Lors de sa 59e réunion tenue récemment au siège de l'Organisation mondiale du travail, à Genève, le comité spécialisé dans la sécurité (International Safety Panel) de l'International Cargo Handling & Co- ordination Association (ICHCA) a consacré un temps certain à un problème qui préoccupe à la fois les manutentionnaires et les transporteurs maritimes.
Le communiqué de l'ICHCA souligne donc qu'il y a aujourd'hui une forte préoccupation relative aux déclarations inexactes des poids des marchandises empotées dans les conteneurs. Et le comité spécialisé souhaite rappeler que les chargeurs et les groupeurs ont l'obligation de fournir une information exacte. « Quoique l'étendue du problème ne soit pas exactement connue, le rapport sur le MSC-Napoli (probablement celui de la MAIB ; ndlr) indique clairement que si le poids réel d'un certain nombre de conteneurs chargés en pontée est sous-déclaré, la stabilité et même la sécurité du navire peuvent être affectés. Le MSC-Napoli transportait un nombre considérable de conteneurs dont le poids avait été sous-estimé ». Les 70 experts formant le comité spécialisé estiment que les chargeurs doivent être pleinement conscients de leurs obligations et que, idéalement, c'est au moment du booking que le poids réel doit être enregistré par la compagnie.
En outre, les terminaux et les transporteurs « devraient décider ensemble » s'il est besoin de vérifier le poids des conteneurs, et si oui, comment. Certains ont suggéré qu'un certificat de pesage accompagne le conteneur dès qu'il rentre sur le terminal ; d'autres, que son poids soit vérifié sur le terminal par un moyen ou un autre. Le comité a « très clairement déclaré que la meilleure solution au problème serait trouvée par la chaîne de transport elle-même ».
L'autre grande catégorie de déclarations inexactes concerne les marchandises classées dangereuses. Depuis la mise en oeuvre du 34e amendement du code IMDG, au 1er janvier dernier, les salariés « terrestres » doivent être obligatoirement formés au traitement de ces marchandises, rappelle le comité. Cela passe, en premier lieu, par la formation des salariés des chargeurs et la vérification de la réalité de cette formation. Le comité recommande à l'ICHCA de rappeler ces vérités premières dans ses newsletters.
D'autres thèmes ont été abordés durant cette réunion en matière de manutention de conteneurs, sécurité d'exploitation des grues, cargaisons de bois chargés en pontée ; etc. Une présentation des principales conclusions du programme Lashing@sea relatif aux réels efforts subis par les grands porte-conteneurs a également été faite aux gestionnaires de terminaux (JMM du 29/1/2010 ; p. 11).
Les deux autres réunions annuelles du comité spécialisé dans la sécurité ont lieu à Casablanca le 28 avril et au Japon dans la seconde moitié d'octobre.
peut-il s'autoréguler ?
Le poids réel des conteneurs est une antienne que l'on chante depuis des années sans résultat évident : CMA CGM-Otello (en février 2006), Annabella et MSC-Napoli (les deux en 2007), parmi les cas les mieux documentés. Affirmer que la meilleure solution viendra de la chaîne de transport est une proposition pour le moins surprenante, à en croire quelques anciens chefs de ligne conteneurisée.
« Durant plus de dix ans, j'ai demandé à tous mes agents de faire réaliser des sondages concernant les poids réels des conteneurs, explique l'un d'eux. On m'a toujours répondu que cela est commercialement désobligeant vis-à-vis du chargeur. Alors les bords se débrouillaient, comme ils pouvaient ».
Interrogé à ce sujet, à la suite des « découvertes » faites par la Maritime Accident Investigation Branch lors de son enquête sur le MSC-Napoli, un « grand » manutentionnaire français expliquait « anonymement » qu'il avait proposé à ses clients armateurs de mettre en place une chaîne de pesage automatique dès l'arrivée du conteneur plein sur le terminal. Ils trouvèrent cette initiative très intéressante, surtout si elle ne devait générer aucun frais supplémentaire pour le transporteur. Le manutentionnaire n'insista pas. Il se contenta de vérifier que le dispositif qui protège ses portiques contre les surcharges fonctionnait correctement. Ce n'est pas en 2010 que les transporteurs maritimes sont prêts à accepter facilement des hausses de coûts de passage portuaire.
Sans accident majeur, il est hautement improbable que transporteurs et manutentionnaires trouvent les moyens de suppléer les carences de certains chargeurs.
En Europe, pour limiter la concurrence entre places portuaires, il serait, semble-t-il, judicieux que la Commission européenne s'attaque, elle-même au problème et force les États membres à agir de façon coordonnée et homogène. Mais les conteneurs ne sont pas tous chargés en Europe tant s'en faut.