Tout reste à faire désormais... Le projet stratégique du Grand port maritime du Havre (GPMH) a été adopté tout récemment par le Conseil de surveillance. Présenté par Laurent Castaing, le président du Directoire, le document a obtenu neuf voix en sa faveur. Quatre membres du Conseil s'y sont opposés, un s'est abstenu. Trois des dix-sept membres n'ont pas siégé lors de cette réunion décisive, qui engage le deuxième port français vers un horizon dont la ligne est fixée à 2015. Cette année-là, Le Havre devra avoir atteint la barre des 6 MEVP, contre 2,5 l'an dernier. D'ici là, le port normand aura également réaffirmé sa place dans le domaine de la diversification des approvisionnements énergétiques, avec la construction du terminal méthanier d'Antifer. Il aura porté la part des transports massifiés ferroviaires, fluviaux et par cabotage à 20 %, en attendant de parvenir à 25 % cinq ans plus tard, en 2020, confirmant ainsi que la vraie bataille du transport maritime se gagne désormais... à terre ! En 2020, l'objectif de trafic avec l'hinterland terrestre devrait atteindre 3,6 MEVP sur un total de six millions.
Le projet stratégique havrais comporte plusieurs volets. Dont un, majeur, consacré aux investissements. Une enveloppe de 700 Me est inscrite sur la période 2009-2013. Elle devrait permettre de financer plusieurs projets d'envergure, comme l'allongement du Grand canal (200 Me) permettant de mieux connecter le port avec l'axe Seine (le débat public débutera après l'été), la troisième phase de Port 2000, le chantier multimodal (ouverture en 2012), ainsi que la modernisation des terminaux à conteneurs, notamment dans le port aval. D'autres projets sont à l'étude, comme le doublement de l'écluse François-Ier et la construction de la future écluse fluvio-maritime à Port 2000.
Pour couvrir ces investissements « structurants », le port du Havre table sur « la conduite à son terme du Contrat de plan Etat-Région 2007-2013 d'un montant total de 623,8 Me, dont 434 Me pour la période 2009-2013 ». Autre source, les 262 Me du Plan de relance. Le GPMH va également solliciter auprès du gouvernement une subvention de 65 Me dans le cadre du Plan de relance des ports.
L'autre grand volet du projet stratégique concerne, bien entendu, la main d'oeuvre et le détachement vers le secteur privé. Sur les 1500 agents du port, 640 sont aujourd'hui concernés par cette disposition qui, bien que conforme à l'accord-cadre du 30 octobre 2008, continue de susciter une très forte crispation entre la direction du port et la CGT, qui la semaine passée, a observé un mouvement de grève de 24 heures et manifesté au pied du siège du port pendant la réunion du Conseil de surveillance. « L'application de la réforme va générer un sureffectif de cent personnes », reconnaît Laurent Castaing. Des mesures d'accompagnement individuel, mais également des dispositions liées à l'âge seront mises en oeuvre et « prises à notre charge », ajoute le président du Directoire. « Personne ne perdra son emploi dans le cadre de cette réforme », explique Laurent Castaing. « Nous sommes dans une situation où les syndicats veulent revenir sur l'accord qu'ils ont signé en octobre. Nous avons du mal à comprendre », explique Gilles Fournier, le président du Conseil de surveillance.
Personne ne perdra son emploi
Pour la CGT, le détachement du personnel portuaire vers le privé tombe au plus mauvais moment puisque les entreprises de manutention et les futures filiales de maintenance doivent faire face à la crise et aux baisses de trafic (- 21 % sur les conteneurs depuis le début de l'année). « Mais on peut mettre la crise à toutes les sauces, ajoute Gilles Fournier. Nous sommes dans une compétition exacerbée. Les ports du nord de l'Europe peuvent absorber de nouveaux trafics et s'ils les absorbent vraiment, l'emploi au Havre sera détruit de façon durable ». Comment sortir de cette impasse désormais ? Le jour de l'adoption du projet stratégique, aucun nouveau rendez-vous de concertation entre la direction et la CGT n'était programmé.