Les effets de la crise financière

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Le Baltic Freight Dry Index, moyenne des prix pratiqués sur 24 routes mondiales de transport de vracs secs (minerai de fer, métaux, ciment et céréales), est très exposé aux économies des pays asiatiques émergents, surtout la Chine. Il a connu une baisse record en 23 ans d’existence avec 2 990 points le 2 octobre, soit 75 % de moins qu’en mai. Le Baltic Panamax Index (7 routes surtout pour les céréales) est tombé à 2 102 points le 1er octobre, chiffre le plus bas depuis février 2006. Le Baltic Dirty Tanker Index (11 routes de pétrole brut) a clôturé à 1 464 points le 3 octobre, contre 1 585 points une semaine auparavant. Enfin, le Baltic Clean Tanker Index (5 routes de produits pétroliers raffinés) a fini à 1 369 points le 3 octobre, contre 1 585 points le 26 septembre.

Ces chutes ont effrayé les investisseurs et fait s’effondrer les cours des actions des armements d’Asie. Ainsi, celles de Mitsui OSK Lines (Japon), Cosco (Chine) et Neptune Orient Lines (Singapour) ont perdu au moins 50 % de leur valeur depuis les taux de fret records en mai. Le trafic de conteneurs entre l’Asie et les États-Unis est tombé à un niveau jamais atteint et celui entre l’Asie et l’Europe au plus bas depuis 15 ans, d’après le courtier britannique Drewry. Il a constaté un ralentissement considérable dans les trafics de conteneurs de produits manufacturés d’Asie vers l’Europe et les États-Unis ainsi que des faillites d’importateurs de meubles, indicateur clé des exportations asiatiques. John Kearsey, directeur chez le courtier maritime Simpson, Spence & Young renchérit: « Nous assistons à un manque collectif de confiance, dans le transport maritime et une variété de secteurs, qui constitue un frein à l’activité. De nombreux importateurs, maisons de commerce et affréteurs ont pris une attitude d’attente qui pourrait avoir exagéré la vitesse de la baisse. »

Pour la Deutsche Bank, les chutes des divers Baltic Freight Index résultent de la diminution de la demande d’acier de la Chine en raison de ses stocks de minerai de fer, d’une moindre demande mondiale de charbon, du désengorgement des ports et de la croissance de l’offre de transport, car moins de navires sont envoyés à la démolition. Selon les experts, la croissance de la flotte mondiale, modérée aujourd’hui, devrait accélérer en 2009 et encore plus en 2010, exerçant une plus grande pression sur les taux de fret. Ainsi, la banque américaine d’investissements Goldman Sachs prévoit des moyennes du Baltic Exchange Dry Index de 8 498 points sur toute l’année 2008, 5 099 en 2009 et… 2 719 en 2010!

Crédits plus difficiles

La difficulté d’accès aux crédits, due à la crise financière, aura un effet sur les projets d’expansion des armements. Les plus touchés seront ceux qui transportent des vracs. Selon l’un d’entre eux, Safe Bulkers Inc, des chantiers sud-coréens et chinois ne pourront livrer un certain nombre de navires et les petits armements ne pourront plus financer leurs commandes. Quand les conditions de crédit étaient bonnes, il leur suffisait de déposer 20 % du prix du navire, mais aujourd’hui ils auront du mal à trouver le reste. De plus, les analystes financiers ont noté que les garanties bancaires commencent à se raréfier, laissant des cargaisons abandonnées sur les quais, faute de liquidités pour assurer leur distribution. Toutefois, début octobre, les chantiers n’avaient annoncé que peu d’annulations de commandes. « L’inquiétude quant à un déclin possible des commandes et l’instabilité du marché sont exagérées, estime Lee Jae-kyu, analyste chez Mirae Asset Securities, mais les chantiers chinois et les joueurs de deuxième division devraient avoir des difficultés à engranger des commandes, en raison des conditions plus strictes de financement des navires. »

Enfin, d’après la banque d’investissements Dahlman Rose, le resserrement du crédit pourrait inciter certains pays d’Asie à réduire leurs dépenses d’infrastructures (routes, chemins de fer, ponts et aéroports) pour renflouer leurs institutions financières.

Europe-Asie: l’horizon s’assombrit

Une étude publiée en octobre par ASX Alphaliner tire la sonnette d’alarme. Les trafics entre l’Europe et l’Asie plongent.

La croissance de la demande ralentit, indique l’étude. L’augmentation des volumes transportés par les armements membres de la conférence FEFC (Far East Freight Conference) est passée de 17 % en 2007 à 3,3 % sur les sept premiers mois de l’année dans le sens Asie-Europe. En sens inverse, les chiffres affichent une diminution de 4,4 %. Parallèlement, la capacité offerte a augmenté de 14 % depuis septembre 2007 à une nuance près, mais de taille, le volume de transport proposé stagne depuis le mois de mai. Cette stabilisation de l’offre pourrait être la réponse à la baisse de la consommation. Elle ne suffit pas. En effet, les résultats des armements au cours du troisième trimestre montrent une baisse significative du taux d’utilisation. Il est passé de 97 % à 92 %, soit son niveau le plus bas depuis 2003. L’auteur de l’étude s’alarme en comptabilisant les prochaines entrées en service des nouveaux navires. 640 000 EVP de capacité devraient arriver d’ici à la fin de 2009. AXS Alphaliner estime que 60 navires de 6 000 EVP à 9 000 EVP seraient en trop si la demande continue de stagner.

Les armateurs ont trouvé une alternative à cette baisse de la demande en ralentissant la vitesse des navires. Un moyen qui permet aussi d’économiser sur les soutes. Cette décélération des navires a permis d’absorber un trop plein de 110 000 EVP et la liaison entre l’Asie et l’Europe est passée de 8,2 semaines en moyenne à 8,7 semaines.

Que va-t-il se passer sur les prochains mois? Le trafic de conteneurs doit augmenter de 12 % en 2009 pour absorber le volume des nouveaux navires en cours de construction dans les chantiers, note l’étude. Ralentir encore les navires peut permettre de résorber entre 80 000 EVP et 90 000 EVP. Le passage de la liaison entre les deux continents de huit semaines à neuf semaines signifierait une réduction des coûts fixes. Un service assuré par des unités de 8 000 EVP économiserait quelque 48 M$, un chiffre ramené à 38 M$ lorsque le coût des conteneurs est intégré.

À cette économie morose vient s’ajouter l’arrêt de l’exemption pour les conférences maritimes. La concurrence va se faire aussi sur les surcharges. Ainsi, sur les THC (Terminal Handling Charges) l’augmentation moyenne se fait entre 14 % pour les ports néerlandais et 47 % pour ceux de la Grande-Bretagne. Les BAF (Bunker Adjustment Freight) pourraient être traités différemment selon les armateurs avec déjà une réduction au départ des ports européens. Une nouvelle époque qui risque de privilégier les taux « all in », conclut l’enquête.

H.D.

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