Le nombre de commandes de navires neufs a bondi à 125 Mtpl en 2010 contre 34 Mtpl l’année précédente, soit une hausse qui place cette année dans des ordres de grandeur comparable à celles du boom des années 2003-2008. « Une réelle surprise pour de nombreux observateurs », note le rapport BRS de 2011 qui place 2010 au quatrième rang dans les annales. Les livraisons sont en augmentation avec 149 Mtpl, soit 30 % de hausse. Le tiercé de tête demeure identique avec la Chine en première position, suivie par la Corée puis le Japon. Les chantiers européens et ceux du reste du monde se partagent 8 % du gâteau. Une tendance majeure au cours de cette année a été la disparité en termes de prix de construction des navires d’un pays à l’autre, mais aussi entre chantiers d’un même pays. La chute des prix de la construction depuis la mi-2008 d’environ 30 % à 45 % s’est prorogée sur les premiers mois de 2010. Si, à la fin de l’hiver 2010, des chantiers ont réussi à faire admettre une hausse de 10 %, de nouveau, en fin d’année, le coût de construction a rétrogradé. Dans ce contexte et avec un marché plutôt orienté sur l’aspect « acheteur », les armateurs ont privilégié « les chantiers établis, assurant une qualité et une bonne exécution des contrats ».
Avec les prémices de la reprise économique, les observateurs ont tablé sur une augmentation du prix. Il n’en a rien été et la crise de la construction navale ne s’est pas éteinte avec la fin de la crise économique. Les annulations de commande ont continué à 640 navires à fin 2010 contre 700 à fin 2009. Ce sont principalement des vraquiers (227 unités), des pétroliers (174) et des porte-conteneurs (94).
Dans ce marché hésitant, BRS a enregistré une douzaine de fermetures de chantiers en Europe, Chine et Corée. D’autres ajustent leur production à l’image de Mærsk avec le chantier d’Odensee et de Mitsubishi HI dans la région de Kobé.
La Chine demeure le premier pole mondial de construction navale avec le carnet de commande le plus élevé (185 Mtpl, soit 39 % de parts de marché), des livraisons qui ont presque doublé à 62 Mtpl et un carnet de commandes de 57 Mtpl. Premier constructeur naval, la Chine a aussi accumulé le plus d’annulations avec 284 navires. L’empire du Milieu investi dans ce secteur et prévoit de construire sept autres cales géantes, confortant son rôle de leader, soutenu par les armements domestiques.
Les chantiers coréens se placent au deuxième rang avec un carnet de commande de 144 Mtpl, une part de marché en baisse de 0,9 % à 34,6 %, des livraisons de 46 Mtpl et un carnet de commandes de 43 Mtpl. Pour la première fois, la Corée cède sa place à la Chine sur le nombre de livraisons et de commandes. Un recul qui a été amorti par un soutien massif des autorités et des banques, indique BRS.
Quant au Japon, il se replie pour la troisième année consécutive avec 77 Mtpl en commande, une part de marché de 17 %, des livraisons qui ont porté sur 32 Mtpl et des commandes pour 17 Mtpl. La parité entre le yen et le dollar a joué en leur défaveur.
Quant à la zone européenne, leurs carnets de commande se vident. La faute de l’Asie, avancent certains chantiers européens, qui accusent les banques et les autorités locales d’aider ce secteur. Pire, l’Europe est attaquée sur ses niches comme l’offshore et les navires à passagers. C’est à l’Est que les meilleures réussites apparaissent, notamment sur la Roumanie et dans le cadre de la privatisation des chantiers croates. En 2011, quelque 211 Mtpl devraient être livrées auxquelles il faut retirer les retards, annulations et autres reports. S’agissant des annulations, le rapport BRS estime que le rythme des années 2009 et 2010 devrait se confirmer en 2011. « Le paysage de la construction navale n’a cessé d’évoluer. Il devrait continuer sa mutation et confirmer définitivement l’hégémonie asiatique sur le monde ».