, en dehors de son désenclavement fluvial, devrait remplacer l’écluse Visart (580 M€). En dehors des écluses s’ajoutent d’autres projets d’infrastructures portuaires et fluviales. Les moyens financiers pourront-ils suivre ou les ports seront-ils contraints de faire preuve de réalisme?