Le Rhin, colonne vertébrale du transport fluvial en Europe, n'est pas épargné par la crise. Il semble même atteint de scoliose. Ses trafics accusent un repli de 1,7 % sur l'année. Un chiffre d'autant plus significatif puisque sur le premier semestre, la navigation rhénane enregistre une progression. La baisse s'est ressentie dès les mois d'octobre et de novembre.
Le charbon moins touché
Les volumes transportés par la cale sèche accusent une diminution de 2,5 %, avec surtout un second semestre en recul de 5,2 %. Le secteur agricole a été moins affecté par la crise. Il affiche une baisse de 2,4 %. C'est dans l'industrie sidérurgique que la crise s'est fait ressentir le plus durement, selon le rapport annuel de la CCNR. Dès le mois d'octobre, ce secteur a vu ses trafics se ralentir avec une amplification dans les premiers mois de 2009. Le charbon a suivi la même tendance avec cependant une diminution moins forte que les produits sidérurgiques. Seule exception dans ce flot de pertes, les matériaux de construction ont réussi à tenir la vague et affichent une hausse en 2008. Quant aux conteneurs, dont la progression n'a cessé sur la dernière décennie, ils enregistrent pour cette année une régression de 5 %. La baisse a été d'autant plus dure au second semestre que sur les cinq premiers mois de 2008, le trafic conteneurisé a affiché une progression.
La cale citerne a enregistré des évolutions atypiques. Les produits chimiques, qui représentent environ le tiers des transports citerniers rhénans, accusent un repli. A contrario, les produits pétroliers ont profité d'une hausse de la demande due à la baisse du prix du baril.
Avec les premiers mois de 2009, la courbe des trafics globaux ne s'est pas redressée. Même les matériaux de construction qui ont réussi à se maintenir à la hausse, sont maintenant passés dans le rouge. Les produits pétroliers ont une probabilité à demeurer dans le positif en raison de l'hiver rigoureux en Europe et de stocks à des niveaux bas.
Insolvabilité des transporteurs
Ces conditions économiques se ressentent lourdement auprès des transporteurs. La baisse de la demande en transport ne s'est pas accompagnée d'une diminution des charges d'exploitation, des coûts d'entretien et de réparation. Ainsi, selon la CCNR, le coût moyen des soutes a été de 28 % supérieur en 2008 par rapport à l'année précédente. Sur les premiers mois de 2009, le prix constaté est inférieur de 40 % mais les compagnies négocient leurs contrats de soutage annuellement, ce qui n'a pas d'effet immédiat. Quant à la demande de transport, elle s'est infléchie sur la seconde moitié de 2008, après un premier semestre réalisé dans des conditions optimales. « Les recettes de la navigation rhénane atteignent actuellement un niveau mettant en danger la pérennité d'un certain nombre d'entrepreneurs », note le rapport annuel de la CCNR. Les banques jouent le jeu et proposent de différer les remboursements des emprunts mais avec un bémol puisqu'elles se montrent réticentes au financement de nouveaux investissements.
Enfin, avec la croissance soutenue du fluvial sur les dernières années, les compagnies ont largement investi. En 2008, ce sont quelque 300 000 tpl entrés en service dans la cale sèche et 120 000 tpl pour la cale citerne. La conjugaison de la baisse de la demande en transport et de l'arrivée de cette cale créé une surcapacité endémique sur le réseau rhénan qui pourrait mettre plusieurs années à se résorber. Pour anticiper au mieux le retournement de situation, les donneurs d'ordre auprès des chantiers ont annulé bon nombre de constructions neuves. Quant à la cale construite en Asie et en cours de transport vers l'Europe, elle voit leur mise en service reportée en raison de la conjoncture.