Créé en 1905 à Lyon, JST Transformateurs vend à EDF trois transformateurs électriques de forte puissance qui doivent être installés dans le réacteur EPR de Flamanville, village situé à 25 km à l’ouest de Cherbourg; le vendeur ayant la charge de l’installation de son matériel. Dimensions: 8,45 m (L) × 4,30 m (l) et 3,91 m (h). Après appel d’offres, l’opération de transport et d’installation est confiée à Geodis projets SAS. Patrick Jacquot, directeur adjoint exploitation projets, gère le dossier dont les premières études remontent à 2005.
La grande aventure commence en début d’année. Grâce à une remorque à 16 lignes, les transformateurs sont amenés l’un après l’autre au port fluvial Édouard Hériot, à Lyon, où ils sont stockés sur des sortes de chandelles. Le 10 février, une grue à treillis louée pour l’occasion commence le chargement du Dan-Fighter, fluvio-maritime danois de 64,34 m de long à cale unique. Le Viking descend le Rhône, passe Gibraltar, salue Flamanville et Cherbourg… en route vers Rotterdam.
Échouage et déchargement en Ro-Ro…
La route ne permet pas le transport de ce type de colis à Flamanville depuis Cherbourg, explique Patrick Jacquot. EDF a donc fait construire une rampe Ro-Ro à Diélette, petit port de plaisance à marée, situé à moins de 2 km du site EDF de Flamanville. En d’autres termes, les colis lourds doivent arriver sur un moyen de transport capable à la fois de s’échouer et de décharger en Ro-Ro. Seule solution, le ponton. Le Dan-Fighter est donc arrivé le 26 février à Rotterdam. Le 28, le transbordement direct sur le ponton est réalisé par la bien nommée grue flottante Matador. Un saisissage très solide est opéré sur le ponton, même si ce dernier n’est pas autorisé à naviguer par tous les temps: il doit rester à l’abri dès que le vent est supérieur à 5 beaufort ou que la hauteur significative des vagues dépasse les 4 m. Le 1er mars, la fenêtre météo est bonne: une navigation d’environ 50 heures peut commercer grâce à un remorqueur de haute mer. L’attelage arrive devant Diélette dans la nuit du 3 au 4, la marée haute étant à 7 h 45. Venu de Southampton, un remorqueur portuaire à faible tirant d’eau doit amener le ponton dans l’axe du plan incliné. Il n’y a plus qu’à attendre la marée basse et à espérer que tout se passe vite et bien. En effet, la préfecture maritime de la Manche-mer du Nord n’a autorisé la fermeture du port que pour une seule marée. Concrètement, cela veut dire qu’il faut décharger dans la même marée les trois transfos avec trois jeux de remorques automotrices multidirectionnelles.
Après désaisissage, l’opération commence à 10 h et se termine à 15 h en présence de tout le monde: le client, l’acheteur, le commissionnaire de transport, l’assureur, l’expert, les autorités, etc. Mais le plus long reste à venir. Si les transfos sont arrivés sur le site de la centrale vers 17 h 30 le 4, leur installation définitive devrait être terminée vers le 25 mars. Il faut notamment les redresser car ils ont été transportés couchés. Basculer 278 t nécessite une certaine technicité. Une technicité fort utile dans un autre dossier, celui du pharaonique projet ITER, situé à St-Paul-lez-Durance. Une bonne partie des grands noms du transport de colis lourds dans le monde serait en train de s’arracher les cheveux pour répondre à un appel d’offres particulièrement « gratiné », à en juger par les commentaires recueillis anonymement. En mai prochain devrait être désigné l’heureux commissionnaire de transport. Il devra, entre 2015 et 2017, acheminer des masses allant jusqu’à 429 t depuis Nagoya, Rotterdam, ou Shanghai, entre autres. Nous y reviendrons.