La réforme portuaire est loin d'être finie. Engagée depuis 16 mois par le gouvernement, l'Unim a dressé un bilan des chantiers accomplis et appelé au « passage à l'acte. » Le président de l'organisation patronale, Christian Paschetta a été clair sur le sujet. « Il nous faut consolider ce travail que nous avions qualifié l'an passé de véritable refondation, afin de réaliser ce qui au total, constitue de notre point de vue le but ultime de cette réforme : le développement des ports français, celui des entreprises et l'emploi de ceux qui y travaillent. »
Dans son exposé sur le rapport annuel, le délégué général de l'organisation a dressé le bilan des chantiers accomplis au cours des derniers mois. D'abord, le volet législatif est achevé depuis le 4 juillet 2008. « Un chantier rondement mené par les pouvoirs publics », confirme Christian Paschetta. La loi rationalise les rapports entre le public et le privé. Le 30 octobre, un accord-cadre a été signé par les partenaire sociaux (à l'exception de F.O.) qui détermine les conditions de détachement des personnels portuaires et les cessions d'outillage. C'est le chantier social qui s'ouvre maintenant avec les modalités pratiques du commandement unique, revendication phare de l'Unim. Ce chantier social est double. Il engage aussi la mise en place de la convention collective unique. Un dossier qui avance. En juin, un document a été signé par une partie des partenaires sociaux sur le champ d'application, le droit du travail, le droit syndical. D'autres points sont encore à négocier comme la rémunération, la classification. « Nous sommes en passe d'aboutir sur ce volet », a confié le président de l'Unim. Sur le temps de travail, « un élément important de cette convention collective », a continué Xavier Galbrun, délégué général de l'Unim, les négociations sont en cours. « Cette convention unique ne sera pas la somme des deux », a souligné Christian Paschetta qui souhaite que le document soit finalisé pour le 31 décembre. S'il reste des éléments, ils pourront être apporté en annexe.
Le passage à l'acte
Enfin, le dernier volet de cette réforme concerne l'outillage portuaire, « celui du passage à l'acte ». Il vise à transférer les outillages des mains de l'autorité portuaire aux manutentionnaires. Mené lors de négociations de gré à gré, le transfert de l'outillage a pris du retard en raison du décalage dans l'adoption des projets stratégiques « eux-mêmes impactés par le temps nécessaire à la mise en place des organes de gouvernance. » Au-delà de ces négociations se pose la question essentielle du prix, le « juste prix », comme le rappelle le président de l'organisation. Il existe un déficit chronique de l'activité de l'outillage portuaire a continué le président de l'Unim, estimé aux environs de 45M¤. « Une situation due à un système d'organisation générale des ports qui a conduit à un fort surdimensionnement des outils qui est à l'origine de ces pertes structurelles. Or la surcapacité des ports les conduit naturellement à chercher à transférer plus d'outils que nécessaire afin d'éviter des problèmes à caractère social. La formule de Dominique Bussereau : personne ne sera laissé sur la route s'est traduite le plus souvent dans les faits par : tout le monde doit être transféré. » Alors, le président ne veut pas que la réforme se reporte sur les entreprises par un surplus de charges. « Auparavant nous payions 100 pour la location d'un outil. Demain, avec la réforme nous ne voulons pas payer plus mais nous absorberons le déficit structurel de l'outillage portuaire qu'avec un développement des trafics. » Il a aussi profité de cette revendication pour contrer les positions de la FNPD CGT. La crise économique et la réforme sont indépendantes l'une de l'autre. « Les entreprises ont aménagé leurs systèmes de production face aux réductions de trafic. La seule façon d'aggraver la crise est de se lancer dans des mouvements sociaux contre productifs. » La réforme portuaire est donc maintenant au milieu du gué. Elle a encore des étapes à franchir avant de produire ses effets. « Le moment est venu pour chacun de s'approprier le dispositif mis en place », a demandé le président de l'Unim. Le temps de la mise en oeuvre de la réforme est arrivé. Il a cependant mis en garde tous les intervenants à cette réforme. « Il ne faudrait pas que la large place laissée au dialogue social dans le processus de réforme ne vienne, en lui-même, retarder la mise en pratique de ces nouvelles règles dans le concret. Voire même, de risquer de remettre en cause des piliers de la réforme. » La part laissée à la négociation ne doit pas aboutir à une réécriture de la loi par la voie conventionnelle. Et pour expliquer cette position, Christian Paschetta cite Paul Valéry, « tout progrès charrie avec lui la nostalgie de ce qu'il nie. »
Rejeter la revanche sociale
Un autre chantier est encore ouvert, celui de la confiance. « Il nous faut reconstruire la confiance », a appelé le président de l'Unim. Une confiance qu'il veut avec tous les acteurs des entreprises en rejetant « toute arrière-pensée rétrograde de revanche sociale. » Une confiance avec les autorités portuaires dans le nouveau rôle de promoteur de la place portuaire, aménageur d'espace et gestionnaire du domaine public, dans une logique de landlord. Et enfin, la confiance des clients du port, armateurs et chargeurs. La réforme, selon Christian Paschetta, n'a d'autre objectif que de rendre les ports français plus efficaces. « Le commandement unique ne plaidera pas de lui-même la cause des ports français. Encore faudra-t-il en apporter la démonstration et le faire savoir dans des démarches proactives d'une clientèle qui sera, à n'en pas douter, très courtisée au sortir de la crise. »