Telle est la conclusion qui ressort de la 12e Conférence sur les services mondiaux de lignes, tenue à Londres les 12 et 13 avril. Les taux de fret se sont en effet redressés sur toutes les routes. Toutefois, l'offre de transport reste déséquilibrée avec 8-9 % de la flotte mondiale de porte-conteneurs actuellement désarmée, l'influence significative du slow steaming et des livraisons représentant environ 47 % des navires en commande.
Selon son directeur des opérations Morten Engelstoft, l'armement danois Mærsk Line a subi une perte de 2 Md$ en 2009, contre un bénéfice de 585 M$ l'année précédente, et a vu son trafic baisser de 13 %. Cependant, il reste le premier dans le monde avec 15,8 % de parts de marché, devant MSC avec 11 % et CMA CGM avec 7,6 %. Une reprise s'est manifestée dans les premiers mois de l'année: + 15 % pour les importations américaines avec + 2 % sur les ventes au détail; + 4 % pour les importations européennes et 0 % pour les ventes au détail. Mais cela devrait diminuer tout au long de l'année. « Une bonne partie de ce que nous avons vu a servi à reconstituer les stocks », a précisé Morten Engelstoft pour qui la reprise des taux reste « frêle ». Cette année, les compagnies de lignes peuvent espérer « au mieux équilibrer leurs comptes ».
Changements anticipés
Adam Raschid (Sony Supply Chain Solutions) a souligné comment l'extrême volatilité des taux de fret a perturbé la stratégie budgétaire et tarifaire de son entreprise. En conséquence, depuis avril, Sony a remplacé les contrats annuels à taux fixes par des contrats annuels avec des révisions trimestrielles des taux. « C'est un changement considérable », a-t-il précisé.
Richard Mitchell, directeur commercial chez APM Terminals, anticipe une reprise annuelle de 5-6 % des trafics de conteneurs, avec de grands écarts régionaux. L'Asie et, dans une certaine mesure, le Moyen-Orient devraient dépasser la norme. « Dans les prochaines années, a-t-il ajouté, APM Terminals va se concentrer sur les marchés émergents, où nous constatons le plus d'opportunités de croissance et qui devraient être les premiers à connaître des reprises qui dépasseront les pics de 2008 ».
Le commandant Gerry Wang, directeur général de la compagnie canadienne de location de conteneurs Seaspan Corp, craint que la crise « n'ait pas été assez longue ni assez profonde » pour assurer un réel infléchissement et débarrasser le transport maritime des commandes spéculatives de ces dernières années. Il s'attend à ce que, à l'avenir, de plus en plus d'armements dépendent de moins en moins de navires affrétés, notamment les « chevaux de trait » de 4 250 EVP, 8 500 EVP et 9 600 EVP auxquels recourt Seaspan Corp.
Enfin, le financier Peter Shaerf (AMA Capital Partners) évalue le carnet mondial de commandes de porte-conteneurs à environ 70 Md$, dont 50 % restent à financer. À titre indicatif, les fonds allemands d'investissements de navires (KG) ont levé 871 M€ en 2009, contre 3 Md€ l'année précédente. Peter Shaerf prévoit des « insolvabilités significatives ». Selon lui, les chargeurs vont de plus en plus dominer les services de lignes: « l'argent est roi, mais la marchandise est impératrice! »
Boskalis réduit sa flotte
La compagnie néerlandaise de dragage Boskalis va désarmer seize navires cette année. Elle le justifie par les perturbations du marché: moins de travail et des pressions accrues sur les marges. Les commandes se limiteront à des navires spécialisés comme les poseurs de pipes.Par ailleurs, la direction a confirmé la reprise de la compagnie de remorquage et de sauvetage Smit Rotterdam, que ses actionnaires ont acceptée à 95 %. Pour Boskalis, l'année 2009 a été exceptionnelle: son chiffre d'affaires a augmenté de 100 M€ à 2,2 Md€ et son carnet de commandes a atteint 2,9 Md€. Son bénéfice net est passé à 228 M€ contre 249 M€ l'année précédente, chiffre qui incluait un gain exceptionnel de 35 M€ sur des actions de Smit que Boskalis possédait déjà.