« Cap à l’Ouest », pour la première fois de son histoire, la place portuaire marseillaise s’est donné rendez-vous sur Fos. À l’invitation de Marseille-Eurofos, l’organisme de promotion portuaire mené par la CCIMP, l’UMF et le GPMM, 150 professionnels se retrouvent pour une soirée dans le bâtiment du PIF, juste en face du terminal conteneurs de Fos-Graveleau où deux navires sont traités. « Là où se gagne la compétition avec nos concurrents », soulignera plus tard Jean-Claude Terrier. La nouveauté du lieu, à moins que cela soit la solennité de moment, fige un peu les participants pour cette réception de rentrée parmi lesquels on relève, exceptionnelle, la présence d’une délégation de dockers CGT. Le directeur du GPMM évoquera une certaine « morosité dû au fait que les signes de la reprise économique et de la croissance des volumes s’inscrivent en pointillés ».
Marseille-Fos a donc tourné la page de la réforme portuaire. Mais la nouvelle page reste à écrire. « La réforme est un point de départ, non d’aboutissement », rappellera Jean-Claude Terrier aux professionnels réunis. Les chiffres du trafic de l’été n’ont pas été trop bons. L’effet réforme ne s’est pas manifesté. Fin août, le trafic cumulé s’est inscrit à la baisse (− 2 % avec 58,54 Mt). Beaucoup comme Dirk Becquart ne misent plus sur des retombées de la réforme pour cette année. Le directeur du développement du GPMM met ses espoirs dans le lancement de Fos 2XL: « Nous ne devrions pas avoir d’amélioration notable avant que les nouveaux terminaux soient en place en janvier-février. »
Pourtant, les opérateurs ne cessent de vanter l’intégration plus que réussie des personnels du GPMM; 414 portiqueurs et mainteneurs auront basculé dans le privé. Même au terminal de Mourepiane, haut lieu de la contestation CGT, les irréductibles se montreraient plutôt satisfaits. « Si on avait su avant… », a confié un portiqueur à Michel Henry, directeur général d’Intramar. Sur Mourepiane, au Med Europe Terminal, Intramar a dû embaucher une dizaine de mainteneurs pour mettre à niveau les quatre portiques, des électrotechniciens dont les contrats de travail ne reprennent ni le salaire, ni le statut d’assimilé docker de leurs homologues arrivés de l’établissement public.
Toujours sur les bassins Est, l’activité roulier, qui concentre 70 % des effectifs dockers de Marseille, a connu un meilleur été avec un renouveau du trafic sur la Corse. « La coopération des trois sociétés (Intramar, Marseille Manutention et Socoman) qui ont fondu depuis le 1er février dernier leurs moyens généraux et l’organisation du travail dans Roro Marseille n’est pas étrangère à la chose », affirme Charles Émile Loo à la sortie du premier conseil d’administration de la nouvelle entité où il s’est réuni avec ses pairs Farid Salem (CMA CGM) et Philippe Van de Vyvere (Sea Invest).
Marseille-Fos sera au top des conteneurs
Sur les bassins Ouest, l’intégration des personnels GPMM est aussi une réussite et une centaine de dockers ont été embauchés. Si Stéphane Stamatiou n’est toujours pas convaincu que « la réforme soit une révolution pour les ports français », le responsable des dockers CGT de Fos attend que « la génération XL sorte de terre » et offre « un port moderne qui permette de jouer dans la cour des grands ». Un avis que partage Jaap Van der Hoogen, directeur de l’agence marseillaise de CMA-CGM: « Je donne rendez-vous dans deux ans. Marseille-Fos sera alors au top des conteneurs, au niveau – sinon au-dessus – des ports de Barcelone et de Gênes. » Plus terre-à-terre, Georges Chapus, le patron manutentionnaire de Seayard, veut d’abord gagner la bataille de la vallée du Rhône: « Seulement 50 % des marchandises transitent par Marseille-Fos, il faut rapidement élargir notre hinterland. » Ainsi que les dessertes routières et ferrées, rajoutent Raymond Vidil pour la CCIMP et Hervé Balladur pour l’UMF. « Ces dessertes sont tout juste dimensionnées pour les trafics d’aujourd’hui », avertit ce dernier.
La communauté portuaire marseillaise se retrouve ainsi entre les pointillés des incertitudes présentes et les visions XL d’un avenir attendu.