Une diminution qui affecte principalement les minerais. Ils perdent 40 % de leur volume à 7,7 Mt. Le charbon suit la même tendance avec une diminution de 37 % à 8.1 Mt. « En 2009, nous avons connu une année difficile avec la crise économique, a commencé Martine Bonny, présidente du directoire de Dunkerque Port. Le ralentissement de la sidérurgie a lourdement touché nos trafics de vracs solides. » Les premiers signes de redressement se sont manifestés dès le second semestre. Fin juin, les minerais ont affiché une perte de 67 %. Sur la seconde moitié de l’année, ils ont rattrapé leur retard. Ce schéma s’est reproduit sur le charbon. « Nous observons que les trafics de minerais et de charbon des ports d’Europe du nord sont dans la même situation. Rotterdam, Anvers et Gand suivent cette orientation. » Les autres vracs solides se sont calqués sur les minerais. Au total, les vracs solides perdent 35 % à 22 Mt. Les vracs liquides ne sont pas mieux lotis. Avec une diminution de 16 % à 10,8 Mt, tous les flux de ce poste s’affichent en négatifs. Les importations de brut diminuent de 29 % à 4,1 Mt et les raffinés s’étiolent de 8 % à 7 Mt. Il faut alors se tourner vers les marchandises diverses pour trouver un bilan plus positif. Si ces produits perdent 6 % à 15,1 Mt, ils prennent une part de marché sur les trafics totaux. En effet, En 2008, les marchandises diverses ont représenté 27,7 % du trafic global. Elles entrent pour 33,5 % en 2009. Le trafic roulier a bien redressé la situation au cours des mois. Il termine l’année avec une diminution de 2 % à 12,4 Mt. Au premier semestre, le roulier affichait une baisse de 7,9 %. Quant aux conteneurs, leur retrait est de 1 % à 212 000 EVP. « Un niveau qui frôle celui de 2008. Le point positif de ce courant se remarque sur les conteneurs pleins dont la progression est en hausse de 7,5 % », a souligné Martine Bonny. Les boîtes en entrée se maintiennent à 108 000 EVP alors que les expéditions perdent 2 % à 104 000 EVP. « Nous n’avons pas à rougir de ce score. Les autres ports nord européens ont subi la crise comme nous. Rotterdam affiche une perte de 10 %, Anvers, perd 16 % et Le Havre voit son trafic diminuer de 10 %. Seul le port de Zeebrugge est en progression dans les conteneurs sur notre range », a analysé la présidente du directoire. Le trafic conteneurisé semble parti sur sa lancée. « Nous avons su démontrer notre savoir-faire sur les fruits avec le trafic de bananes depuis les Antilles. Nous le déclinons sur d’autres destinations », a continué la présidente du directoire. En effet, depuis plusieurs semaines, l’armement marocain IMTC a ouvert une ligne depuis Agadir sur le port septentrional pour exporter les fruits et légumes du sud Maroc. Fort de ces premières opérations réussies, ce fut au tour de Mærsk de venir récolter les fruits de ce savoir- faire avec sa nouvelle ligne WAF 6. En provenance d’Afrique de l’ouest, les navires de l’armement danois importent dans le nord de la France, les bananes et ananas depuis le Cameroun et la Côte d’Ivoire. Un dernier projet a longtemps tenu en haleine les opérateurs de Dunkerque. L’armement Van Uden devait ouvrir une ligne depuis Almeria pour des exportations de fruits et légumes. « Van Uden n’a pas jeté l’éponge. Nous sommes toujours en négociation mais la saison est maintenant terminée. Nous devons attendre la prochaine récolte pour envisager un démarrage », a expliqué Daniel Deschodt, directeur commercial du port.
Le trafic conteneurisé est largement inscrit dans le projet stratégique présenté par la direction du port dans le cadre de la réforme portuaire. Ainsi, l’arrivée de lignes comme Sea Shipping Line, en remplacement de Bank Line pour la desserte des îles du Pacifique sud mais aussi la montée en puissance des escales du service FAL 3 de CMA CGM sur l’Extrême Orient et le feeder de MSC ont démontré de cette tendance à renverser les données traditionnelles du trafic dunkerquois. « Notre stratégie se développe autour de deux axes majeurs dans ce secteur, a indiqué Daniel Deschodt. Le premier vise le short sea, dans le sens du transport maritime à courte distance, l’autre axe concerne le transbordement. » Dunkerque veut se positionner comme un point nodal conteneurisé aux confins de la Manche et de la Mer du Nord. En parlant de transbordement, Dunkerque ne se place pas dans la course des « hubs portuaires » mais plutôt comme point d’interconnexion entre différentes lignes. Quant au « short sea », le port imagine développer des lignes avec les pays proches en Europe comme il l’a déjà fait sur la Russie avec l’armement Samskip. Il n’en demeure pas moins que le port souhaite conserver sa position de port d’hinterland avec un marché à desservir.
La fermeture programmée de la raffinerie des Flandres
Le changement de la structure des trafics pourrait s’en trouver affecter dans les prochains mois avec l’annonce, par Total de la fermeture de la raffinerie des Flandres. Installée dans la circonscription portuaire depuis plusieurs années, cette raffinerie devrait fermer dans les prochains mois, selon les dernières informations données par le groupe Total. Elle représente 10 Mt par an de trafic. La présidente du directoire a insisté sur les dommages collatéraux de cette fermeture. « La baisse d’activité de la raffinerie signifie une baisse des droits de port et des recettes domaniales pour le port. Du côté de la communauté portuaire ce sont les services comme le pilotage et le lamanage qui vont être touchés, tout comme les agents consignataires de navires. Toutes ces professions risquent de perdre entre 10 % et 12 % de leur chiffre d’affaires. Nous ne pouvons pas accepter d’entrer dans une spirale infernale par une diminution de la voilure. » Si Dunkerque voit son pétrole se tarir, le projet d’implantation de terminal méthanier sur le site du Clippon, à l’entrée du port ouest, est toujours d’actualité. Le groupe Total se dit même prêt à y participer.
Les minerais et le charbon, trafic majeur de ces dernières années à Dunkerque, devraient connaître des jours meilleurs. La remise en marche des hauts fourneaux de Lorraine et de la sidérurgie est un élément significatifs qui plaident pour une augmentation sur les prochains mois de ces trafics.
Dunkerque dispose aussi d’un atout dans sa manche avec la logistique. Seul inconvénient, la crise est aussi passée par là. La logistique des produits frais est en pleine expansion mais celle des produits secs souffre. Le port offre aujourd’hui 130 000 m2 d’entrepôts dont une grande partie est vide en raison des modifications de logistique d’opérateurs. « Avec la crise, les logisticiens ont vu les offres augmenter. Nous avons toujours un atout de poids avec les prix. Nos bâtiments sont moins chers au m2 qu’en Grande Bretagne. Nous devons axer notre stratégie sur une position de base arrière logistique du Grand Londres, à l’image de ce que nous faisons pour le charbon et les centrales thermiques de la Tamise », a souligné Martine Bonny. Pour se faire, le port septentrional mise sur le ferroviaire. Déjà, le port a confié la gestion du réseau ferré portuaire à Eurotunnel. Une offre qui était techniquement plus performante, ajoute un responsable du port. Le développement du ferroviaire passe par une densification des dessertes de l’hinterland. En 2010, le port envisage la création avec la SNCF de deux navettes, l’une vers Strasbourg, l’autre sur le sud est parisien. La première doit offrir un débouché portuaire aux boissons alsaciennes (bière Kronenbourg et jus de fruits), l’autre doit desservir les grands entrepôts de la région parisienne et offrir une alternative aux autres ports. De plus, Dunkerque regarde attentivement le marché britannique. Il procède actuellement à des études pour la desserte de la région des Midlands en coopération avec un opérateur ferroviaire. Pour parfaire ce projet, il porte devant la Région le dossier de l’électrification de la ligne Calais Dunkerque, « qui nous permettra une meilleure liaison avec le Tunnel. »
Le fluvial n’est pas oublié
La réforme portuaire de 2008 impose d’accroître ce mode dans les pré et post acheminements. Cette année, le fluvial a souffert de la conjoncture. Si Dunkerque mise sur ce mode, les responsables du port s’interrogent sur l’avenir du canal Dunkerque Escaut. La faible hauteur des ponts handicape le transport de conteneurs. Alors, quand les échéances de Seine Nord se rapprochent, le port veut anticiper. « Nous avons un risque de voir des conteneurs nous passer sous le nez à cause des ponts du Dunkerque Escaut », indique un responsable portuaire. Pour les vracs ce paramètre n’entre pas en ligne de compte. Le port mise sur la coopération avec le Port de Lille pour prendre des parts de marché. «Nous menons une étude conjointement filière par filière pour examiner les potentiels de trafic et de plates-formes », continue Martine Bonny.
Ces projets et ces perspectives de développement du port doivent mener vers une nouvelle progression des trafics, selon la direction du port. Les investissements, représentant 46,3 M€ doivent participer au rebond du port.
Une réforme portuaire de dix ans
« L’année a été difficile mais nous avons su la surmonter », a rappelé Martine Bonny, présidente du directoire. Franck Gonsse, secrétaire du syndicat CSOPMI, a été plus loin. « Nous avons vécu des moments difficiles mais nous avons su maintenir la continuité. nous avons évité le chômage partiel et les licenciements. Nous avons optimisé les heures de travail avec la signature d’un accord de partage des heures de travail. » Depuis 1999, les terminaux de minerais et de conteneurs sont sous commandement unique. Une réforme avant la réforme qui a su faire ses preuves. Le port n’est pas pour autant exempté de mettre en place les nouvelles instances du port. Jean-Luc Vialla, président du conseil de surveillance, a rappelé les grandes dates de cette réforme en 2009. « La dernière phase doit maintenant se dérouler pour le transfert de personnel et d’outillages. » L’avis de la commission nationale d’évaluation a accepté tous les dossiers. Le seul terminal qui demeure orphelin est celui des aciers. Il a subi une diminution de 50 % de ses trafics qui ne devraient pas revenir de suite. Le plan stratégique prévoit de nouveaux investissements. Dunkerque pourrait donc redevenir le port qui embauche des jeunes dans la manutention, l’exception française.